SOMMIER Antoine [SOMMIER Marie, Antoine]

Né le 27 juillet 1812 à Cuiseaux (Saône-et-Loire), mort le 24 mai 1866 à Montmorot (Jura) ; démocrate radical de Lons-le-Saunier (Jura) ; Représentant montagnard en 1849.

Sommier était connu dès 1840, par ses articles mordants dans Le Patriote jurassien et son Pamphlet jurassien. Salmigondis, écrit en collaboration avec François Guillermet.

Difforme et bossu, il exerçait un grand ascendant sur les foules. Un adversaire politique écrira de lui en 1849 : « S’il est parvenu à obtenir d’elles une espèce de culte, c’est que, comme elles, il vit plutôt par les sentiments que par les idées, c’est que, comme elles, il a des convictions exaltées et sincères. » (P. Marmorat, Histoire de la Révolution de Février dans le Jura, p. 229.)

Jacobin, Sommier réhabilita, en 1845, dans une Histoire de la Révolution dans le Jura, parue à Paris, les ancêtres de la Montagne et du Comité de Salut public. Il disait par exemple : « La révolution, une fois adoptée en principe, se posait comme la base de toute morale. Ce qui la servait était le bon, le bien, ce qui lui nuisait était le mal, le mauvais ; elle considérait ses adversaires non seulement comme des ennemis, mais aussi comme des coupables » (p. 255). Et encore : « Le gouvernement de la Terreur ne fut autre chose que le gouvernement d’une ville mise en état de siège. »
En un mot, Sommier, qui était sans doute une sorte de Ledru-Rollin de province, avec beaucoup de talent, passait à Lons-le-Saunier pour un Robespierre ou pour un Marat.

Or, il est difficile de dire si ses idées dépassaient de beaucoup la République démocratique formelle, s’il allait vraiment jusqu’à la République démocratique et sociale. Sur la vanité des étiquettes politiques attribuées aux démocrates radicaux par leurs adversaires ou par la police sous la Seconde République, Sommier s’exprimait ainsi, le 7 mai 1848, devant le Comité républicain de Lons : Les royalistes « ne peuvent plus nous injurier en nous appelant républicains, attendu qu’il est bien permis de se dire républicain sous la République. Il fallait donc trouver autre chose pour nous diffamer, pour nous signaler à la haine publique. Voilà ce qu’ils ont trouvé de mieux : Quelques-uns des docteurs de l’ancienne loi avaient vaguement entendu parler de communisme et de communistes ; ils ne savaient guère ce qu’était le socialisme ; mais plus le néologisme était obscur, plus il devait produire d’effet. Communisme fait encore grand bruit. C’est convenu, le titre de républicain n’étant plus un crime, on infligera aux républicains l’épithète de communistes. Ainsi, tous les républicains de la lutte sont transformés en communistes. » (Le Républicain du Jura, n° 24 du 12 mai 1848.) On notera que le communisme est répudié, mais non le socialisme, selon la distinction faite à l’époque, encore qu’aucune adhésion au socialisme ne soit réellement souscrite.

Président du Comité républicain clandestin de Lons-le-Saunier à la veille de la chute de la monarchie de Juillet, Sommier et son Comité se manifestèrent par des affiches, le 27 février, saluant le Gouvernement provisoire, lui promettant l’appui unanime du Peuple et s’écriant : « Le jour de l’affranchissement et de la délivrance est enfin arrivé. »

Ayant décidé de siéger en permanence, le Comité républicain de Lons agit les premiers jours de la révolution comme le nouveau pouvoir dans la cité, mais, dès le 1er mars, il prétendit collaborer avec l’ancienne municipalité, sans tenter d’instaurer, comme à Salins, une « Commune révolutionnaire ». Ce fut l’ancien conseil municipal qui refusa. Alors (2 mars), Antoine Sommier fit sortir de l’Hôtel de Ville, grâce à une manifestation populaire, les conseillers orléanistes. Le 3 mars, le Comité républicain partageait le pouvoir municipal avec un nouveau maire, orléaniste de la veille, mais estimé. Le conseil municipal, convoqué de loin en loin, devenait un organisme négligeable, comparé au Comité républicain siégeant toujours en permanence. Mais dans un manifeste affiché le 4, le Comité républicain dénonçait les manœuvres séditieuses des orléanistes : « Ceux que, pendant dix-sept ans, disait-il, les ennemis du peuple ont accablés des pires calomnies, ceux qu’ils appelaient anarchistes, buveurs de sang, émeutiers, ceux-là n’ont écouté que la voix de la modération et de l’humanité, tandis que leurs ennemis, ces incorrigibles aristocrates, bourgeois, sonnaient dans leurs conciliabules le tocsin de la révolte et de la guerre civile. » L’effet de cette affiche, sans affaiblir le Comité républicain, donna à la nouvelle municipalité modérée, au cri de Vive la République !, l’occasion de rompre avec lui (6 mars). Le commissaire du Gouvernement provisoire, Jules Grévy, dénoua cet imbroglio en nommant l’ami de Sommier, le Dr Loiseau, plus conciliant que Sommier sans doute, maire de la ville (7 mars). Sommier et le Comité républicain rentraient dans les rôles de président de club et de club démocratique de Lons. Toutefois, Sommier était nommé adjoint au maire.

Le 14 mars, assisté de François Guillermet, Antoine Sommier lançait Le Républicain, nouveau titre du Patriote jurassien, d’Athalin Courbet, avec qui ils s’étaient brouillés sous la monarchie de Juillet et avec qui ils venaient de se réconcilier. L’entente ne dura que trois numéros.

À partir du 26 mars, il y eut distinctement Le Patriote jurassien, et Le Républicain du Jura qui se proclamait « organe sévère et inflexible de la démocratie ».

Le Comité républicain de Lons ne prit probablement pas l’allure d’une société populaire. Sommier en était l’orateur le plus habituel et il lui donna plutôt les façons d’un comité électoral radical. Ce qui ne l’empêcha pas d’échouer aux élections à l’Assemblée constituante du 23 avril 1848. Il réclamait entre autres « la communauté de tous les droits et de tous les devoirs », « l’organisation du travail », « le droit d’association », « l’élection comme base de toutes les magistratures », « un système d’éducation nationale gratuite et imposée à tous les citoyens », « la résistance à l’oppression considérée comme un devoir, et l’usurpation de la souveraineté du peuple punie comme un crime capital », « enfin la constitution démocratique et républicaine présentée à l’acceptation du peuple réuni en assemblée primaire. »

Sommier rendit le clergé responsable de son insuccès et de l’insuccès des démocrates les plus radicaux, dans Le Républicain du Jura, tout comme Louis Robert à Dole dans Le Propagateur républicain. Sans approuver la manifestation du 15 mai, il soutint chaleureusement la cause polonaise. « La Pologne râle, entendez-vous, représentants du peuple ? [...] Elle appelle encore à son secours la France républicaine. Lui répondrez-vous que la France est trop loin ? Non, la France est partout. » (Le Républicain du Jura, n° 26 du 17 mai.) Tandis que le maire de Lons, son ami le Dr Loiseau, demandait à tous les citoyens de signer une pétition exigeant l’envoi immédiat d’un ultimatum à Vienne.

Antoine Sommier se plaça aux côtés des insurgés parisiens de Juin, comme Jules Combette à Arbois, comme Louis Robert à Dole. Il démissionna du conseil municipal le 1er juillet, fut réélu le 30, mais ne fut pas renommé adjoint. Bientôt, Le Républicain du Jura, disparut faute de verser un cautionnement, et Sommier collabora pendant un moment à La Démocratie salinoise de Richardet. Le Comité républicain de Lons cessa de se réunir. La carrière politique d’Antoine Sommier n’était cependant pas terminée.

Il fut, en effet, élu le 13 mai 1849, sixième sur sept des représentants du Jura à la Législative, avec 40 113 voix sur 71 295 votants et 90 110 inscrits. Il siégea à la Montagne, vota contre l’expédition de Rome, contre la loi Falloux et contre la loi restrictive du suffrage universel. Protestataire contre le coup d’État du 2 décembre 1851, il fut expulsé et ne rentra dans le Jura qu’après l’amnistie de 1859. Voir Bidat*, Billot*, Constantin F.*, Dalloz C.*, Gresset J.*, Guillermet F.*, Jousserandot L.-E.*, Lautrey L.*, Loiseau Cl.*, Mandrillon*, Outhier J.*, Piard M.-L.*, Dr Poux*, Vaucher*.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article37925, notice SOMMIER Antoine [SOMMIER Marie, Antoine] , version mise en ligne le 20 février 2009, dernière modification le 7 juin 2009.

SOURCES : A. Desaunais, « La Révolution de 1848 dans le département du Jura (24 février-10 décembre 1848) », dans le Volume du Centenaire de la Révolution de 1848 dans le Jura, publié par la Société d’émulation du Jura, Lons-le-Saunier, 1848, pp. 49-359. — E. Préclin, « La Révolution de 1848 en Franche-Comté », Études d’Histoire moderne et contemporaine, t. II, 1948. — Robert, Bourloton et Cougny, Dictionnaire des Parlementaires français.

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