PELLERIN

Peintre-doreur à Mulhouse (Haut-Rhin). L’un des fondateurs en 1848 de la Grande Association des Travailleurs du Haut-Rhin. (Bibl. Mun. de Colmar, A 5409-24). Membre du Comité électoral démocratique de Mulhouse en 1849. Après les événements du 13, du 14 et du 15 juin 1849, il se constitua prisonnier le 26 juillet et fut impliqué dans le procès jugé à Besançon.

D’après l’acte d’accusation, son rôle aurait été considérable.
« À Mulhouse, le mouvement a été plus vif et surtout plus habilement dirigé. Dans la nuit du 13 au 14 juin, on affichait sur les murs des placards contenant le plus pressant appel aux armes. Le matin, des groupes nombreux stationnaient devant la dépêche télégraphique annonçant le rejet des deux propositions de la Montagne, et ils y recevaient les excitations des clubistes. En même temps, trois membres du Comité : Pellerin, Nicot père et le sieur Thurner, se trouvaient ensemble dans le jardin de l’hôtel de Paris, où ils organisaient une réunion populaire pour la journée. De là, ils se rendaient chez Davin, qui se chargea de rédiger une pétition à la Montagne, qu’on devait lire et signer à la réunion populaire. Pour se couvrir d’une apparence de légalité, il fut convenu qu’on demanderait au maire l’autorisation de convoquer le peuple dans une prairie située à quelque distance de la ville et sur les bords de la rivière de la Doller. La demande était faite par des citoyens dévoués à la cause de l’ordre et qu’on avait adroitement mis en avant, en leur faisant accroire qu’il s’agissait de signer une adresse au gouvernement sur la marche des affaires de Rome. Le maire, rassuré par le personnel de la députation, accueillit favorablement sa requête.
« À trois heures du soir, 2 000 ou 3 000 individus étaient rassemblés sur les bords de la Doller ; au milieu de la foule, on remarquait une table et des bancs, où siégeait un petit comité composé de Davin, Pellerin, Nicot père et quelques autres. Davin monta sur la table et prononça un discours [...] Après lui, Pellerin prit la parole pour indiquer à la multitude l’ordre dans lequel elle devait signer la pétition et annoncer que les ouvriers de fabrique retenus le jour dans leurs ateliers étaient convoqués à se rendre le soir dans la cour de l’hôtel du Lion Rouge. Dans la soirée, un nombre considérable d’ouvriers affluait à l’hôtel du Lion Rouge, où les signatures étaient reçues par un comité composé de Pellerin, Thurner, Eberhart et autres. Tous ces faits sont attestés par de nombreux témoins. Ils sont en outre confirmés par les termes de la lettre de Davin à Mossmann, laquelle renferme le passage suivant : « Hier matin, jeudi [...], on s’est donné quelque mal chez nous. On a organisé à la sourdine une manifestation pour l’après-midi. Bien qu’on ne se soit décidé qu’à onze heures et que la réunion fût pour trois heures, bien qu’on n’ait rien affiché, il y a eu à la Doller près de 2 000 hommes. J’ai pris la parole pour leur expliquer le but de la réunion, et j’en ai profité pour leur dire qu’aujourd’hui nous demanderions leur signature, que demain peut-être nous leur demanderions de prendre les armes. » Les pétitions n’ont pas été retrouvées. On évalue le nombre des signataires à 4 500, à Mulhouse seulement.
« On avait monté la tête, il restait à armer les bras. Tout porte à croire que le parti insurrectionnel était pourvu de munitions. Dans les premiers jours de juin, la police avait été avertie qu’il disposait d’une ample provision de cartouches. Malheureusement, les perquisitions faites un peu tardivement n’ont amené qu’un faible résultat. Enfin il est constant que, pendant les mois de mai et de juin, la contrebande de poudre a pris à Mulhouse des proportions énormes.
« Il fallait des armes : à cet égard, dans son entrevue du 14, avec Nicot père et Thurner, l’accusé Pellerin a dévoilé les projets du Comité, qui songeait à se faire délivrer de gré ou à prendre de force les fusils possédés par la municipalité. Une démarche décisive a été tentée dans ce but : le 15, au matin, une députation, composée en grande partie de membres du Comité, se faisait introduire dans le cabinet du maire. Pellerin, qui la dirigeait, porta la parole... ! Le maire, craignant les conséquences d’un refus nettement et promptement articulé, répliqua qu’il allait exposer cette singulière demande au conseil municipal, et ajourna la députation à midi pour lui faire connaître le résultat de la délibération.
« À l’heure dite, le maire lui fit savoir que le conseil avait rejeté la requête, que néanmoins, reconnaissant le droit de tout citoyen à faire partie de la garde nationale, il avait décidé que l’on instruirait tous ceux qui viendraient réclamer des armes, le conseil de recensement devant statuer sur leur admission aux contrôles de la garde nationale...
« Pourtant la députation se retira et s’installa chez l’accusé Danner, où fut constitué un bureau d’engagement. Là on délivrait aux ouvriers des bulletins portant ces mots : engagé volontaire. Munis de ces bulletins, trente-cinq individus se présentèrent à la mairie et réclamèrent des armes. La dernière dépêche télégraphique fut publiée à quatre heures et les demandes d’armes cessèrent aussitôt... »
Pellerin, qui avait agi au nom du Comité électoral démocratique, selon l’accusation, fut condamné par le jury de Besançon. Le 2 février 1858, il tenait dans un café de Mulhouse des propos hostiles au gouvernement de Napoléon III. Le préfet donna l’ordre de dresser procès-verbal contre lui. Voir Bertschly fils*, Blin*, Danner Pierre*, Davin Jean*, Eberhart*, Haeffely*, Meyer Chrétien.*, Mossmann*, Nicot père*, Thurner*. Pour la Grande Association des Travailleurs du Haut-Rhin, voir : Grandjean Constantin*, Gréset*, Grisez*.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article35909, notice PELLERIN, version mise en ligne le 20 février 2009, dernière modification le 20 février 2009.

SOURCE : Arch. Dép. Haut-Rhin, 1 M 42 1/394. — Procès des accusés du Haut-Rhin dans l’affaire du 14 juin 1849. Cour d’assises de Besançon... Réédition publiée par E. Sieffermann, Strasbourg-Colmar, 1889. — Paul Leuilliot, « Le 13 Juin 1849 à Colmar et dans le Haut-Rhin et le procès de Besançon (novembre 1849), d’après le compte rendu des assises du Doubs », dans Annuaire de la Société historique et littéraire de Colmar, 1960, pp. 106-122.

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