Par Notice revue et complétée par Jean Risacher
Né le 1er août 1808 à Nanteuil-le-Hardouin (Oise), mort le 1er mars 1887 à Paris (Xe arr.) ; tailleur à Paris ; militant ouvrier ; membre de sociétés républicaines et sociétés secrètes ; néobabouviste.
Pierre Quignot (écrit Quigniot sur l’acte de naissance) était le fils d’un restaurateur à La Nouvelle France, François Quignot et de Josephine Cjpournand En 1833, ouvrier tailleur à façon, Pierre Quignot demeurait, 21 rue des Fossés-Saint-Germain-l’Auxerrois (IVe arr. ancien, maintenant rue Perrault ou rue de Rivoli, Ier) et était membre de la Société des droits de l’Homme. Il fut arrêté une première fois avec Dequesne* et 45 autres sectionnaires au café des Deux-Portes, boulevard Saint-Denis Ve arr. ancien, actuel X, (voir Joseph Moriencourt*) et écroué à La Force le 27 février 1834 pour complot. Il ne fut libéré que le 13 mai et fit partie dès cette période, avec Dequesne et Piaget* d’une filière de sortie et de reproduction de textes rédigés par des prisonniers de Sainte-Pélagie. On a de sa main, daté du 9 août 1834, un fragment de Questions/Réponses sur le thème « Après le succès de nos armes quelles seront les mesures révolutionnaires à prendre ? », document dont la parenté avec le futur Rapport sur les mesures à prendre et les moyens à employer, pour mettre la France dans une voie révolutionnaire, publié à Londres en 1840 par la Société démocratique française est évidente (voir Camille Berrier-Fontaine*). Il était aussi rédacteur au journal La Tribune, et il était en relation, à ce titre, avec des tailleurs de province. Les tailleurs lyonnais notamment lui écrivirent, le 10 avril 1835, à l’adresse du marchand tailleur Mainguet, pour lui annoncer qu’une collecte financière avait été faite dans les ateliers afin de soutenir le journal de nouveau saisi. Au cours de l’été 1835, parallèlement à Pinson*, Moriencourt et Henri Stévenot* — chacun responsable d’un groupe de républicains partisans de « l’Égalité sociale la plus absolue » et que le substitut qualifia de « Communistes ou radicaux » —, il fit l’objet de poursuites pour association illégale, complot contre la sûreté intérieure de l’État, etc. Demeurant alors 7 rue Saint-Joseph (IIIe arr. ancien, actuel IIe), il fut écroué à La Force le 18 juin et les poursuites tournèrent court faute de preuves positives et Quignot fut libéré le 16 août.
Il appartint à la Société des Familles, sans doute dès sa création, et fut une nouvelle fois poursuivi, parallèlement à l’instruction du procès des poudres autour de Armand Barbès*, Auguste Blanqui*, etc. Écroué à Sainte-Pélagie pour association illicite le 30 juin 1836, il fut libéré suite à un non-lieu le 7 juillet suivant. Participant sans doute avec Martin Bernard* au rassemblement des restes de la Société des Familles et à la constitution de la Société des Saisons, il fut une nouvelle fois arrêté, écroué à Sainte-Pélagie le 7 mai 1837, pour association illicite, condamné à 6 jours de prison le 13 juin 1837, libéré le 19.
En 1839, demeurant 250 rue Saint-Denis (VIe arr. ancien, actuel IIe), ses responsabilités s’accrurent à l’approche de mai et, signataire de l’« Appel aux armes », Quignot fut désigné avec Barbès, Martin Bernard, Georges Meillard* et Louis Nétré* comme l’un des cinq commandants d’une division de l’armée républicaine, sous les ordres de Blanqui. Il fut effectivement très actif au cours des journées des 12 et 13 mai. Arrêté très rapidement, il fut écroué le 17 à La Force, mais l’instruction de la Cour des pairs le concernant dura un certain temps, car il ne comparut pas au procès de la première catégorie avec Barbès et Martin Bernard, mais à celui de la seconde avec Blanqui. Assisté par Me Grévy, il était qualifié d’« anarchiste dangereux ». Contrairement aux autres « commandants », Meillard et Nétré ayant réussi à échapper aux recherches, il n’observa pas la règle du silence qu’avaient respectée Barbès et Martin Bernard lors du premier procès et Blanqui au second. Il semble avoir été très sensible aux manœuvres de la Cour, plus évidentes qu’au premier procès, d’opposer les accusés les uns aux autres en faisant de Blanqui un lâche et en quelque sorte le responsable de l’échec. Il fut condamné le 31 janvier 1840 à quinze ans de détention en forteresse et à la surveillance à vie. Il fut conduit au Mont-Saint-Michel dès le 5 février.
Quignot partagea tous les aspects de la vie carcérale et les révoltes de ses compagnons, réussissant souvent à se réunir ave Barbès et Martin Bernard dont il avait ouvertement pris le parti contre Blanqui. Ayant été exclu des remises de peine en octobre 1844, il fut extrait du Mont pour Doullens le 23 octobre et ne retrouva la liberté qu’en février 1848. On ne connaît pas très bien son rôle pendant cette période, sauf à travers les démêlés de Blanqui au sujet du document Taschereau. À plusieurs reprises, notamment devant le jury d’honneur, il le chargea au maximum. L’évocation par Blanqui d’une éventuelle trahison concernant le tailleur Aron*, qui l’avait accueilli quelque temps durant sa fuite, avait sans doute exacerbe les positions de Pierre Quignot.
Sous le second Empire, il était toujours tailleur à Paris, 9 rue du Marché-Saint-Honoré (IIe arr. ancien, actuel Ier). Il fut arrêté, le 7 juin 1853, dans l’affaire du complot de l’Hippodrome (voir Léon Ribault de Laugardière*). Il passait pour un « anarchiste bien connu ». Il semble s’être définitivement retiré de la scène politique. On ignore son attitude pendant la Commune de Paris.
Martin Bernard, dont il fut l’exécuteur testamentaire resta son ami jusqu’à sa mort et il est enterré au cimetière Montmartre, dans le même tombeau que lui.
Il mourut à son domicile 164 rue du Faubourg Saint-Martin et était veuf de Anne Duvivier.
Par Notice revue et complétée par Jean Risacher
SOURCES : Arch. Nat., CC 728, CC 772 (pièces de 1834 et 1835 jointes au procès de 1839). — Arch. PPo., A a/434. — Arch. Dép. Paris (Seine), registres d’écrou DY/4 20- 4189, DY/4 27-9892, DY/8 9-2754, DY/8 11-4147, DY/4 46-4429. — Cour des pairs de France. Attentat des 12 et 13 mai 1839..., 4 vol., Paris, 1839-1840. — Cour des pairs. Procès politiques, 1830-1835, Inventaire dressé par J. Charon-Bordas, Paris, Archives Nationales, 1983, CC 596 d 1 n° 8. — Cour des pairs. Procès politiques, 1835-1848, Inventaire dressé par J. Charon-Bordas, Paris, Archives Nationales, 1984, CC 725, CC 728 n° 463. — Maurice Dommanget, Un drame politique en 1848, Paris, Les Deux Sirènes, 1948. — Auguste Blanqui, Textes choisis, Paris, 1955. — Claude Latta, Un républicain méconnu, Martin Bernard, 1808-1883, Saint-Étienne, Centre d’Études foréziennes, 1980. — Philippe Matthey, Les Membres des sociétés secrètes républicaines parisiennes sous la monarchie de Juillet, mémoire de maîtrise sous la direction de Philippe Vigier, Paris X, 1986. — Jacques Grandjonc, Communisme/Kommunismus/Communism. Origine et développement international de la terminologie communautaire pré-marxiste des utopistes aux néo-babouvistes, Trier, Karl Marx Haus, 1989, p. 157, 167, 180, 257, 383, 397-400, 499. — Louis-Auguste Blanqui, œuvres I. Des origines à la Révolution de 1848, textes présentés par D. Le Nuz, Nancy, Presses Universitaires, 1993. — Note de Pierre-Jacques Derainne, Jacques Grandjonc et de Alain Eludut. — État civil de Nanteuil-le-Haudouin et de Paris Xe arr.