GATTI de GAMOND Zoé, Charlotte, née de Gamond, dite Marie de G***.

Par Notice revue et complétée par Éliane Gubin, Catherine Jacques, Valérie Piette.

Née le 11 février 1806 à Bruxelles (Département de la Dyle), morte le 28 février 1854 à Bruxelles, province du Brabant, Belgique. Femme de lettres, inspectrice des salles d’asile et des écoles primaires de l’État. Saint-simonienne puis fouriériste.

Fille d’Elisabeth de Lados et de Pierre de Gamond, Zoé de Gamond naquit dans une famille bourgeoise de Bruxelles. Son père fut d’abord connu comme avocat et avoué, avant de terminer sa carrière comme conseiller à la Cour d’Appel et professeur à l’Université Libre de Bruxelles. Elle participa aux discussions philosophiques et politiques qui animèrent le salon de sa mère. Le début de son activité politique coïncida avec les événements révolutionnaires de 1830. Bientôt, Zoé et sa sœur Elise (la troisième sœur, Marie, épousera le français Thomé, ingénieur, considéré comme un des promoteurs du tunnel sous la Manche), réputées comme « deux saint-simoniennes prêtresses » répandant la doctrine « avec zèle et succès » tiendront salon deux fois par semaine. Mais leur élan fut de courte durée, brisé par les théories d’émancipation sexuelle prônées par les disciples de Saint-Simon. Zoé exposa ses théories concernant la condition sociale des femmes dans la Revue encyclopédique dès 1832.
La littérature italienne était depuis longtemps une des passions de Zoé de Gamond. Se détournant du saint-simonisme, elle publia en 1833 et 1834 divers articles à propos du poète Alfiéri dans le Recueil encyclopédique belge, dans l’Artiste, revue des arts et de la littérature et dans la revue parisienne de littérature italienne l’Exilé. Cet intérêt ainsi que ses engagements politiques lui firent participer au comité pour les réfugiés politiques mis en place par Bartels. De nombreux Polonais et Italiens, fuyant la France, vinrent chercher refuge en Belgique. En février 1834, Zoé de Gamond prit la tête d’un comité de dames bruxelloises ; aidée de Zoé Parent et d’Eugènie Poulet, son amie de toujours, elle mit sur pied une "exposition d’objets d’arts et ouvrages de dames au profit des réfugiés politiques". Elle rencontra à cette occasion de nombreux réfugiés dont le polonais Jean Czynski* et l’italien Gatti, qu’elle épousa le 18 mai 1835. Jean-Baptiste Gatti (Ravenne, 24 juin 1800 - Bruxelles, 7 octobre 1877) peintre, vint se fixer à Bruxelles vers 1832, après avoir participé, dans sa terre natale, aux insurrections menées contre le gouvernement pontifical. Il enseigna la peinture, comme professeur interne, à l’institut bruxellois demeuré célèbre de l’italien Gaggia.
L’année de son mariage, Zoé de Gamond fonda avec Eugènie Poulet deux établissements pour femmes : une école pour les filles de la classe ouvrière, dont le programme se limitait à la lecture, le calcul, l’écriture et la morale et une école normale destinée à former des institutrices. Cette activité fut de courte durée et le couple Gatti quitta la Belgique pour se rendre à Paris. Entre-temps Zoé publia deux ouvrages dans lesquels elle analysait la situation des femmes : De la condition sociale des femmes au dix-neuvième siècle (Bruxelles, 1834) et Esquisses sur les femmes (Bruxelles, 1836). Déçue par le saint-simonisme, Zoé trouva dans le fouriérisme « la solution du problème social ». Mais si elle admirait profondément Fourier*, au point d’en devenir une commentatrice reconnue, l’adhésion n’était pas inconditionnelle et s’arrêtait à la propriété et à la famille, qui demeuraient pour elle intouchables. A Paris, Zoé de Gamond participa aux querelles d’écoles qui suivirent le décès de Fourier. Elle y retrouva Jean Czynski et créa avec lui Le Nouveau Monde, organe des dissidents de l’Union harmonienne. Elle publia Fourier et son système (1838), qui connut jusqu’en 1842 cinq rééditions, et fut l’objet d’une traduction anglaise (1842). En 1840, un an après la naissance de sa fille Isabelle Gatti de Gamond, elle se lança dans le projet de création d’un phalanstère, soutenue financièrement par le fouriériste anglais Arthur Yung. En 1842, elle réalisa le phalanstère de Citeaux, qui tourna rapidement au désastre financier.
Ruinés, les Gatti regagnèrent la Belgique. Ils y connaîtront la misère et les privations. Zoé réclama des moyens d’existence auprès de connaissances et s’adressa même à la reine. Dénuée de tout, elle retourna seule à Paris, où elle espérait non seulement « utiliser [sa] plume, vivre, exister mais encore faire du bien ». Sa nomination comme inspectrice générale des écoles gardiennes, des écoles primaires de filles et des établissements destinés à former les institutrices de l’État belge mit fin à ses embarras financiers. Au cours de l’année troublée de 1848, Zoé mit au monde sa troisième fille et son dernier livre (L’Organisation du travail par l’Éducation Nationale). Écrit au moment où l’Europe est en ébullition, il représentait une sorte de chant du cygne, l’espoir « que la révolution française de 1848 soit l’ère de la réorganisation universelle des sociétés ». Dans ce but, elle prôna à nouveau un modèle de vie communautaire, basé sur l’entité de la commune, dont elle détailla minutieusement l’organisation économique et administrative.
Mais de santé fragile, elle mourut à 48 ans, en 1854, laissant trois jeunes filles dont Isabelle Gatti de Gamond, considérée comme l’une des plus grandes féministes belges.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article31462, notice GATTI de GAMOND Zoé, Charlotte, née de Gamond, dite Marie de G***. par Notice revue et complétée par Éliane Gubin, Catherine Jacques, Valérie Piette., version mise en ligne le 20 février 2009, dernière modification le 20 février 2009.

Par Notice revue et complétée par Éliane Gubin, Catherine Jacques, Valérie Piette.

ŒUVRES : De la condition sociale des femmes au XIXe siècle, Bruxelles, 1834. — Esquisses sur les femmes, Bruxelles, 1836. — Des devoirs des femmes et des moyens les plus propres à assurer leur bonheur, Bruxelles, 1838. — Le Roi des Paysans (en coll. Avec J. Czynski), Paris, 1838. — Fourier et son système, Paris, 1838. — Réalisation d’une commune sociétaire d’après la théorie de Charles Fourier, Paris, 1840. — Fièvres de l’âme, Paris, 1844. — Abrégé d’Histoire Sainte, Bruxelles, 1845. — Paupérisme et association, Bruxelles, 1846 et Lyon, 1847, in-16, 177 pages. — Le Monde invisible, Bruxelles, 1846. — L’organisation du Travail par l’éducation nationale, Bruxelles, 1848. — Lectures pour la jeunesse. Histoire de Louis et de Louise ou les oeuvres de miséricordes, Liège, 1849. — Notions les plus pratiques de Sciences naturelles appliquées aux usages de la vie, Bruxelles, 1850. — Lectures historiques belges, Bruxelles, 1851. — Manuel des salles d’asiles suivi du Questionnaire pour les écoles primaires d’après la méthode de Pestalozzi, Bruxelles, 1851.

SOURCES : Académie Royale de Belgique, Papiers de Stassart, Correspondance, n° 21, 773 et 782. — Goffart E., Mme Gatti de Gamond, Liège, 1857. — Van Nuffel R., « Zoé Gatti de Gamond », Biographie Nationale, t. 38, Bruxelles, 1973-1974, col. 241-250. — Van Nuffel R., « Zoé Gatti de Gamond, l’enseignement et la religion », L’Église et l’État à l’époque contemporaine. Mélanges dédiés à la mémoire de Mgr. A. Simon, Facultés Universitaires Saint-Louis, Bruxelles, 1975, p. 533-546.

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