Né le 21 avril 1805 à Paris, mort le 9 mars 1872 à Paris ; homme de lettres et socialiste.
Auguste Luchet était petit-fils d’un tapissier et fils unique de Joseph Luchet, employé de l’administration des Domaines de l’État, et d’Élisabeth Renée Musnier. Ses parents quittèrent Paris pour Dieppe (Seine-Inférieure) peu après sa naissance. Il fit ses études dans cette ville et commença à y travailler dans des maisons de commerce. Sa famille revint à Paris et il continua de travailler dans le commerce. C’est alors qu’il devint carbonaro, puis s’affilia à la franc-maçonnerie. Il commença aussi des études médicales, suivit l’enseignement de Broussais, mais se lança peu après dans la littérature.
Le 21 octobre 1830, il épousa Félicie-Marie-Jalade Lafont. Il était alors rédacteur au journal Le Temps. Il faisait aussi partie de l’artillerie de la garde nationale licenciée en décembre 1830.
À la suite de ce licenciement, en butte aux tracasseries policières, il partit pour Saint-Étienne (Loire) où il rédigea un journal d’opposition. De retour à Paris, il reçut en 1831, de la Société « Aide-toi le ciel t’aidera » et des chefs du mouvement révolutionnaire européen, la mission de provoquer la réunion de la Belgique à la France. Cette mission échoua et faillit lui coûter la vie.
II se fit alors romancier et auteur dramatique, publia en 1832 Henri le Prétendant, entreprise dont l’arrière-plan gagnerait à être connu, fit jouer en 1835 Ango, pièce émaillée d’allusions au procès des accusés d’Avril. En 1838 il publia Frère et Sœur où il demandait que les enfants soient élevés en commun par l’État. Dans le Nom de famille, paru en 1842, il attaquait non seulement la famille, la royauté et la religion, mais bien d’autres institutions encore.
Par arrêt de la cour d’assises de la Seine du 10 mars 1842, l’ouvrage dut être supprimé et l’auteur fut condamné à deux ans de prison et 1 000 F d’amende. Il se réfugia à Jersey où il écrivit Souvenirs de Fontainebleau (1842), suite de nouvelles où figurent des insurgés de 1830, et Souvenirs de Jersey.
Il rentra en France après la prescription de sa peine, en 1847. Il résida, rue Saint-Merry, à Fontainebleau.
Lorsqu’éclata la révolution de 1848, il était rédacteur à La Réforme. Dès le 27 février, il était nommé commissaire du Gouvernement pour la Conservation du domaine de Fontainebleau. En fait, ses fonctions étaient mal définies et son rôle consista surtout à maintenir l’ordre à Fontainebleau et à y faire accepter la révolution. Il présida de nombreuses cérémonies, s’occupa des affaires administratives de l’arrondissement et prit part aux séances du Club Démocratique.
Il s’intéressa au sort des carriers de la forêt de Fontainebleau qu’il aurait voulu libérer des marchands de pavés et des actionnaires, en les groupant en association. Il encouragea l’organisation d’ateliers nationaux aux frais de la ville.
Le 14 avril, il était délégué par la ville de Fontainebleau pour assister à la fête patriotique de Paris. Les 23 et 24 avril 1848, il échoua aux élections à l’Assemblée nationale, car malgré une profession de foi simplement républicaine, une campagne calomnieuse avait été faite contre lui (il était dit communiste, amoral, antisocial, etc.). Il n’arriva en Seine-et-Marne qu’au quatorzième rang avec 10 102 voix.
Le 20 mai, il fut nommé administrateur du Palais et, ses fonctions indéterminées et provisoires cessant, ses ennemis ne désarmèrent pas pour cela. Le 8 août, ils obtinrent sa radiation de la liste électorale de Fontainebleau sous prétexte qu’il n’avait pas résidé six mois dans la ville. En fait, il y résidait depuis un an, mais avait négligé de se faire inscrire en temps voulu. Son nom fut rétabli le 9 août, mais les calomnies dont il avait été l’objet l’engagèrent à permuter avec l’administrateur du château de Compiègne, Pécheux d’Herbinville*. Il abandonna ses nouvelles fonctions au début de 1849, revint au roman et mit pour préface aux chansons révolutionnaires de Charles Vincent* sa Lettre sur la Révolution (1849).
On le vit assez souvent à Fontainebleau et dans le département, de 1849 à 1851 : le 1er avril 1849, à Fontainebleau, à la réunion préparatoire au banquet socialiste de Melun du 22 avril ; le 11 mai 1849, à la réunion démocratique de Fontainebleau où il rappela son action en faveur des ouvriers ; le 24 septembre 1849, à Fontenay-Trésigny, avec Gilland*, Scheffer* et Rouiller* ; du 25 au 27, à Chelles ; à Fontainebleau, au dîner socialiste du 1er mars 1850 ; à Melun, en 1850 et 1851, chez Buchly et Léger ; en 1851, dans l’arrondissement de Provins, avant les élections de juillet.
Aux élections de 1849, il n’avait pas figuré sur la liste du Comité central radical, mais obtint cependant 20 818 voix et le neuvième rang.
Il dirigeait Le Républicain de Seine-et-Marne en mai 1850.
Sous l’Empire, il semble avoir abandonné la politique, mais la police le signalait encore dans le département, en juillet 1853, à Nemours, et, le 6 mars 1856, à Bourron, où il se montra en compagnie de socialistes du pays. Il poursuivait sa carrière littéraire et publiait des ouvrages de critique sociale. Comme journaliste, il ne donnait plus que des articles de variétés.
Resté veuf sans enfants, il se remaria le 24 avril 1862 avec Eugénie-Clémence Pilon dont il eut deux enfants : un fils mort jeune et une fille Marie, Augustine, Émilie, Victorine. Resté seul à Paris pendant la guerre de 1870, il en souffrit physiquement et moralement et mourut peu après, le 9 mars 1872.
Une souscription permit de lui élever un monument au Père-Lachaise avec un buste de bronze par Émile Guillain.
SOURCES : Arch. Dép. Seine-et-Marne, Fichier Lecomte et 6 M 155, liasses 1, 2, 3, 4, 5. — Félix Gerbet, « Auguste Luchet (1805-1872) », étude bio-bibliographique dans le journal L’Abeille de Fontainebleau, numéros de janvier à août 1913. — Pierre Miquel, Avec Victor Hugo : du sacre au cabaret 1825-1829, Chatenay-Malabry, Lefort, 1960. — Notes de Pierre Baudrier.