CHARNIER Pierre

Par Maurice Moissonnier

Chef d’atelier de la soierie lyonnaise ; fondateur de la Société de surveillance et d’ indications mutuelles, organisme d’entraide professionnelle ; membre de l’état-major provisoire qui maintint l’ordre durant la révolte des canuts en 1831.

Il vivait encore en 1844. Sous la Restauration, il se lia avec Pavy Joseph, député ultra-royaliste, et, soutenu par lui, fonda, en septembre 1827, la Société de surveillance et d’indications mutuelles destinée à organiser l’entraide chez les chefs d’atelier de la Croix-Rousse., et à protéger les maîtres-ouvriers, selon la dénomination traditionnelle dans la profession, aussi bien contre les exigences des maîtres fabricants, ou négociants, qui contrôlaient l’approvisionnement en matières premières et l’écoulement des produits fabriqués, que contre les malfaçons systématiques et les fraudes (« piquage d’once ») de leurs ouvriers. La société était subdivisée pittoresquement en lignes et rayons, avec une hiérarchie compliquée où le directeur (« l’œil ») contrôlait des « œils de rayon » et « œils de perdrix », assisté d’une « plume » (le secrétaire) et d’une « clef » (le trésorier).

Très vite, Charnier Pierre entra en conflit avec ses compagnons qui lui reprochèrent son ambition personnelle. Une scission se produisit et, en avril 1828, une autre société se constitua, le Devoir Mutuel, animée par un autre chef d’atelier, également légitimiste selon toute vraisemblance, Bouvery.
À la veille des événements de novembre 1831, Pierre Charnier travailla à l’élaboration du tarif établi à la suite de négociations engagées entre fabricants et chefs d’atelier. Lors de la révolte des canuts — voir Romand Jean-Claude* — il fit partie de l’état-major provisoire qui prit en main le maintien de l’ordre public et s’installa à l’Hôtel de Ville. Après la reconquête de Lyon, il fut envoyé à Paris avec deux autres chefs d’atelier pour plaider la cause de ses compagnons, comme conseiller prud’homme et comme l’un des deux auteurs du « Rapport fait à Monsieur le président du Conseil sur les causes générales qui ont amené les événements de Lyon ». Voir Bernard*. Il semble qu’à ce moment-là, il se soit vanté d’avoir été, depuis 1827, à la tête de la conspiration qui venait d’éclater. Ce qui est certain, c’est qu’au retour de sa mission, le 12 mars 1832, il posa sa candidature à un poste de commissaire de police, en dénonçant, par la même occasion, ses collègues Bouvery et Falconnet qu’il accusait de s’acharner à vouloir soulever les ouvriers. Voir aussi, Chaboud Étienne*, Berthelier Henri*, Doucet*, Leborgne*, Masson-Sibut*.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article28503, notice CHARNIER Pierre par Maurice Moissonnier, version mise en ligne le 20 février 2009, dernière modification le 17 août 2021.

Par Maurice Moissonnier

SOURCES : Arch. Dép. Rhône, série M, Journées de novembre 1831 et Minutes des rapports du commissaire central de Lyon, 1831-1832 (registres). — Arch. Mun. Lyon I2/48, coalitions et grèves (1803-1870). — I2/35 et 36. Police politique (1816-1870). — Collections de L’Écho de la Fabrique et de L’Écho des Travailleurs. — F. Rude, Le mouvement ouvrier à Lyon (1827-1832), Paris, 1944, et « L’insurrection ouvrière de Lyon en 1831 et le rôle de Pierre Charnier », dans La Révolution de 1848, année 1938, nos 164, 165 et 166. (M. Fernand Rude possède ce qui subsiste des papiers personnels de Pierre Charnier.) — P. Froment, L’insurrection ouvrière de Lyon de 1831, Paris, 1931. — M. Moissonnier, La Révolte des Canuts, Paris, 1958.
Une nouvelle version, par Ludovic Frobert, est en cours de préparation en 2011.

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