FÉRY Gaston, Georges, Eugène

Par Didier Bigorgne

Né le 16 octobre 1913 à Celles-les-Condé (Aisne), mort le 11 octobre 2000 à Charleville-Mézières (Ardennes) ; forgeron aux ateliers SNCF de Mohon (Ardennes) ; résistant FTPF et membre du Front national ; syndicaliste CGTU puis CGT et militant communiste des Ardennes, secrétaire général du 6e secteur Est SNCF en 1949, membre de la commission exécutive (1953-1968) et membre du bureau (1954-1961) de l’UD-CGT des Ardennes ; président général du conseil des prud’hommes de Charleville-Mézières (1971-1979).

Gaston Féry était le fils d’un ouvrier maçon et d’une ménagère. Après l’obtention du certificat d’études primaires en 1926, il découvrit le monde du travail pour exercer le métier de marchéchal-ferrant. Le 1er janiver 1937, il entra à la SNCF comme simple manœuvre à Château-Thierry (Aisne). Il réussit bientôt à l’examen d’essai de forgeron et fut nommé en cette qualité aux ateliers de Mohon (Ardennes) en octobre 1938. C’est pendant ces années que Féry s’engagea dans la vie militante : il adhéra d’abord à la CGTU en 1932, puis au Parti communiste en 1937.

Gaston Féry, qui avait effectué son service militaire en 1934-1935 au 3e régiment du Génie à Arras (Pas-de-Calais), fut mobilisé le 2 octobre 1939. Avec la 53e division d’infanterie, il participa aux opérations de guerre sur la Meuse, sur l’Aisne, et en Champagne. Le 14 juin 1940, il fut fait prisonnier au cours d’une reconnaissance effectuée pour porter secours à un groupe en difficulté. Il fut interné à Meaux (Seine-et-Marne). Mis en congé de captivité au mois d’août 1940, il reprit son activité de cheminot aux ateliers de Mohon, mais il refusa de se soumettre au pointage imposé par l’occupant allemand. Avec les communistes Jules Fuzellier, maire révoqué de Joigny-sur-Meuse, et les frères Jean et Honorat Lelarge, Gaston Féry organisa la résistance FTPF dans la région de Charleville. Il reconstitua clandestinement le syndicat CGT aux ateliers de Mohon en 1942 et s’efforça par tous les moyens à freiner la production. Le 11 novembre 1943, il fut à l’initiative d’un débrayage d’une heure ; en janvier 1944, il fut à la tête d’un sabotage de machines-outils et de matériel roulant. Enfin, il fit partie du Front national : il fut élu président de la section de Villers-Semeuse le 25 février 1945. Après la guerre, Gaston Féry reçut la Croix du Combattant volontaire de la Résistance. Il fut nommé Chevalier de la Légion d’honneur en 1946 pour son attitude pendant l’Occupation ; il fut décoré à Paris par Jules Moch, ministre des Travaux publics.

Le 29 décembre 1947, Gaston Féry, divorcé et père d’une fille, épousa en secondes noces Yvette Dizy, sans profession, à Charleville ; de cette nouvelle union naquirent deux enfants, une fille et un garçon. À cette date, Féry avait repris son activité militante à la CGT. Il se révéla une grande figure du syndicalisme du chemin de fer. À la Libération, il devint délégué du personnel cheminot pour le 6e secteur Est et le demeura jusqu’à sa retraite professionnelle. En octobre 1948, il participa aux grèves qui paralysèrent les centres ferroviaires ardennais de Charleville, Mohon, Lumes et Amagne. Il fit partie des quarante-huit cheminots inculpés d’entrave à la liberté du travail qui comparurent devant le tribunal correctionnel de Charleville le 1er juin 1949. Le jugement rendu le 29 juin condamna vingt-et-un grévistes ; parmi eux, Gaston Féry qui se vit infliger une peine d’amende de deux mille francs avec sursis et dut verser mille francs à la SNCF à titre de dommages et intérêts. La cour d’appel de Nancy, saisie par la direction de la SNCF, confima ce jugement le 17 novembre suivant. Féry remplaça alors Robert Thibout, cheminot révoqué de la SNCF, au poste de secrétaire général du 6e secteur Est. Le 26 novembre 1948, Gaston Féry avait été élu conseiller prud’homal. Il devint président de la section industrie du conseil des prud’hommes de Charleville-Mézières à partir du 10 janvier 1971. Il assuma cette double fonction jusqu’en 1979, date à laquelle il demanda à être libéré de ses responsabilités ; il était alors titulaire du diplôme d’honneur des prud’hommes depuis 1958 et de la médaille d’honneur des prud’hommes depuis 1967. Enfin, il entra à la commission exécutive de l’Union départementale CGT de Ardennes en 1953 et y siégea jusqu’en 1968 ; il fut membre du bureau de 1954 à 1961.

Gaston Féry continua de militer au Parti communiste. Il fut son candidat à plusieurs reprises aux élections municipales. En octobre 1947, il fut battu sur la liste présentée à Charleville qui remporta néanmoins sept sièges. Il ne fut pas plus heureux à Mohon. Il échoua d’abord en 1959, puis en 1965 lors d’un scrutin où il conduisait la liste communiste.

Gaston Féry s’investit dans le domaine associatif. En 1947, il créa une section de l’Association nationale des cheminots anciens combattants (ANCAC) à Mohon et en devint le président. Il fut aussi vice-président de la société de musique « La Prolétarienne » de Mohon.

Gaston Féry partit à la retraite le 1er février 1969 en qualité de maître ouvrier principal avec la médaille d’honneur de la SNCF. Il rejoignit la section de Mohon de la Fédération des cheminots retraités CGT. En décembre 1978, il fut nommé officier de l’Ordre national du Mérite. Quelques années plus tard, il remettait la même décoration à un autre Mohonais, le footballeur Roger Marche, capitaine de l’équipe de France des années cinquante. Enfin, il fut honoré par le CGT, avec son ami communiste et résistant Marcel Hulin, le 13 décembre 1995. Il reçut des mains du secrétaire général Louis Viannet un diplôme de reconnaissance de la CGT lors d’une cérémonie officielle au siège parisien de la confédération, en présence de Georges Séguy, ancien secrétaire général.

Gaston Féry était gravement malade depuis quelque temps quand il mourut. Il fut incinéré au crématorium de Prix-les-Mézières (Ardennes).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article3807, notice FÉRY Gaston, Georges, Eugène par Didier Bigorgne, version mise en ligne le 30 juin 2008, dernière modification le 11 octobre 2022.

Par Didier Bigorgne

SOURCES : Arch. Dép. Ardennes, 1 M 15 ; 3 M 8 et 9. — Arch. du conseil des prud’hommes de Charleville-Mézières. — L’Ardenne syndicale, 1953-1961. — L’Ardennais, 2 juin 1946, 2 et 30 juin 1949. — Renseignements et documents fournis par Yvette Féry, l’épouse de l’intéressé. — État civil de Celles-les-Condé.

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