AVRIAL Augustin, Germain

Par Jean Maitron

Né le 20 novembre 1840 à Revel (Haute-Garonne), mort le 9 décembre 1904 à Fécamp (Seine-Inférieure, Seine-Maritime) ; ouvrier mécanicien ; membre de l’Internationale et de la Commune de Paris.

Avrial vers 1895
Avrial vers 1895

Venu à Paris comme mécanicien vers 1857, Augustin Avrial s’engagea en 1859. Il fut libéré du 54e régiment de ligne en 1865 avec le grade de sergent. Le 20 mai 1866, il se maria avec Louise Talbot, du même âge que lui, dont il aura deux garçons et, en 1867, il revint s’installer à Paris. Selon certains, c’est à cette date qu’il adhéra à l’Internationale. Toutefois, si l’on en croit ses propres déclarations au troisième procès de l’Internationale, c’est en août 1869 qu’il adhéra à cette association, « entre les mains d’Eugène Varlin » (compte rendu du procès, p. 88). Il fut également un des principaux fondateurs de la Chambre syndicale des ouvriers mécaniciens, où il exerça les fonctions de syndic (L’Internationale) et de la Fédération des sociétés ouvrières. Il donnait alors comme adresse : passage Raoul, n° 15.
En 1870, Avrial militait toujours activement en faveur de l’Internationale. Le 18 mars, il assista à la réunion au cours de laquelle s’élabora le projet de statuts de la Fédération parisienne. Avec Camille Langevin et Paul Robin, Avrial représenta à cette réunion le Cercle d’Études sociales, section de l’Internationale dont il faisait partie. Le 18 avril, le projet fut discuté et adopté et Avrial était présent avec Robin à cette réunion que présidait Varlin.
Mais le 30 avril, quelques jours avant le plébiscite, Avrial fut arrêté et inculpé dans le troisième procès de l’Internationale. Le 8 juillet, il fut renvoyé de la prévention d’avoir appartenu à une société secrète, mais convaincu d’avoir, à Paris, fait partie de l’AIT non autorisée, et condamné à deux mois de prison, 25 F d’amende et quatre mois de contrainte par corps s’il y a lieu. Voir Eugène Varlin.
Avrial n’en signa pas moins ce même mois le manifeste contre la guerre adressé aux travailleurs de tous pays. Transféré le 28 août à la maison correctionnelle de Beauvais (Oise), il fut libéré le 5 septembre, après la chute de l’Empire.

Membre de la municipalité du XIe arr., il fut élu commandant du 66e bataillon de la Garde nationale, mais révoqué après la journée populaire du 31 octobre. En novembre 1870, il signa, en tant que membre de la commission du Syndicat des ouvriers mécaniciens, un appel qui affirmait notamment que « l’émancipation économique seule peut fonder la République des États-Unis d’Europe » (avec Haan et neuf autres militants). En février 1871, il était secrétaire de la section des Prolétaires du XIe arrondissement et il joua un rôle actif au Conseil fédéral des sections parisiennes de l’Internationale.

Le 18 mars 1871, il organisa la résistance à Montmartre et, le 26, il fut élu membre de la Commune par le XIe arr., avec 17 944 voix sur 25 183 votants. (JO Commune). Il fit partie de la Commission du Travail et de l’Échange (29 mars), fut élu le 21 avril à la Commission de la Guerre qui remplaça, en principe, le Comité de la Garde nationale et, le 8 mai, fut nommé directeur de l’artillerie. Il participa à la sortie du 3 avril et, selon Lepelletier (op. cit., t. 3, p. 369, n. 1), « se montra brave et plein d’initiative. » Le 10 avril, il remplaçait Gustave Lefrançais à la Commission exécutive élue le 29 mars qui était chargée de faire exécuter les décrets de la Commune et les arrêtés des autres commissions. Avrial vota contre le comité de Salut public et, le 15 mai, signa la déclaration de la minorité : « La Commune de Paris a abdiqué son pouvoir entre les mains d’une dictature à laquelle elle a donné le nom de Salut public. » Voir François Jourde.
Au cours de la Semaine sanglante, Avrial « se distingua à la défense des barricades, notamment au Château d’Eau » (notice contumace, 20 janvier 1879, Arch. Nat.). Toutefois, il réussit à s’échapper et c’est par contumace que le 4e conseil de guerre le condamna à mort, le 8 février 1873.

Avrial arriva à Londres le 11 août 1871 (Arch. PPo., Ba/434, pièce 37), et il fut, ce même mois, un des fondateurs de la Section fédéraliste française de 1871. À la fin septembre, il fut élu secrétaire-correspondant de la section (cf. La Première Internationale, J. Freymond, op. cit., t. II, p. 298).
De 1874 à 1876, Avrial résida en Alsace. Grâce à un riche Alsacien nommé Goetz, il put fonder, avec Camille Langevin, une usine de construction mécanique à Schiltigheim près de Strasbourg (Bas-Rhin). Mais, au début d’avril 1876, il reçut des Prussiens l’ordre de partir, ainsi que Langevin, et Jourde qui était venu travailler avec eux. En mai, le départ eut lieu. Langevin se rendit en Angleterre, Jourde en Belgique. Avrial gagna La Chaux-de-Fonds et fit partie de la section internationale de cette ville. Il alla bientôt à Genève où il demeura jusqu’en 1880. En 1877-1878, il figura avec Élie et Élisée Reclus, Arthur Arnould, Lefrançais et autres, au nombre des collaborateurs de la revue socialiste révolutionnaire Le Travailleur, qui parut à Genève du 20 mai 1877 à avril-mai 1878.

Rentré en France en 1880, Avrial fut nommé, le 1er novembre 1881, contrôleur du matériel des chemins de fer de l’État, à Montluçon, emploi supprimé deux ans plus tard, le 31 août 1883. Avrial s’occupa alors d’inventions et, selon le mot de Chincholle (Les survivants de la Commune) « inventeur par tempérament, il est de ces hommes qui pourraient prendre un brevet par jour. »
En 1890, Avrial, dont les deux fils étaient mariés et pères de famille, habitait avec sa fille adoptive, orpheline qu’il avait élevée et qui était alors âgée de 29 ans et travaillait comme employée de commerce. Il s’occupait de travaux mécaniques et d’études pour le compte de divers constructeurs-mécaniciens. En 1892, il prit un brevet pour une machine à coudre de son invention dite « machine Avrial », et il coopéra à la fondation de la Société française des machines à coudre de Montluçon, qui fit faillite en 1897. Il était également à cette époque l’inventeur d’un motocycle à pétrole pour lequel il fut breveté. Trois ans plus tard, le ministère du Commerce l’envoya en Belgique afin d’y étudier certains procédés mécaniques et, en particulier, l’organisation des filatures. En 1900, il fut chargé par ce même ministère de faire des études sur l’industrie de l’automobile en France.
Après son retour, Avrial continua à militer. Il adhéra d’abord à l’Alliance socialiste républicaine (ASR) au sein de laquelle se rassemblaient des radicaux d’extrême gauche et des socialistes, mais l’Alliance eut une vie éphémère et disparut en 1881. Il adhéra ensuite au Parti ouvrier socialiste révolutionnaire (POSR) créé par Jean Allemane en 1890, après scission avec la Fédération des Travailleurs socialistes de Paul Brousse. Peut-être, entre temps, adhéra-t-il à d’autres formations. Toujours est-il qu’il abandonna finalement le POSR pour se présenter aux élections municipales de 1896, dans le quartier du Gros-Caillou, comme candidat de concentration républicaine, bénéficiant de l’appui des radicaux et opportunistes.
Lorsqu’il mourut à Fécamp en 1904, il était, depuis deux ans, titulaire d’une recette buraliste. Il eut des obsèques civiles, le 13 décembre, et fut incinéré au Père-Lachaise, case 2 050, honoré des discours de Langevin, Jules Martelet et autres Communards de ses amis.
Si Avrial fut jugé sévèrement par Da Costa (La Commune vécue, t. III, p. 46) qui déclara qu’il était « une pauvre âme dans une riche carcasse », s’il fut jugé de même façon par certains rapports de police qui le présentent comme un « esprit exalté, paresseux, débauché » (notice contumace, 20 janvier 1879, Arch. Nat.), il semble plus juste d’admettre avec Lepelletier (Histoire de la Commune de 1871, t. 3, p. 369, n. 1) que Avrial, « bon gros garçon très doux, très rond, à face réjouie et sympathique, pourvu d’une grande force musculaire », ne joua sans doute pas un rôle politique de premier plan à l’Hôtel de Ville, mais que « sous une apparence un peu lourde » il était néanmoins « un esprit avisé » et qu’il « exerça avec compétence et dévouement sa difficile fonction de directeur de l’artillerie. »

L’ancien petit Jardin Bréguet, 31, rue Bréguet (Paris XIe), est devenu en 2021 le Jardin Louise Talbot et Augustin Avrial.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article351, notice AVRIAL Augustin, Germain par Jean Maitron, version mise en ligne le 30 juin 2008, dernière modification le 11 octobre 2022.

Par Jean Maitron

Avrial vers 1895
Avrial vers 1895
Augustin Avrial vers 1889

SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE : Arch. Nat., BB 24/850, n° 7561. — Arch. Min. Guerre, 4e conseil. — Arch. PPo., Ba/434, 441 et 943. — L’Internationale, 31 octobre 1869 - Le Réveil, 12 juillet et 7 novembre 1870. — Troisième procès de l’AIT à Paris, 1870. — O. Testut, L’Internationale, 7e édition, Paris, Versailles, 1871. — Les Séances officielles de l’Internationale à Paris pendant le Siège et pendant la Commune, 2e édition, Paris, Lachaud. — Procès-Verbaux de la Commune de 1871, Paris, STHVP, 1924, 1945, 2 vol. — JO de la Commune, 31 mars 1871. — Déclaration de la section française fédéraliste de 1871, siégeant à Londres, Londres, Imprimerie internationale, 1871. — Chincholle, Les survivants de la Commune, Paris, L. Boulanger, 1885. — La Petite République, 10 décembre 1904. — G. Da Costa, La Commune vécue, Paris, 1903-1905, 3 vol.- Lepelletier, Histoire de la Commune de 1871, Paris, 1911-1913, 3 vol. — La Première Internationale, sous la dir. de J. Freymond, Genève, 2 vol., 1952, t. II, p. 298. — John Sutton, Augustin Avrial, un communard inventif (1840-1904), Société d’histoire de Revel, Saint-Ferréol, 2015. — Notes de Julien Chuzeville et de Jean-Pierre Ravery. — Jean Paul Calvet, Augustin Avrial, un communard inventif, 1840-1904, Collection Lauragais Patrimoine édité par la Société d’Histoire de Revel Saint-Ferréol, 2015, 260 p.

ICONOGRAPHIE : Bruhat, Dautry, Tersen, La Commune de 1871, Paris, Éditions Sociales, 1960, p. 137.

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