JOURNET Jean [fouriériste]

Par notice complétée par Gauthier Langlois

Né le 23 juin 1799 à Carcassonne (Aude), mort le 22 octobre 1861 à Toulouse (Haute-Garonne) ; propagandiste fouriériste.

Jean Journet - Cri de délivrance - souscription - 1846 (8p).
bibliothèque de Bordeaux/Mériadeck/Patrimoine : Côte D 61312
Cliché de Françoise-Jane Bonnet.

Étudiant en médecine et en pharmacie à Paris en 1819, Jean Journet adhéra à la Charbonnerie (1821), et passa en Espagne pour aider les libéraux de Riego contre leurs adversaires absolutistes. En 1823, il fit le coup de feu, comme Armand Carrel, aux côtés des Espagnols contre le corps expéditionnaire français du duc d’Angoulême.

Prisonnier, il fut détenu préventivement à Perpignan durant dix-huit mois et alléguant son pacifisme, finalement acquitté.

Il s’établit alors en 1824 comme pharmacien à Limoux (Aude) puis il fonda avec ses frères, républicains comme lui, une société destinée à l’exploitation d’un moulin de papier. Il fut très sensible au passage des apôtres saint-simoniens en 1833, puis il lut les œuvres de Fourier. Ce fut une révélation pour lui. Il gagna Paris , rencontra les disciples après la mort du maître, et après une expérience phalanstérienne au château de Madron à Montastruc (Haute-Garonne), entreprit avec fougue une propagande à caractère personnel, se brouillant très vite avec le rationaliste Victor Considerant. On le nommait familièrement l’Apôtre, en le jugeant trop exalté.

Hors de l’école, il fit imprimer à compte d’auteur des livres et des brochures, entre 1840 et 1861, jusqu’à sa mort. Empreints de mysticisme, comme on pourra en juger d’après les titres, ces écrits déchaînèrent l’hilarité et allèrent à l’encontre de l’effort de Considerant pour rationaliser la doctrine, pour la purger de ses « extravagances ».

Il se rendit en Belgique et plus précisément à Molenbeek-Saint-Jean, en 1844. (Louis Bertrand, Histoire de la Démocratie et du Socialisme en Belgique depuis 1830, (1er Tome), édité par Dechenne et Cie à Bruxelles, rue du Persil, 20 et Edouard Cornély et Cie, Paris, rue de Vaugirard, 101 – en 1906).

Faute de vente en librairie, Journet se fit vendeur de ses œuvres dans les rues, voire distributeur de la bonne parole gratuitement. Il mendiait son pain, prenait l’apparence hirsute d’un prêcheur illuminé. Arrêté place de l’Opéra en 1841, il fut interné à Bicêtre, et le fut à d’autres reprises, notamment en 1849.

Il n’était assurément pas fou, et des amis le tirèrent de l’asile, où les méthodes de la psychiatrie du temps l’auraient rapidement rendu effectivement fou. Il reprit une propagande désintéressée, par des publications, des prédications, ses Chants harmoniens tant en France, par exemple à Lyon où il s’installa en 1847 et se manifesta surtout à la Croix-Rousse comme orateur populaire, qu’à l’étranger, en Suisse, en Belgique, même au Texas en 1854... Il déclamait « l’harmonie nouvelle ».

Incapable d’autre chose que de son apostolat, Journet ne travaillait plus, et le produit de la vente de sa pharmacie de Limoux étant depuis longtemps consommé, ce furent sa femme et ses filles qui le firent vivre de leur travail de fleuristes et payèrent les frais de cet apostolat.

« De taille assez élevée, son physique n’a rien de distingué, mais lorsqu’il tonne contre la civilisation, qu’il invoque Fourier, il est vraiment beau à voir et nous pouvons le comparer aux grands orateurs de la révolution », dit La Tribune lyonnaise de décembre 1847. Voir Derrion Michel Il avait l’apparence hirsute d’un prêcheur illuminé et était surtout considéré comme un excentrique, mais avait de nombreux contacts. Victor Hugo le recevait, Gustave Courbet fit son portrait...

Mais Il sortit de ses dernières « cures » ruiné dans sa santé physique, vieilli, diminué à tous égards, et totalement à la charge de sa famille. Lui qui, à sa manière, avait soutenu l’idée de l’amélioration nécessaire du sort des travailleurs, et développé les plans utopiques d’une parfaite organisation de la production et des circuits de distribution, c’est contre le socialisme qu’il se dressait maintenant, toujours en se réclamant de Fourier, comme les conservateurs séparés de l’école par hostilité à l’égard du fouriérisme démocratique de Considerant.

Retiré à Foix, puis à Toulouse, il publia jusqu’au bout : Le chant du Martyr (1860), les Chants pacifiques (1861).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article32885, notice JOURNET Jean [fouriériste] par notice complétée par Gauthier Langlois, version mise en ligne le 20 février 2009, dernière modification le 9 août 2020.

Par notice complétée par Gauthier Langlois

Jean Journet - Cri de délivrance - souscription - 1846 (8p).
bibliothèque de Bordeaux/Mériadeck/Patrimoine : Côte D 61312
Cliché de Françoise-Jane Bonnet.
L’apôtre Jean Journet. Gravure de Just L’Hernault d’après le portrait de Nadar et le tableau de Courbet, publiée par Charles Yriarte, Les célébrités de la rue, Paris : E. Dentu, 1868.

ŒUVRE : Résurrection sociale universelle. Cris et soupirs, précédés d’un résumé de la théorie de Fourier, Paris, Librairie sociale, 1840-1841, en 5 fascicules in-24. — La bonne nouvelle, ou idée succincte de l’Association, par J. Journet, disciple de Charles Fourier, Paris, Charpentier, janvier 1844, in-16, 70 pp. — Résurrection sociale. Félicité universelle. Marseillaise des travailleurs, Paris, 1844, in-8°, 4 pp. — Jérémie en 1845, par Jean Journet, disciple de Fourier, Paris, Charpentier, 1845, in-16, 144 pages. — Cri d’indignation, Complainte humanitaire, par J. Journet, disciple de Fourier, Paris, Charpentier, septembre 1846, in-8°, 16 pp. — Cri suprême, appel aux honnêtes gens, Paris, Charpentier 1846, in-24, 127 pp. — Résurrection sociale. Félicité universelle. Cri de détresse, Paris, s. d., in-8°, 5 fascicules. — Aux fondateurs de l’Harmonie universelle, le genre humain reconnaissant, Paris, 1850., in-8°, 16 pp. Cette brochure était une brochure de lancement pour une « Association expérimentale. Société de la Fraternité active ». Elle en donnait les statuts et une liste de « souscripteurs », parmi lesquels Pierre Lachambeaudie. — Avorterons-nous encore ? : aux citoyens représentants du peuple, aux membres du gouvernement, aux ministres et aux honnêtes gens de tous les partis, Paris, impr. de Lacour, 1848, 4 p. — Le Socialisme démasqué. Cri de pitié. Les faux prophètes, Paris, juin 1850, in-8°, 16 pp. — Poésies de Jean Journet, avec une préface, Genève, impr. de C. L. Sabot, 1853. —L’Ère de la femme, ou le Règne de l’harmonie universelle, Paris, impr. de A. Choisnet, 1857, 8 p. — Documents apostoliques et Prophéties, Paris, in-16, 279 pp. — L’apothéose de l’Empire, ou Le règne de l’harmonie universelle, Foix, Pomiès frères, 1859, 22 p. — Poésies et chants harmoniens, Toulouse, impr. de Lamarque et Rives, 1860...

SOURCES : Arch. Dép. Aude, 2J1364. — J.-L. Puech, Les Fouriéristes dans l’Aude, Carcassonne, s. d. — M. Buffenoir, « Le Fouriérisme à Lyon », dans Revue d’Histoire de Lyon, t. XII, fascicule 6, 1913. — Daniel Fabre, « Jean Journet », Les Audois, Dictionnaire biographique, sous la direction de Rémy Cazals et Daniel Fabre, Carcassonne, 1990. — Jean Sarréma, Notes sur Jean Journet dit l’apôtre Journet, Saint-Raphaël, avant 2008. (Archives de l’ Aude 2J1364). — Note de Jean Boterdael pour la Belgique. — BnF, Notice autorité Jean Journet.

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