RESSÉGUIER Jacques.

Par Philippe Régnier

Né le 7 mai 1795 à Durfort (près de Sorrèze, Tarn), mort le 28 novembre 1858 dans sa propriété de Gandels, entre Revel et Puylaurens (Tarn) ; avocat ; souvent confondu avec le comte Jules de Rességuier*.

De 1805 à 1814, Jacques Rességuier fit ses études au collège de Sorrèze, puis il étudia le droit à la faculté de Toulouse. Issu d’une famille bourgeoise, Rességuier, avocat au barreau de Castres, était assez fortuné pour vivre de ses revenus en s’occupant principalement de cultiver son esprit au contact des idées nouvelles. Il résidait à Sorrèze pour s’occuper de ses propriétés. Il connut dès ses premiers numéros, en 1825, la revue saint-simonienne Le Producteur, et lors de l’arrêt de cette publication en octobre 1826, il fut le seul lecteur à écrire aux rédacteurs pour déplorer cette interruption et pour leur proposer de correspondre sur les sujets d’économie politique et de philosophie que traitait la revue. Ainsi devait naître une abondante correspondance qui stimula la formation de la doctrine formulée en 1829-1830 par de pertinentes interrogations sur la mutation religieuse du mouvement, sur son esthétique, sur la place de l’Orient dans la théorie du progrès ou encore sur les transformations à prévoir du régime de la propriété.
Le petit groupe d’amis qu’il entretenait de ses idées et auquel il diffusait et commentait les lettres reçues de Prosper Enfantin* et de ses collaborateurs constitua le noyau de l’« Église du Midi » (Émile Barrault*, Gustave de Bouffard*, Pierre Borrel* et Félix Borrel*, Anacharsis Combes* et Louis Combes*, Lades, Encely*, Marquier, Élisa Grimailh* et Charles Lemonnier*). Ainsi se formait peu à peu dans la région un groupe de propagandistes convaincus des idées nouvelles qu’Enfantin visita en septembre 1829 et qu’il décrivait avec enthousiasme dans sa correspondance.
Élevé au « Collège » le 20 février 1830, Rességuier reçut la direction de la propagande saint-simonienne dans le Languedoc. À l’origine de la conversion d’Élisa Grimailh-Lemonnier, entre autres, il tint aussi des réunions publiques à Sorèze, Castelnaudary, Toulouse, etc. Quelque peu refroidi par le schisme de Saint-Amand Bazard* en novembre 1831, il continua néanmoins de propager un saint-simonisme mitigé et tenta de servir de trait d’union entre Enfantin et Bazard, dont il reçut quelques mois plus tard le testament spirituel. À l’occasion des sessions du Congrès méridional de Toulouse, rapporteur de la commission des sciences sociales, il proposa au vote, en 1834, une motion déclarant que « le but principal de l’économie sociale doit être aujourd’hui la recherche des moyens les plus propres à amener sans bouleversement social, la disparition du prolétariat, c’est-à-dire l’amélioration du sort de la classe la plus pauvre, la plus ignorante et la plus nombreuse ». Ce vœu accepté en commission ne fut accepté en assemblée générale qu’après une discussion passionnée et la suppression du mot prolétariat.
Un indice notable de son insertion persistante dans le réseau saint-simonien est son mariage civil, le 24 août 1835, avec Marie-Anne Chevalier*, une sœur de Michel Chevalier*, devenue veuve de Bouffard. Avec Brothier, Rességuier échoua, en 1836, à lancer une revue mensuelle saint-simonienne, Le Congrès. Des difficultés de famille et de santé l’amenèrent à se replier sur la gestion de ses terres et à ne plus suivre que de loin les développements idéologiques et industriels du saint-simonisme. Se tenant toujours au courant de l’activité politique et philosophique, il jugeait avec sérénité les hommes et les événements.
Jacques Rességuier occupe dans le mouvement saint-simonien une place particulière : il n’est ni un visionnaire d’un monde nouveau, ni un apôtre cherchant, même au prix d’excentricités, à attirer l’attention des foules. Il est simplement un homme soucieux d’étudier, pour la mieux comprendre, une société en pleine mutation. Il n’a participé à aucune des grandes réalisations financières ou industrielles des saint-simoniens, mais il n’en a pas moins rempli un rôle de premier plan dans cette « église » saint-simonienne du Midi dont il fut un élément catalyseur.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article36941, notice RESSÉGUIER Jacques. par Philippe Régnier , version mise en ligne le 20 février 2009, dernière modification le 20 février 2009.

Par Philippe Régnier

SOURCES : Bibl. Arsenal, Fonds Enfantin. — H. d’Allemagne, Les Saint-Simoniens, 1827-1837, Paris, 1930. — J.-L. Puech, « Les saint-simoniens dans le Tarn », Revue du Tarn, 3e série, n° I, mars 1956. — Pierre Chabbert, « Un document inédit sur le saint-simonisme dans la région toulousaine, la biographie de Jacques Rességuier par Anacharsis Combes, Actes du XXIe Congrès de la Fédération des sociétés académiques et savantes Languedoc-Pyrénées-Gascogne, Toulouse, 1965. — Pierre Chabbert, « Notes sur quelques saint-simoniens tarnais. À propos du Dictionnaire biographique du Mouvement français », Bulletin de la société des sciences, des arts et des belles-lettres du Tarn, 1969-1970, n° 25-29. — Note de Jean Risacher.

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