Par notice complétée par Gauthier Langlois
Né le 5 novembre 1807 à Rodez (Aveyron), mort le 17 mai 1884 à Bordeaux (Gironde) ; médecin à Niort (Deux-Sèvres), journaliste et homme politique socialiste de la Seconde République., proscrit en exil à Jersey suite au coup d’État du 2 décembre 1851.
Il était le neuvième des onze enfants du marchand Jean-Pierre Ginestet (1762-1842) et de son épouse Marie-Rose Benoit (1767-1827). Marié, il eut trois enfants : Berthe née en 1842, Alice en 1844 et Théophile en 1850.
Rédacteur en chef de L’œil du Peuple de 1849 à 1851. Le premier numéro de ce journal, publié à Niort, 21, rue du Faisan, parut le 25 mars 1849, peu avant les élections à l’Assemblée législative.
De la déclaration de principe, il ressortait que L’œil du Peuple, qui s’intitulait « journal des intérêts démocratiques, agricoles et sociaux », devait défendre un socialisme réformiste sans se rattacher à une école déterminée. Il réclamait notamment : le droit au travail, la création de banques nationales organisant et distribuant le crédit, l’impôt progressif substitué à l’impôt proportionnel, l’enseignement gratuit et identique pour tous, l’association volontaire libre, la République démocratique et toutes les améliorations sociales qui en dérivent.
Le Dr Ginestet fut poursuivi devant la cour d’assises pour son éditorial du 16 décembre 1849, intitulé « Droit de jouir ». Il développait l’idée de Jean-Jacques Rousseau : « La terre appartient à Dieu et ses fruits sont à tout le monde ». Inculpé d’atteinte au droit de propriété, il fut acquitté.
Dans L’œil du Peuple du 17 février 1850, Ginestet écrivait : « Le Socialisme, c’est la Civilisation. Oui, la Civilisation, car il est temps enfin, pour l’honneur de l’humanité, que l’instruction se propage, que le travail soit plus largement rétribué et que la propriété, par l’élévation même du salaire, devienne accessible à tous. Oui, la Civilisation, car il est temps enfin, pour le bonheur de nos semblables, que le travail régulier prenne la place du chômage et que le père de famille, moralisé par l’aisance, comme le disait Robert Peel, ne soit plus éternellement aux prises avec l’irritation de la misère. »
Tout en rédigeant et dirigeant L’œil du Peuple, le Dr Ginestet assurait les fonctions de président de la Société philanthropique de Niort.
Par jugement de la cour d’assises des Deux-Sèvres en date du 11 septembre 1851, il fut condamné à deux mille francs d’amende et à six mois de prison pour délit de presse. Il purgeait sa peine lorsque se produisit le coup d’État du 2 décembre.
Le 17 janvier 1852, dans un rapport au ministre, le préfet des Deux-Sèvres indiquait au sujet de Ginestet : « En prison. C’est l’âme du parti révolutionnaire ; méprisé et craint de tous, c’est un organisateur de résistance ; correspond avec les sociétés secrètes, subventionné par les révolutionnaires, il mérite la plus forte punition ; mais en prison pour délit de presse, privé par moi de communication avec ses amis politiques, mis au secret le 2 [décembre] au soir, il n’a connu ce qui s’était passé que le 6 ; il n’est pour rien dans l’insurrection récente, bien qu’il eût organisé toute la résistance pour 1852 et qu’il se fût ouvertement constitué prisonnier assez vite pour être libre en mai 1852 et pouvoir se mettre alors à la tête du mouvement. C’est lui qui a fait dans le département tout le mal, l’opinion publique comprendrait qu’il eût la punition la plus sévère et que de ce qu’il a été plus tôt coupable ne devînt pas la cause qui le fît punir moins sévèrement. »
Le 16 février 1852, la Commission mixte des Deux-Sèvres décida que Ginestet serait éloigné de France, « ne pensant pas qu’il soit possible à son regret de lui appliquer une punition plus sévère. »
Expulsé du territoire, le Dr Ginestet se retira en Angleterre ; il figure sur la liste des proscrits résidant à Jersey. Le 21 octobre 1853 il était présent à l’assemblée générale des proscrits républicains résidant à Jersey, qui déclara le sieur Julien Hubert comme espion et agent provocateur de la police de Napoléon III.
Compris dans l’amnistie de 1859, il put revenir en France. Il fut élu conseiller municipal de Niort en 1871. Il se présenta, mais sans succès, aux élections du 8 février à l’Assemblée nationale dans les Deux-Sèvres.
Par notice complétée par Gauthier Langlois
SOURCES : Archives départementales des Deux-Sèvres, 4 M 6/17. — Maison de Victor Hugo - Hauteville House à Guernesey, Album Philippe Asplet, fol. 33. — Collection de L’œil du Peuple (1849-1851). — Jean-Claude Farcy, Rosine Fry, « Ginestet - Adolphe Charles », Poursuivis à la suite du coup d’État de décembre 1851, Centre Georges Chevrier - (Université de Bourgogne/CNRS), [En ligne], mis en ligne le 27 août 2013. — Notes de Gauthier Langlois.