HASSENFRATZ Henry, Pierre

Par Notice revue et complétée par Thomas Bouchet

Né vers 1794 ; conducteur des Ponts et Chaussées, puis rentier. Combattant de juillet 1830, insurgé des 5 et 6 juin 1832 ; franc-maçon.

Henry Hassenfratz était le fils du scientifique bien connu, à la fois physicien, chimiste et géographe, militant jacobin de la période révolutionnaire, membre de la franc-maçonnerie. Il accomplit de brillantes études et en 1811, il fut élève d’artillerie à Saint-Cyr. Officier d’artillerie en 1814, officier de marine en 1815, il devint en 1818, ingénieur mécanicien de la marine, chargé de la construction de ponts « en chaînes de fer » dans l’île Bourbon (la Réunion). De retour en France, il fut employé comme conducteur des ponts et chaussées. Il fréquenta les milieux républicains de la fin de la Restauration, et combattit pendant les Trois Glorieuses. Son courage lui valut la Décoration de juillet. Il demeurait alors au 12 de la rue des Fossés-Saint-Victor.
Il prit une part active à l’insurrection qui suivit les funérailles du général Lamarque. À son procès, de nombreux témoins affirmèrent l’avoir vu en habit de garde national, avec un shako de l’armée et un sabre d’officier, en tête des insurgés. Il fut accusé d’avoir participé aux assauts des postes situés rue de Pontoise, place aux Veaux et surtout place Maubert où plusieurs gardes municipaux furent massacrés. Pour sa défense, Hassenfratz affirma qu’on le poursuivait parce qu’il était fils de révolutionnaire, et que c’est contre les chouans qu’il avait pris les armes, le 5 juin. Cette haine des chouans semblait, aux dires de ses amis, une véritable obsession. Le 23 juin, le premier conseil de guerre le condamna à mort et à la dégradation de la médaille de juillet pour avoir commandé une bande armée. Sa peine fut commuée une première fois le 10 août 1832 (dix ans de travaux forcés) puis de nouveau le 6 novembre de la même année (dix ans de détention). L’atténuation notable de sa peine fut probablement due en partie à l’intercession d’amis de sa famille. Dans l’ « Album des décorés [et médaillés] de Juillet » Hassenfratz ne figure ni parmi les décorés ni parmi les médaillés.
Incarcéré d’abord à Sainte-Pélagie, il arriva au Mont-Saint-Michel le 7 juin 1833. Au Mont, il se tint soigneusement à l’écart de ses co-détenus. Il confia à l’un de ses amis parisiens le mépris que lui inspiraient Jeanne*, Prospert* et les autres condamnés politiques de juin, à l’exception de Buttoud* (un républicain courbé par l’âge, éternel conspirateur). Il chercha sans succès à mettre en place un atelier franc-maçon dans l’enceinte. Le directeur de l’établissement le présentait comme un original, grand consommateur de truffes et de confitures, réclamant sans répit le droit de prendre des bains de mer pour digérer. Sa conduite courageuse lors de l’incendie du Mont-Saint-Michel, ainsi que ses appuis — il était en relations avec Salvandy — et ses bonnes dispositions à l’égard des autorités pénitentiaires lui valurent d’être compris dans la grâce du 27 décembre 1834, et de bénéficier d’une libération anticipée le 2 janvier 1835. Après 1840, il gagna sa vie comme technicien dans des entreprises de travaux publics.
Après la révolution de février 1848, il fut le vice-président du comité d’enquête de la commission des récompenses nationales. En tant que détenu politique lors du régime déchu, il demandait la place d’inspecteur général des cimetières de Paris. La commission des récompenses nationales, présidée par Guinard, soutint sa demande au ministère de l’intérieur. Marié et père d’un enfant, il habitait alors quai de la Mégisserie.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article32351, notice HASSENFRATZ Henry, Pierre par Notice revue et complétée par Thomas Bouchet, version mise en ligne le 20 février 2009, dernière modification le 10 juillet 2022.

Par Notice revue et complétée par Thomas Bouchet

SOURCES : Arch. Nat., BB 18/1330, CC/597. — Arch. PPo., A a/366 et A a/422. — Arch. Min. Guerre, justice militaire, juin 1832 (non classé. — Moniteur Universel, 25 juin 1832. — J.-C. Vimont, La prison politique en France, genèse d’un mode d’incarcération spécifique, XVIIIe-XXe siècles, Paris, Anthropos, 1993, 504 p.

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