LEMONNIER Charles

Par Notice revue et complétée par Ph. Régnier

Né le 29 novembre 1806 à Beauvais (Oise), mort à Paris en décembre 1891. Saint-simonien démocrate. Dirigeant de 1867 à 1891 de la Ligue internationale de la Paix et de la Liberté.

Jeune professeur de philosophie à Sorèze en 1827, il n’avait encore avec le saint-simonisme naissant que des points de contact, mais quitta cet établissement pour ne pas avoir à faire profession de catholicisme. Membre du « degré préparatoire » à dater d’octobre 1830, Charles Lemonnier commença alors, en compagnie d’Édouard. Charton*, à exposer publiquement des convictions qu’il professa jusqu’à la fin de ses jours. Le mois même où il épousait Élisa Grimailh* (août 1831), il prononçait à Toulouse une conférence saint-simonienne sur « l’avenir de la Femme ». Peu après, ayant préféré Prosper Enfantin* à Saint-Amand Bazard*, non sans hésitation, il recevait la direction, avec Ribes*, de l’« Église » de Montpellier. Avec l’aide de Jacques Rességuier*, il prit le contrôle de la France méridionale à l’automne de 1833. Les articles qu’il publiait dans la Revue du Midi vers la même époque montraient à quel point il était pénétré des leçons de Saint-Simon sur la valeur sociale des grands travaux. Projetant de transformer le canal de Riquet en un véritable « canal des Deux-Mers », il voyait « l’armée sainte et joyeuse des travailleurs » annoncer « le règne de Dieu [...] sur la terre ». Tenant compte de tous les facteurs régionaux, du climat et de l’hydrographie en particulier, il flanquait son canal maritime de réservoirs propres à emmagasiner les excès d’eau en saison pluvieuse et à les restituer en saison torride aux cultures. « Je ne finirai point, écrivait-il, sans appeler aussi l’attention des agriculteurs et des propriétaires des deux plaines de Revel et de Carcassonne, si souvent affligés de la sécheresse, sur la richesse immense qu’ajouterait à leurs possessions la formation de plusieurs réservoirs dans la Montagne Noire, dont les eaux, amassées pendant l’hiver, pourraient en été, par des rigoles d’irrigation, porter la fertilité sur l’un et l’autre versant. » Pour autant, Lemonnier, propagandiste toujours actif, ne fit pas partie de la retraite de Ménilmontant.
Charles Lemonnier avait fait ses études de droit entre 1827 et 1831 et il alla vers 1833 s’établir comme avocat à Bordeaux. En 1845, à la demande d’Enfantin, les frères Pereire le choisirent comme directeur du contentieux de la Compagnie du chemin de fer du Nord.
En 1848, Charles Lemonnier fut républicain et prit la parole dans les clubs. Il devint secrétaire du Crédit mobilier, sans doute en 1852. Il ne cessa pas de professer pour le reste de sa vie des opinions démocratiques. Sous le Second Empire, de concert avec Enfantin, il fonda et dirigea la Revue philosophique et religieuse, où écrivirent plusieurs anciens saint-simoniens.
Saint-Simonien fidèle, il édita en 1859, à Bruxelles, les œuvres choisies de Saint-Simon, en trois volumes, qui demeurent indispensables à l’étude des idées propres de Saint-Simon. Dans sa préface, il soulignait que parmi les ouvriers du chantier de la réforme sociale, il ne fallait pas négliger non plus Fourier ni les communistes.
On sait que, sans adhérer au fouriérisme, il avait fait en compagnie de sa femme une étude sérieuse de Charles Fourier*.
Après la mort de sa femme, Charles Lemonnier se consacra à la seconde œuvre de sa vie, l’organisation de la Ligue internationale de la Paix et de la Liberté. Il était présent aux réunions préparatoires chez le juriste Émile Acollas. On retrouve aisément son influence dans les textes fondamentaux de la Ligue où sont invoqués l’abbé de Saint-Pierre, Kant et Saint-Simon, où sont distinguées les guerres justes et les guerres injustes. Le congrès de fondation qui eut lieu à Genève en 1867 lui donna une vice-présidence de la Ligue. Le congrès de Berne (1868), le congrès de Lausanne (1869) puis le congrès extraordinaire de Bâle (24 juillet 1870) confirmèrent son autorité, et il accéda en 1871 à la présidence pour vingt ans. Il écrivait encore dans Les États-Unis d’Europe en 1885.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article33835, notice LEMONNIER Charles par Notice revue et complétée par Ph. Régnier , version mise en ligne le 20 février 2009, dernière modification le 26 juin 2018.

Par Notice revue et complétée par Ph. Régnier

ŒUVRES : Charles Lemonnier a collaboré à de nombreux journaux et revues, comme La France méridionale, Le Phare de la Loire, la Revue religieuse et philosophique, Les États-Unis d’Europe.

SOURCES : Jules-L. Puech, La Tradition socialiste en France et la Société des Nations, Paris, 1921. — J.-L. Puech, Les Saint-Simoniens dans l’Aude, Carcassonne, 1930. — J.-L. Puech, « Charles Lemonnier et notre temps », dans Les États-Unis d’Europe, octobre 1930. — L. de Montluc, « La Vie de Charles Lemonnier », dans Les États-Unis d’Europe, livraisons de juillet 1924, octobre 1924 et janvier 1925. — J.-L. Puech, Communication à la Société des Sciences, Arts et Belles-Lettres du Tarn, janvier 1956.

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