Par notice complétée par Gauthier Langlois
Né le 18 décembre 1820 à Fontenay-le-Comte (Vendée), mort le 29 février 1868 à Londres (Grande-Bretagne), typographe et publiciste à Niort (Deux-Sèvres), franc-maçon, proscrit en 1851, il se réfugia à Jersey puis à Londres.
Son acte de naissance précise qu’il est né de René Tafary, menuisier âgé de 36 ans et de Louis Favreau âgée de 30 ans. Le père, qui a signé l’acte d’une écriture très malhabile, ne devait pas avoir une pratique très courante de l’écriture. Cela n’empêcha pas François Tafery de devenir imprimeur typographe chez son oncle maternel à Niort.
De 1849 à 1851, il collabora à la rédaction du journal socialiste L’œil du Peuple, publié à Niort. Une note de police le concernant et datant de 1852 indiquait : « Célibataire, n’a que son travail ».
Il fut arrêté, le 21 décembre 1851, pour son activité politique suite au coup d’État du 2 décembre. Le 10 février 1852, il fut condamné par la Commission mixte des Deux-Sèvres, à l’expulsion momentanée du territoire, avec les attendus suivants : « Attendu que Tafery, agent actif et intelligent du parti démagogique, l’un des rédacteurs de L’œil du Peuple, a accepté des émeutiers le titre de délégué du peuple ; qu’il a, en cette qualité, pris part à l’invasion de l’Hôtel de Ville, et a encore reparu dans les autres groupes, et pris ainsi une part active à tous les troubles... ».
Il reçut un passeport pour la Belgique, le 19 mars 1852, puis rejoignit Jersey où il arriva le 2 septembre 1852. Le 21 octobre 1853 il participait à l’assemblée générale des proscrits républicains résidant dans l’île, qui déclara le sieur Julien Hubert comme espion et agent provocateur de la police de Napoléon III. Il travailla, avec Claude Victor Vincent, Jégo et Kosiell sous la direction de Charles Ribeyrolles, à la fabrication du journal hebdomadaire L’Homme, d’abord à Jersey puis à Londres. Il fit partie des 36 proscrits qui signèrent, le 17 octobre 1855, la protestation rédigé par Victor Hugo contre l’expulsion de Jersey de Charles Ribeyrolles, du colonel Louis Pianciani et de Philippe Thomas. Avec Claude Victor Vincent, Jégo, Kosiell, le docteur Gornet et Philippe Faure, il défendit l’Imprimerie Universelle. La signature de la protestation lui valu, comme tous les autres, l’expulsion de l’île et c’est à ce moment, le 2 novembre, qu’il quitta Jersey pour rejoindre Londres. Avant son départ il fit ses adieux aux jersiais Philippe et Charles Asplet, deux des principaux soutiens des proscrits dans l’île. Il laissa dans leur album une photo de lui accompagnée de la dédicace suivante : « Aux deux frères Asplet, amitié éternelle. F. Taféry. Proscrit de France par M. Bonaparte, proscrit de Belgique par M. Léopold Ier, proscrit de Jersey par M. Love !... ».
À Londres il fonda une imprimerie, 1 West Place quartier d’Islington. Selon le recensement de 1861 il y résidait avec sa femme Émilie R. âgée de 28 ans, son fils Lux né à Londres et âgé de 3 ans, Laure Michelet 16 ans née à Londres, couturière, Scipion Michelet 13 ans né à Londres, imprimeur. Il y imprima des ouvrages et une revue en français, la France libre et Garibaldi.
Il fut initié à la franc-maçonnerie en 1859 par la loge des proscrits français les « Philadelphes », orient de Londres, rite réformé de Memphis. Il en fut le secrétaire de 1860 à sa mort. Le 15 septembre 1864, soit moins de deux semaines avant la fondation de l’AIT, cette même loge décida de pousser encore plus avant sa politique d’extériorisation en créant un bulletin bimensuel, puis hebdomadaire, La Chaîne d’Union. La devise en était « Science, travail, solidarité », et le but qu’il assignait à la franc-maçonnerie était « de relever partout le prolétariat, de le mettre en pleine possession de lui-même en l’affranchissant de ses deux dernières servitudes : la misère et l’ignorance. » François Tafery fut désigné pour en seconder le directeur-gérant Pierre Simard, en qualité de secrétaire de direction. Il en devint le directeur. En 1868 il résidait 3 Hornsey-row, Upperstreet, dans le quartier d’Islington.
François Tafery mourut à Londres et y fut inhumé, le 2 février 1868, sans avoir revu la France. Son décès fut annoncé ainsi dans Le Figaro et La Gironde : « Monsieur Étienne Arago annonce la mort d’un proscrit de décembre, M. François Tafery, décédé à Londres, où il rédigeait un journal maçonnique, la Chaîne d’union, et il cite un trait digne de toute louange : Pendant le choléra d’il y a quatre ans, un des voisins de Tafery meurt trois jour après avoir perdu sa femme ; il laissait orphelins deux petits enfants. L’exilé les prend chez lui et les adopta devant le magistrat : « Que voulez-vous, disait-il à celui de qui nous tenons le fait, je ne pourrais jamais laisser ces pauvres petits malheureux à l’hôpital ; je les élèverai avec les miens, et, plus tard, comme les miens il travailleront. En attendant, je travaillerai pour eux tous ».
Par notice complétée par Gauthier Langlois
SOURCE : Archives de Vendée, Acte de naissance. — Bnf, Fichier Bossu, Fiche 1, Fiche 2. — Archives départementales des Deux-Sèvres, 4 M 6/17. — Archives de l’Oise, Album Asplet. — Maison de Victor Hugo-Hauteville House à Guernesey, Album Philippe Asplet, folio 14, folio 42. — A la France. L’agent provocateur Hubert, Jersey : imp. universelle, [1853]. — Victor Hugo, Œuvres complètes de Victor Hugo. Actes et paroles. 2 publiées par Paul Meurice, puis par Gustave Simon, 1937-1940, p. 123-125. — Charles Hugo, Les Hommes de l’exil, Paris, A. Lemerre, 1875, p. 242. — Le Figaro, 13 février 1868. — La Gironde, 19 février 1868. — Jean-Claude Farcy, Rosine Fry, « Taffery - François », Poursuivis à la suite du coup d’État de décembre 1851, Centre Georges Chevrier - (Université de Bourgogne/CNRS), [En ligne], mis en ligne le 27 août 2013. — Notes de Michel Cordillot.