Né le 10 avril 1814 à Champdeniers (Deux-Sèvres), mort le 29 octobre 1903 au même endroit. Militant révolutionnaire et homme politique.
Il était fils de François Fayard propriétaire à Champdeniers et Bressuire et de Jeanne Cathelineau.
Dans une notice inédite qu’il a consacrée à Fayard Pascal, l’écrivain niortais Jacques Nanteuil écrit : « On serait désireux de savoir ce qui détermina de bonne heure son adhésion aux idées avancées. Ce qui est certain, c’est que, dès son arrivée à Poitiers, en 1835, où il commençait ses études de pharmacie, il avait pris position pour la République... » (Jacques Nanteuil : « Pascal Fayard, un républicain de 1848 »)
Dans cette même notice, les souvenirs du militant révolutionnaire, recueillis en 1898 au cours d’un entretien, alors que celui-ci, âgé de 84 ans, était maire de Champdeniers, sont ainsi rapportés : « À Poitiers, nous étions batailleurs. Il y avait tout le temps des duels. Nous forcions les régiments à partir en provoquant les officiers. En 1836, j’allai à Paris. Ah ! voyez-vous, il y a longtemps. Je ne me rappelle plus bien ces choses-là, maintenant. Je fus condamné à un an de prison avec Blanqui et Barbès. Blanqui fabriquait de la poudre et moi des cartouches. Nous conspirions contre Louis-Philippe [...] Nous avons été trahis par un étudiant en médecine [...]. »
Effectivement il alla à Paris pour des études de droit et de médecine en 1836. Il n’était au procès des poudres d’août que comme témoin, mais, par contre, inculpé dans l’affaire de fabrication de cartouches chez Félix Génin, 24, rue Dauphine (Xe arr., maintenant VIe), jugée plus tard. On avait trouvé chez lui des papiers concernant une société secrète (règlement, programme, listes etc.) que la justice considérait comme appartenant à la Société des Familles. Demeurant 7, rue des Grès (XIe arr., maintenant rue Cujas, Ve), arrêté le 2 juin, rue Dauphine, porteur de listes, il soutenait que ces listes étaient destinées à la diffusion d’une brochure, Entretiens populaires. Il fut écroué à La Force, le 4 juin 1836, et transféré à Sainte-Pélagie le 26 août. Il fut condamné à 1 an de prison et 500 F d’amende le 29 septembre 1836 et vit ses peines confirmées au procès d’appel joint à celui du procès des poudres, le 23 octobre, pour association et complot. Réintégré le 24 octobre à Sainte-Pélagie, transféré le 24 avril 1837 à la maison de santé 99, rue du Faubourg Poissonnière, il fut libéré par l’amnistie de mai 1837.
Ses études terminées, Pascal Fayard revint à Champdeniers, où il s’installa comme pharmacien. Il épousa, le 5 janvier 1846, Rose-Clémence Bourrillon, fille d’un médecin de la localité. Dès son retour dans les Deux-Sèvres, il s’était efforcé d’y organiser le parti républicain démocratique. Dans son entretien avec J. Nanteuil, cité plus haut, il disait à ce sujet :
« Nous nous entendîmes d’abord avec un groupe communiste de Niort, partisan des idées de Cabet. Mais, nous nous en sommes séparés quand nos adeptes furent assez nombreux. »
Fayard salua avec joie la révolution de 1848. Aux élections municipales, il fut élu à Champdeniers. Candidat aux élections du 13 mai 1849 à l’Assemblée législative sur la liste des travailleurs démocrates socialistes, il n’obtint que 2 022 voix sur 56 851 votants, mais c’est lui qui, des candidats de cette liste, recueillit le plus de suffrages ; le canton de Champdeniers à lui seul lui en donna 323.
C’est sans doute à son influence qu’il faut attribuer le nombre relativement élevé de voix obtenues à Champdeniers, lors de l’élection présidentielle du 10 décembre 1848, par Ledru-Rollin (90 voix) ; seul le 1er canton de Niort lui en donnait davantage (106). Le journal L’œil du Peuple (n° du 24 juillet 1851) publia un entrefilet signé « Fayard, capitaine de la garde nationale et membre du conseil municipal » où l’auteur justifiait son attitude lors d’une revue de la garde nationale de Champdeniers, au cours de laquelle il avait prononcé une allocution terminée par les cris : « Vive la République ! Vive la Constitution ! ».
Le même journal (n° du 31 juillet 1851) inséra une lettre de Fayard répondant à un article du journal légitimiste L’Étoile de l’Ouest qui l’avait mis en cause au sujet de cette manifestation ; dans cette réponse, il disait : « Oui, aussi bien que M. de Brémond, royaliste, je crois être ami de l’ordre tout en étant socialiste et socialiste pur sang, je vous passe l’expression. Je veux le socialisme, parce que c’est de la science des améliorations sociales que doit sortir le bien-être que certains ne veulent que pour eux et que nous, socialistes, nous voulons pour tous. »
En août, Fayard fut suspendu, pour trois mois, de ses fonctions de capitaine de la garde nationale, par arrêté du préfet des Deux-Sèvres.
Après le coup d’État du 2 décembre, il fut arrêté à Champdeniers, conduit à Niort et condamné à six jours de prison.
Une liste des « chefs des sociétés secrètes » et des « meneurs du parti socialiste » dans le département, établie à cette époque par la police, citait Fayard comme « ancien correspondant de Cabet ; propagandiste mielleux et actif ; bien qu’exalté, on lui croit peu de résolution ». Un rapport du préfet au ministre, en date du 17 janvier 1852, signalait que Fayard, à la suite du coup d’État, « a cherché infructueusement à soulever la population de Champdeniers contre la gendarmerie et le commissaire de police ».
Une note d’information à l’intention de la Commission mixte des Deux-Sèvres précisait à son sujet : « Marié, possède quelque aisance. Homme très dangereux et qui se livre incessamment à la propagande démagogique. »
Le 9 février 1852, il fut condamné par la Commission départementale mixte à la transportation à Cayenne, avec les attendus suivants :
« Attendu que Fayard, déjà condamné en 1836, à Paris, à un an d’emprisonnement et 500 francs d’amende pour affiliation à une société secrète et fabrication clandestine de poudre de guerre, a été, le 9 janvier 1852, condamné par le tribunal correctionnel de Niort à six jours de prison pour outrage à des fonctionnaires publics et que les faits qui ont motivé cette condamnation se sont passés le 3 décembre précédent et ont eu pour but d’exciter les esprits à la révolte contre les événements qui s’accomplissaient [...]
« Attendu que la position sociale et l’éducation de Fayard ne pouvaient lui permettre de s’abuser sur la portée des faits qui lui sont reprochés et donnent à ses menées et à ses paroles un nouveau degré de culpabilité !
« Attendu qu’il est notoirement connu comme l’un des meneurs les plus actifs du parti démagogique dans l’arrondissement de Niort, en correspondance avec les agitateurs du dehors. »
Se sachant suspect, Fayard changeait fréquemment de domicile. Un jour, un de ses amis accourut auprès de lui : « Voilà les gendarmes ! » Et, en effet, les gendarmes étaient déjà à la porte et l’interpellaient : « Nous voulons vous parler. » De la fenêtre, il leur répondit : « Je descends tout de suite ! » Mais sans perdre un instant, il ouvrit une fenêtre de derrière, sauta dans le jardin et alla se cacher à la campagne. Il finit pourtant par être arrêté ; mais, il ne fut pas transporté à Cayenne, sa peine ayant été commuée en celle de l’expulsion de France par décision du colonel Espinasse, commissaire extraordinaire (29 mars 1852). Le 14 avril 1852, il s’embarqua au Havre pour l’Angleterre ; il se retira à Jersey, où il devint l’ami de Victor Hugo, avec qui il entretint une correspondance aujourd’hui disparue.
Lors d’un voyage de Napoléon III à La Rochelle, un recours en grâce fut présenté à l’empereur par Bouffard, adjoint au maire de La Rochelle, et parent de Fayard, en faveur de celui-ci. Le préfet des Deux-Sèvres, consulté à ce sujet, donna un avis défavorable. Cependant, grâce à l’intervention de Baroche, vice-président du conseil d’État, ancien représentant du peuple de la Charente-Inférieure sous la Seconde République, Fayard obtint la remise entière de sa peine (décision impériale du 20 décembre 1852). Il rentra en France en avril 1853 et reprit son activité professionnelle à Champdeniers. En juillet 1855, il fut réélu conseiller municipal de sa commune avec 147 voix.
Il s’abstint cependant de toute propagande politique jusqu’à la fin de l’Empire. Le 22 novembre 1871, il présenta une pétition à l’Assemblée nationale pour réclamer une indemnité compensatrice, en qualité d’ancien proscrit de décembre 1851 ; il obtiendra ultérieurement une pension de mille francs.
« Il allait passer des dernières années entouré de la sympathie de ses concitoyens. Le parti républicain dans toutes ses nuances le saluait comme un de ses mentors. Sans cesse réélu au conseil municipal, il allait exercer longtemps les fonctions de maire, dans lesquelles la mort devait le surprendre. Une certaine publicité commerciale s’était faite autour de son nom. On sait que les foires de Champdeniers attiraient beaucoup d’étrangers, en particulier des Espagnols, venus acheter les mulets du Poitou. Le pharmacien Fayard s’avisa de leur délivrer contre la dysenterie à laquelle ils étaient sujets de petits paquets à base de bismuth et de magnésie. Les Espagnols répandirent au loin la réputation de ce remède dont ils avaient mesuré l’efficacité, et ce fut l’origine de la popularité des pastilles Fayard.
« Toujours plein de vie, malgré les années, ce vieillard alerte s’ingéniait à faire le bien autour de lui [...] Son décès, survenu le 29 octobre 1903 — il avait 89 ans — fut l’objet d’une grande manifestation présidée par le préfet et à laquelle prirent part toutes les notabilités du parti républicain » (J. Nanteuil, op. cit.) Voir Guay Paul.
SOURCES : — Archives départementales de Paris (Seine), registres d’écrou, DY4 32-2413 ; DY8 10-2933. — Archives départementales des Deux-Sèvres, 4 M 6/17, 4 M 15/4, Acte de mariage.. — Gazette des Tribunaux, septembre et octobre 1836. — L’œil du Peuple, journal socialiste des Deux-Sèvres (1849 à 1851). — Jacques Nanteuil, « Pascal Fayard, un républicain de 1848 » (notice inédite, citée avec l’autorisation de l’auteur). — Benjamin Colin, Liste des proscrits de Jersey qui sont rentrés en France à la suite de demandes en grâce, s.l.n.d. [Jersey, 1853 ?]. — Jean-Claude Farcy, Rosine Fry, « Fayard - Jacques Paul », Poursuivis à la suite du coup d’État de décembre 1851, Centre Georges Chevrier - (Université de Bourgogne/CNRS), [En ligne], mis en ligne le 27 août 2013. — Notes de Gauthier Langlois.