FABRE Charles, Marius

Par Jacques Girault

Né le 3 octobre 1880 à Pignans (Var), mort le 4 avril 1977 à Aubagne (Bouches-du-Rhône) ; instituteur ; syndicaliste et militant socialiste, communiste puis socialiste SFIO du Var ; conseiller d’arrondissement socialiste puis communiste du 4e canton de Toulon (1919-1922), maire de Mazaugues (Var) de 1935 à 1945.

Fils d’un minotier itinérant, radical socialiste et libre penseur, ami de Clemenceau, Charles Fabre avait une sœur. Il fréquenta les écoles de Pignans, Carnoules, de Bandol et obtint le Brevet élémentaire à l’École Rouvière à Toulon. Après avoir travaillé dans les chemins de fer, ayant accompli son service militaire à Antibes (Alpes-Maritimes), il entra dans l’enseignement en 1903. Il exerça successivement à Pignans, à Gonfaron, à Carnoules. Il constitua dans cette commune une section de la Ligue des droits de l’Homme et anima un groupe de libres penseurs, « la Libre pensée sociale : l’Aurore ». D’esprit libertaire, lecteur des Temps nouveaux, il fut nommé à Taradeau puis à Sanary par la suite. Il y fonda un cercle socialiste « Émile Zola », en fut secrétaire et adhéra à la SFIO en 1910.

Nommé à La Valette en août 1914, Fabre, y resta vingt ans. Membre de l’Amicale, de la section syndicale, il était abonné à L’École émancipée et resta toujours un ami de la revue entretenant des rapports étroits avec les Bouet. Il participa au congrès de la fédération socialiste aux Arcs en décembre 1913, à Carnoules en décembre 1915.

Charles Fabre, à la déclaration de guerre, fut affecté dans les services auxiliaires à Marseille. Il fut réformé à la fin de l’année 1915. Il ne reprit son travail qu’en octobre 1916. Il avait conservé des relations avec les militants de l’École émancipée. Partisan de la Révolution russe, en désaccord avec la paix de Brest-Litovsk, il participait à la vie de l’organisation syndicale des instituteurs et en fut un des responsables de 1919 à 1923. Il était trésorier de la section en février 1919 et fut élu secrétaire de la section du syndicat en juin 1919 après avoir assuré le secrétariat provisoire pendant la guerre.

À la fin de la guerre, les socialistes de La Valette avaient bien évolué. Ils se situaient à la gauche du parti. Fabre, lors du congrès fédéral du 6 avril 1919, critiqua l’attitude des élus pendant la guerre et souhaita « qu’à l’avenir le socialisme adopte des méthodes nouvelles d’action nationale et internationale ». Aussi, le maire Guérin, le secrétaire fédéral Fourment en tinrent compte. Ils demandèrent à Fabre d’être candidat SFIO pour le conseil d’arrondissement. Dans leur esprit, il s’agissait avant tout de conserver la municipalité au Parti. Fabre, seul candidat dans le 4e canton de Toulon, fut élu le 14 décembre 1919 avec 920 voix sur 2 729 inscrits. De son propre aveu, il ne se rendit qu’une fois dans une réunion de cette assemblée.

Ses convictions révolutionnaires avaient été renforcées par son mariage avec une institutrice, petite-fille d’un proscrit de 1851, fille d’un socialiste, à Mazaugues, en septembre 1918. Cette institutrice avait perdu un frère à la guerre. Elle le renforça dans sa haine de la guerre. Ils obtinrent un poste double au Beausset en 1918-1919 puis furent renommés à La Valette.

Cahrles Fabre fut désigné comme membre de la Commission administrative de la fédération SFIO en février 1920 pour la tendance Loriot (adhésion à la IIIe Internationale).

À cette occasion, le sous-préfet portait sur lui une appréciation nuancée : « professe des idées très avancées et déploie une certaine activité. Très correct d’ailleurs et de rapports courtois ».

Dans la préparation du congrès de Tours, avec la majorité de la section de La Valette, Fabre opta pour la motion Cachin*-Frossard*. Convoqué comme tous les instituteurs communistes par l’inspecteur d’Académie, il refusa de renoncer à son appartenance. Lors de l’inauguration du monument aux morts à La Valette en mai 1921, il avait rédigé le discours de Louis Rey* militant révoqué de l’Arsenal et le sous-préfet marqua sa désapprobation en se retirant. Toutefois, libre penseur et militant de la Ligue des Droits de l’Homme, il quitta le Parti communiste au début de 1923 après avoir renoncé à se représenter au conseil d’arrondissement.

Charles Fabre resta indépendant et continua à militer à la Fédération de l’enseignement jusqu’à sa retraite en 1930 pour raison de santé.

Une de ses dernières manifestations fut son intervention lors d’une réunion de fonctionnaires à Toulon, le 29 juillet 1930. Il fit ajouter à l’ordre du jour la solidarité nécessaire avec les collègues syndicalistes touchés par la répression.

Sa femme fut nommée directrice de l’école de Saint-Cyr en 1930. Par estime pour le maire socialiste, il réadhéra à la section de la SFIO.

Sa femme passa à Bandol en 1932. Il fut un des rares de la section de la ville à rester à la SFIO à la fin de 1933 et ne milita presque plus.

Charles Fabre avait conservé des relations avec la commune de son épouse, Mazaugues. Le maire radical-socialiste venait de perdre en 1934 le siège de conseiller d’arrondissement. Ses amis vinrent le convaincre de constituer une liste pour l’élection municipale. Il y regroupa des communistes, des socialistes, des sans partis et le 5 mai 1935, sa liste fut élue. Il obtenait personnellement 68 voix sur 124 inscrits. Il devint maire tout en habitant Bandol jusqu’en 1938. Le Populaire du Var, le 30 novembre 1935, annonçait son adhésion à la SFIO. Délégué au congrès fédéral de la SFIO en mai 1938, il y préconisa notamment le maintien de l’unité du Parti. Il contribua à modifier l’activité municipale de la commune dans un sens plus politique et certaines réalisations lui sont dues (bains, douches, bibliothèque, etc.).

Charles Fabre fit construire une maison à Mazaugues et y habita l’été à partir de 1938. Il resta à son poste de maire pendant la guerre, partageant le travail avec son adjoint. En 1941, il présida la réunion de création de la Légion. Son attitude était alors considérée comme « correcte » par la préfecture. Il multiplia notamment les interventions pour obtenir la libération du centre de séjour surveillé de son beau-frère, le communiste Chambon* qui sortit de Nexon, le 3 mai 1941. Il demeura en place à la Libération. Lors de la désignation du candidat socialiste pour le conseil général, des sections du canton lui demandèrent d’être candidat. Mais, il préféra soutenir le conseiller sortant, Cauvin. Partisan de l’Union locale avec les communistes, en désaccord sur ce point et sur la question de l’épuration avec les socialistes du village en février 1945, il ne se présenta pas en avril 1945 aux élections municipales et quitta Mazaugues.

Charles Fabre se retira alors à Sanary. Il continua à militer à la SFIO. Mais en 1958, il quitta le Parti pour le PSA puis le PSU. En janvier 1963, il écrivait à Maurice Klein pour lui dire son accord avec son appel à l’Union en direction des différents partis de gauche. Pour le futur congrès national, il se déclarait partisan d’une motion de synthèse. Il écrivit en outre à J. Charlot* le 26 février, pour lui dire son accord après le congrès national ; il estimait, comme lui, que les anciens PSA devaient jouer un rôle essentiel dans le PSU. Hostile à la fusion avec les forces socialistes venues du catholicisme, il lui annonçait sa démission du PSU, le 5 mai 1963. Il revint à la FGDS avant la campagne électorale de 1967.

Charles Fabre était avant tout un libre-penseur et un pacifiste.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article3674, notice FABRE Charles, Marius par Jacques Girault, version mise en ligne le 30 juin 2008, dernière modification le 7 octobre 2022.

Par Jacques Girault

SOURCES : Arch. Nat. F7/13165, 13733, 13744. — Arch. Dép. Var, 2 M 5 24.3, 2 M 6.22, 2 M 6.23, 2 M 7.35.4, 4 M 44, 4 M 45, 4 M 59, 4 M 53, 4 M 59.4.1., 18 M 86, 3 Z 2.9, 3 Z 4.4, 3 Z.24.1. — Arch. J. Charlot. (CRHMSS). — Arch. Com. Mazaugues. — M. Klein (CRHMSS). — Presse nationale et locale. — Renseignements fournis par l’intéressé et par J.-M. Guillon.

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