DAVID Félicien

Par P. Régnier

Né le 13 avril 1810 à Cadenet (Vaucluse), mort le 29 août 1876 à Saint-Germain-en-Laye (Seine-et-Oise). Musicien et compositeur. Saint-simonien.

Issu d’une famille d’orfèvres, Félicien David, orphelin à l’âge de cinq ans et recueilli par la famille de sa mère, entra à la maîtrise de la cathédrale Saint-Sauveur, à Aix-en-Provence et s’y fit remarquer par ses dons précoces pour la composition. Après avoir complété ses études générales et musicales au collège des jésuites, il fut deuxième chef au théâtre d’Aix jusqu’en 1829, puis maître de chapelle à Saint-Sauveur. Avec l’appui de Cherubini et grâce à une maigre pension versée par un oncle, il put monter à Paris en 1830 pour entrer au Conservatoire.
C’est son amitié avec Pol Justus qui le conduisit à se rallier au mouvement saint-simonien vers la fin de 1831 et à en agrémenter les réunions par ses talents de chanteur, d’instrumentiste et de compositeur. Les vivres lui ayant été coupés, la « Famille » le prit en charge complètement. Participant à la Retraite de Ménilmontant en 1832, il y écrivit les musiques des chants choraux qui accompagnaient les cérémonies (« Le Retour du Père ", « Prière du matin », « Danse des astres », « Peuple fier ! peuple fort ! », etc.). Les différentes « missions » répandues en 1833 par toute la France après la dispersion de la Retraite en firent entendre les accents dans les rues et dans les réunions publiques comme dans les salons. La même année 1833, David se joignit aux Compagnons de la Femme de Barrault et partit avec eux à la quête de la Mère en Orient, non sans embarquer avec lui un piano de voyage en métal.
De son périple en Méditerranée (commencé au printemps de 1833) et de son séjour en Égypte (jusqu’au printemps de 1835), il rapporta des Mélodies orientales et une inspiration exotique qui fit son originalité et ouvrit la voie à l’orientalisme musical de la fin du siècle. Après plusieurs années de solitude et de misère, pendant lesquelles il s’ouvrit aussi à l’influence du romantisme allemand, il connut un premier et très grand succès, y compris auprès de Berlioz, avec son ode-symphonie Le Désert (1844), dont les paroles étaient dues à Auguste Colin*. Pour le lancer, Michel Chevalier* et Enfantin avaient à cette occasion ouvert leur bourse et battu le rappel de leurs amitiés. Aidé par Arlès-Dufour*, le « Père " prit alors en mains la carrière de son protégé et lui organisa une tournée en Allemagne et en Autriche avec l’intention avouée de promouvoir du même coup le projet de canal de Suez. Le soutien de ces deux amis fut aussi généreux que constant, puisque, de 1835 à 1857, ils lui auraient remis au total quelque 100 à 120 000 francs — les Péreire lui servant, à partir de 1858, une rente annuelle de 1 200 francs. Bien que les œuvres suivantes, comme Moïse au Sinaï (1846), sur un livret imaginé et en partie rédigé par Enfantin, Christophe Colomb (1847), La Perle du Brésil (1851) ou Lalla-Roukh (1862) n’aient pas toutes été des triomphes analogues, l’investissement ne fut pas inutile : tout en signifiant ses convictions de façon à peine voilée dans ses livrets et par des reprises allusives de thèmes musicaux des chants de Ménilmontant, F. David demeura dès lors un musicien reconnu, succédant ainsi à Berlioz à l’Institut en 1869. S’il ne comprit pas la Commune, son enterrement civil, auquel il avait tenu pour témoigner de sa foi saint-simonienne persistante, fut l’occasion d’un beau scandale politique : l’armée lui ayant refusé, pour motif d’impiété, le salut dû à un membre de la Légion d’honneur, les protestations des parlementaires contraignirent à la démission le ministre de la Guerre et, avec lui, le président du Conseil, Jules Dufaure.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article29514, notice DAVID Félicien par P. Régnier, version mise en ligne le 20 février 2009, dernière modification le 20 février 2009.

Par P. Régnier

SOURCES : Bibliothèque de l’Arsenal, Fonds Enfantin ; — Ralph P. Locke, Les Saint-Simoniens et la musique, Liège, Mardaga, 1992.

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