DEBUCHY Jean-Baptiste, Isidore

Par Jean Maitron, Jean Piat

Né le 3 avril 1831 à Roubaix (Nord), mort le 27 juin 1898 à Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais). Employé puis chef de bureau à la Compagnie des chemins de fer du Nord. Militant socialiste. Conseiller municipal (1892-1896).

Frère cadet de Désiré Debuchy, il était employé aux Messageries de Roubaix et habitait à Croix (Nord). En décembre 1851, il était signalé comme « socialiste enragé ». Sa fillette fut arrêtée le 28 janvier 1853, alors qu’elle aidait Jenny Bianchi, épouse du proscrit lillois, à introduire en France un lot de brochures (Napoléon le petit de Victor Hugo et Le Deux Décembre de Victor Schoelcher).
Il fut arrêté, le 12 janvier 1855, pour affiliation à la société secrète des « Poignards », soupçonnée de l’attentat de Perenchies-Lambersart contre le train impérial (10 septembre 1854). Voir A. Desaine. Une ordonnance de non-lieu fut rendue en sa faveur. Il entra alors au service des Messageries de Lille, puis, en novembre 1857, il s’établit à Dunkerque et fut attaché au bureau de la Petite Vitesse. Il rentra à Lille en février 1858 comme employé à la gare des chemins de fer du Nord.
Durant toute cette période, il fut étroitement surveillé par la police qui le considérait comme un démagogue dangereux. À son domicile, on saisit « des brochures et gravures et tout ce qui avait trait à la République démocratique et sociale ». On le soupçonnait, en particulier, d’entretenir une active correspondance avec les réfugiés français en Belgique où sa femme, Marie-Louise Gilmez, se rendait. L’un de ses correspondants, au-delà de la frontière était le maître-tailleur Florimond Derasse, expulsé politique, réfugié à Mouscron.
Le Second Empire crut s’en débarrasser en le mutant à la gare de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais) où il était chef de bureau de la petite vitesse, mais il ne désarma pas. Avec les républicains de cette ville, il combattit le plébiscite de mai 1870.

Au lendemain du 4 septembre, Jean-Baptiste Debuchy participa à la Fondation du Comité républicain et en devint le vice-président. Il soutint avec ferveur la Commune de Paris. Il « passait, en juillet 1871, [...] pour être, à Boulogne, le représentant de l’Internationale. Sans instruction première et très intelligent, il s’était grisé l’esprit par la lecture d’ouvrages de politique et d’économie sociale. [...] Après le 4 septembre, il développa ardemment devant ses employés, soit dans les cabarets, soit même dans son bureau, les théories communistes qu’il avait depuis longtemps nourries et exerça de même une influence fâcheuse sur les ouvriers de la compagnie ». De son côté, E.-M. Blondel, colonel, chef de la 3e légion de Gendarmerie de Boulogne-sur-Mer, affirma que Jean-Baptiste Debuchy « a été un des agents les plus actifs de l’Internationale », dans son rapport du 2 août 1871 à la Commission d’enquête. Mais le président de la cour de Douai écrivait, le 11 juillet 1871 : « Aucun fait de nature à établir des relations avec l’Internationale et sa participation, au moins morale à l’insurrection n’a pu encore être sérieusement constatée... »

Néanmoins, l’administration des Chemins de fer l’éloigna en lui donnant un congé en attendant, ce qui ne tarda pas, de le licencier purement et simplement sur l’ordre de Rothschild, l’un des patrons de la Compagnie du Nord. Privé de son poste de chef de bureau, pour subsister, il va se tourner vers la représentation commerciale et notamment devenir commissionnaire en eau-de-vie.
En 1892, il fut élu conseiller municipal. Il n’accomplira qu’un seul mandat. Les sollicitations dont il fut l’objet ne purent vaincre les raisons de santé qu’il allégua pour se retirer de la lutte. Il mourut deux ans plus tard. La France du Nord, le 27 juin 1898, lui rendit un hommage un peu court. Elle ne connaissait pas ses brillants états de service depuis 1851.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article2862, notice DEBUCHY Jean-Baptiste, Isidore par Jean Maitron, Jean Piat, version mise en ligne le 30 juin 2008, dernière modification le 23 mars 2019.

Par Jean Maitron, Jean Piat

SOURCES : Arch. Dép. Nord, M 141/67, 76, 77. — Arch. Mun. Roubaix, J I, n° 1 ; D II/b 18 ; R 1/bd 1-2 ; D II/db 2 Fos 121/122 (lettre du Préfet, 16 décembre 1851). — Arch. Nat., C 2883 (lettre du sous-préfet de Boulogne-sur-Mer du 11 juillet 1871, au premier président de la cour d’appel de Douai), 7e dossier, pièce 179, pièce 330. — L’Écho du Nord, 30 janvier, 5 et 8 février 1853. — La Gazette des Flandres, 1, 5, 7, 8 février 1853. — Liberté, 30 janvier, 4 et 8 février 1853. — La Vérité, 11 avril, 14 et 17 août 1854. — La France du Nord, 27 juin 1898. — Le Journal de Roubaix, 15 mars 1872.

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