CADUC Armand, André

Par Gauthier Langlois

Né le 13 septembre 1818 à Ladaux (Gironde), mort le 25 août 1902 à Cauterets (Hautes-Pyrénées) ; avocat républicain à la Réole (Gironde), proscrit réfugié à Guernesey, Jersey et en Espagne suite au coup d’État du 2 décembre 1851 ; républicain modéré, député puis sénateur de la Gironde sous la IIIe République.

Armand Caduc
Armand Caduc
(Source : Assemblée nationale)

Armand Caduc était le dixième et dernier des enfants d’Arnaud Caduc (1763-1841) et de Louise Odissio (1786-1831). Les parents étaient planteurs sur l’île de Saint-Lucie aux Antilles. Après la conquête de l’île par les Anglais, ils revinrent s’installer comme propriétaires viticulteurs dans le bordelais, précisément à Ladaux où naquit Armand. Issue d’une famille aisée, Armand put faire des études supérieures à Poitiers où il obtint, en 1840, une licence de droit, puis s’installa comme avocat au barreau de la Réole.

Dès cette époque il se lia avec les principaux membres du parti démocratique dans la Gironde, dont Ernest Royer. Avec la révolution de février il redoubla d’ardeur dans la propagande républicaine et fut, en 1848, rédacteur du journal républicain la Tribune. Adversaire de la politique du prince-président Louis-Napoléon il était dans le collimateur des autorités. Poursuivi pour distribution d’imprimés il fut acquitté. Au commencement de l’année 1851 il se vit compromis dans le complot de Lyon. Mais étranger à cette affaire il bénéficia d’une ordonnance de non-lieu. Poursuivi suite au coup d’État du 2 décembre 1851, il réussit à échapper à l’arrestation. Petit, il s’était caché dans le coffre d’une voiture conduite par un ami et put échapper ainsi à la fouille des gendarmes à l’entrée du pont suspendu de la Garonne. Il se réfugia près d’Auros puis quitta la France, avec son beau-frère Alphonse Gravier, à bord du navire Alice qui le mena en Angleterre.

Prenant acte de sa fuite, la commission mixte de la Gironde le condamna à l’expulsion. Sa décision était motivée par le commentaire suivant : « Ancien président en 1848 du Comité révolutionnaire de la Réole dont l’influence désastreuse s’est fait sentir dans l’arrondissement entier. Impliqué en 1851 dans le complot de Lyon. Homme habile et audacieux, il a su s’emparer de la confiance des masses ».

Armand Caduc et son beau-frère Alphonse Gravier, se réfugièrent d’abord à Guernesey où il furent rejoint par Ernest Royer. Un mois plus tard tous les trois s’installèrent à Jersey où Armand se lia avec Victor Hugo. En 1853, il passa en Espagne où il fut rejoint, l’année suivante par Alphonse Gravier et Ernest Royer. Il se fit comptable, puis devint, en 1856, directeur du contentieux dans la compagnie de l’Ebre (Real Compañía de Canalizaciones y Riegos del Ebro). Il avait sans doute obtenu ce poste grâce aux relations qu’il devait avoir avec le français Jules Carvollo, directeur de cette compagnie, originaire comme lui du bordelais.

En 1858, accusé sans aucune raison de complicité dans l’attentat Orsini, il fut expulsé à la demande du gouvernement français et passa au Portugal. Quelques temps après il rentra en Espagne mais fut interné à Burgos. Après l’amnistie de 1859, Armand Caduc rentra La Réole où il reprit l’exercice de sa profession d’avocat, et où il devint le chef du parti de l’opposition contre l’Empire.

Le retour de la république, le 4 septembre 1870, lui permit d’entamer une carrière politique. Selon le Dictionnaire des parlementaires français « les électeurs républicains lui donnèrent, lors des élections générales du 8 février 1871, 32 914 voix ; mais ce fut une liste mixte qui l’emporta ; le dernier élu, M. Johnston, passa avec 94 944 voix. Le décès de M. Richier ayant déterminé une vacance dans la représentation de la Gironde, un scrutin complémentaire eut lieu le 20 octobre 1872. Le Congrès de la Ligue électorale républicaine opposa à la candidature conservatrice de M. de Forcade la Roquette, soutenue par la coalition des bonapartistes et des légitimistes, celle de M. Armand Caduc, qui se prononçait, dans sa circulaire, pour l’instruction publique gratuite, obligatoire et laïque, pour l’amnistie, contre les taxes sur les matières premières, et pour la liberté commerciale. Il annonçait qu’il soutiendrait M. Thiers « contre les menées de la droite monarchique », et qu’il se prononcerait en faveur de la dissolution de l’Assemblée. Élu par 66 308 suffrages contre 47 041, (115 045 votants, 198 728 inscrits), M. Caduc se conforma à ce programme ; il s’inscrivit aux réunions de la gauche et de l’union républicaine, fit une opposition constante au gouvernement du 24 mai, et vota : contre le septennat, contre l’état de siège, contre la loi des maires, pour les amendements Wallon et Pascal Duprat, et pour l’ensemble des lois constitutionnelles. Lors des premières manifestations de la politique républicaine intransigeante, dont Louis Blanc et Alfred Naquet étaient les porte-paroles, il s’était prononcé pour la politique opportuniste recommandée par Gambetta ; il échoua aux élections législatives du 20 février 1876, avec 5 807 voix, dans l’arrondissement de La Réole : ce fut le candidat bonapartiste, M. Robert Mitchell, (7 703 voix) qui l’emporta ».

« M. Caduc reparut sur la scène politique le 10 février 1878, après avoir échoué une seconde fois, le 8 avril 1876, lors d’une élection partielle dans la 2e circonscription de Bordeaux, contre M. Louis Mie, radical, intransigeant, réélu en 1877. Le décès de Louis Mie motiva une nouvelle élection. Candidat des opportunistes, M. Caduc se borna dans sa profession de foi, à réclamer une « République franchement progressive et libérale, ouverte à tous les dévouements incontestables » et fut élu par 5 068 voix (12 605 votants, 24 544 inscrits), contre 3 242 voix à M. Delboy, 2 695 à M. Steeg, et 1 573 à M. Chavauty. Il fit partie de l’Union républicaine, et vota : pour l’article 7, pour l’application des lois existantes aux congrégations non autorisées, pour le projet de rétablissement du divorce, pour les nouvelles lois sur la presse et le droit de réunion, etc ».

L’influence des bonapartistes s’effritant, Armand Caduc consolida ses positions et fonda à La Réole, en 1881, le Cercle du progrès. Il fut réélu, le 21 août 1881, par l’arrondissement de La Réole, avec 6 786 voix (13 116 votants, 17 418 inscrits), contre deux candidats bonapartistes, Gauban et Judde de Larivière. À la chambre il soutint la politique des cabinets Gambetta et Ferry, et vota les crédits du Tonkin.

Avant la fin de la session, le 26 avril 1885, il fut élu sénateur de la Gironde par 774 voix contre 476 données au duc Decazes. Il prit part, depuis lors, à tous les votes de la majorité : pour les lois sur l’enseignement primaire, pour l’expulsion des princes, pour la nouvelle loi militaire ; pour le rétablissement du scrutin uninominal (14 février 1889), pour le projet de loi Lisbonne restrictif de la liberté de la presse (18 février), pour la procédure à suivre devant le Sénat pour juger les attentats contre la sûreté de l’État (29 mars, affaire du général Boulanger).

Il fut réélu sénateur au renouvellement du 3 janvier 1897 au premier tour du scrutin par 850 voix sur 1 281 mais son rôle fut dès lors assez effacé. Il avait quitté le groupe de l’Union républicaine pour se faire inscrire à celui de la gauche démocratique.

Il mourut à l’âge de 84 ans, pendant les vacances parlementaires, lors d’un séjour dans la ville thermale de Cauterets. Le président du sénat Armand Fallières lui rendit hommage à la séance de rentrée du 21 octobre 1902. Après avoir retracé sa carrière politique il déclara : « Il n’y a pas un progrès qu’il n’ait appelé de ses vœux, une liberté qu’il n’ait consacré de son vote, un acte de défense ou d’action républicaine auquel il n’ait attaché son nom. M. Caduc a honoré son mandat et son parti ; n’est-il pas juste, qu’en retour, nous honorions sa mémoire ? » Bien que franc-maçon, il reçut des obsèques religieuses.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article27948, notice CADUC Armand, André par Gauthier Langlois, version mise en ligne le 20 février 2009, dernière modification le 11 décembre 2020.

Par Gauthier Langlois

Armand Caduc
Armand Caduc
(Source : Assemblée nationale)

SOURCES : Arch. privées de la famille Alavoine-Baudains, Liste établie par Eugène Alavoine après 1870. — La Gironde, 6 mai 1886. — Jean-Claude Farcy, Rosine Fry, « Caduc - Armand », Poursuivis à la suite du coup d’État de décembre 1851, Centre Georges Chevrier - (Université de Bourgogne/CNRS), [En ligne], mis en ligne le 27 août 2013. — Bnf, Fichier Bossu, Notice autorité. — Pierre Larousse, Grand dictionnaire universel du XIXe siècle, vol. 16, p. 437. — Sylvie Guillaume, Bernard Lachaise, Dictionnaire des parlementaires d’Aquitaine sous la Troisième République, Bordeaux, Presses universitaires de Bordeaux, 1998, p. 173. — Notice Wikipedia. — Jean Jolly, Dictionnaire des parlementaires français (1889-1940), PUF, 1960. — Adolphe Robert et Gaston Cougny, Dictionnaire des parlementaires français, Edgar Bourloton, 1889-1891. — Assemblée nationale, « Caduc Armand », Base sycomore. — Sénat, « Caduc Armand », Anciens sénateurs IIIème République. — Note de Rémi Gossez.

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