MARCOT Victor, Léonard, dit Thomas

Né le 20 décembre 1817 à Rambervillers (Vosges) où il mourut le 29 mai 1903. Socialiste de tendances communistes.

Marié en 1844, Marcot eut deux filles et deux garçons. Il exerçait la profession de menuisier ébéniste.
Le 5 mars 1848, le Comité provisoire de Rambervillers le proposait comme commissaire de police, et le maire, Mathis, réclama sa nomination définitive, le 6 mai, garantissant son patriotisme et son dévouement à la République. Il fut nommé titulaire par arrêté ministériel du 31 mai.
Ses rapports de police ont ceci de particulier qu’ils expriment nettement ses opinions politiques et sociales, ce qui est rare si l’on en juge par ceux de ses collègues.
C’est ainsi qu’il écrivit le 26 mai : « Aujourd’hui les républicains sont mis à l’index ; ne pouvant plus leur faire un crime comme autrefois d’être ce qu’ils sont, leurs ennemis les font passer pour des communistes et des anarchistes [...] Les mesures que prend le gouvernement vis-à-vis des auteurs de l’affaire du 15 mai font que les réactionnaires lèvent fiévreusement la tête. La République, selon ce que je puis voir, serait encore accueillie par la bourgeoisie et les riches, mais à la condition que le nom de République serait substitué à celui de Royauté, et que là se bornerait (sic) tous les changements. Ce qui fait que le Peuple a peu de confiance dans l’avenir, c’est le maintien dans tous les emplois des hommes qui étaient opposés de tout cœur à la République. »
Après la chute de Mathis, la nouvelle majorité municipale se montra immédiatement hostile à ce commissaire de police républicain. Le conseil, par une délibération du 12 août 1848, se plaignit que « dans les clubs et autres lieux publics l’on ait prêché les doctrines les plus subversives de l’ordre, au vu et su de l’autorité et sans que le sieur Marcot, commissaire de police, ait jamais cherché à empêcher ces manifestations ». Et le rapport poursuivait : « On a tout lieu de croire que les amis politiques du sieur Marcot font partie des sociétés secrètes qui s’organisent. » Enfin le préfet écrivait au ministre, le 2 septembre 1848, que Marcot était zélé et capable, mais non impartial et « loin de posséder les sympathies de la nouvelle administration de cette ville qui vient de s’adresser à moi pour obtenir son changement de résidence ». Marcot ne tarda pas à perdre sa place et redevint menuisier.
En 1850, il fut dénoncé, avec Nicolas Mathis* et Joseph Georgé*, comme ayant colporté et fait signer des pétitions contre la loi électorale. Le juge d’instruction avait décerné contre eux un mandat de comparution, mais le parquet d’Épinal estima que cette intervention était irrégulière et proposa le non-lieu pour Marcot et Georgé, retenant contre Mathis, qui fut acquitté, le délit de publication d’un écrit sans nom d’imprimeur.
Lors du coup d’État, des poursuites furent engagées contre Marcot et contre Mathis. Le 8 janvier 1852, les gendarmes se présentèrent chez Marcot, mais il était parti depuis le 21 décembre. Une information n’en fut pas moins menée contre lui et contre Mathis pour constitution de société secrète, fabrication d’armes de guerre, etc. Les témoignages recueillis donnent une idée de ce qu’était l’action de Marcot parmi les ouvriers de cette petite ville de Rambervillers qui, jusqu’à une époque récente, a été un foyer de traditions révolutionnaires et aussi antireligieuses. Ainsi Joseph Pilot, cordonnier — indicateur aussi, il est vrai — témoignait des propos socialistes tenus par Mathis au casino de la Promenade et ajoutait : « Marcot laissait parler Mathis ; seulement, quand celui-ci parlait trop vite ou qu’il ne s’expliquait pas bien, Marcot le reprenait et lui expliquait comment il fallait dire » (le témoin, nous l’avons dit, était un indicateur, mais on n’a pas à suspecter ici son témoignage). Joseph Georgé, cafetier, déclarait que « Marcot aurait été proposé par Mathieu (d’Épinal) comme chef de ses adhérents et il s’est cru tenu d’agir comme tel. Nous lui avons, ajoute-t-il, battu froid ». Claire Demange, tailleur d’habits, dit que Mathis et Marcot fréquentaient le casino du café Marchal composé, en 1849, exclusivement d’ouvriers. Marcot fut de ceux qui participèrent au banquet offert chez Georgé à Mathieu* « la Jambe de Bois », chef de file des communistes vosgiens. Marcot s’était réfugié à Londres. La malchance l’y poursuivit. Il fut arrêté le 26 février 1853 comme ayant disparu de Londres avec 800 livres sterling appartenant à la maison Monteau & C°, de Paris. Il protesta vivement de son innocence. Il n’avait du reste pas été écroué en vertu d’un mandat judiciaire et les renseignements recueillis sur lui à Londres étaient excellents. Aussi, libéré le 16 mars 1853, prit-il le chemin du retour et revint-il à Rambervillers.
Il conservait ses opinions et, en 1855, figurait encore sur la liste des hommes dangereux avec la mention suivante : « A les idées socialistes depuis fort longtemps [...] Il faisait partie de la réunion qui a eu lieu au café Georgé, le 4 avril 1854. »
En 1858, il « paraît plus calme, mais n’est pas changé et n’a même pas cessé sa propagande socialiste. C’est un homme très dangereux qui en impose aux ouvriers par sa brutalité et leur fait peur. On pourrait l’interner dans un autre département, en tout cas le surveiller de très près ».
Les renseignements manquent sur son attitude ultérieure. On sait seulement qu’en 1882, il recevait 200 F de pension de l’État comme victime du 2 décembre. Il vécut encore une vingtaine d’années.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article34482, notice MARCOT Victor, Léonard, dit Thomas, version mise en ligne le 20 février 2009, dernière modification le 20 février 2009.

SOURCES : État civil de Rambervillers, registre des familles dit de Tarillon. — Arch. Dép. Meurthe-et-Moselle, série U : correspondance du procureur général. — Arch. Dép. Vosges, 8 M 12, 8 M 62, 8 bis M 6, 8 bis M 20, 8 bis M 24, 8 bis M 62, 12 M 12.

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