VILLEGOUREIX François

Né le 22 juin 1813 à Limoges (Haute-Vienne), mort antérieurement à 1882, selon toute vraisemblance. Négociant en porcelaine. Frère de Pierre Villegoureix. Militant démocrate, opposant à l’Empire.

François Villegoureix appartenait à une famille de petits commerçants.
Le 19 août 1832, il avait été écroué à la maison d’arrêt de Limoges, pour cris séditieux, et libéré le soir même sous caution. Les assises de la Haute-Vienne l’acquittèrent le 28 novembre.
Il aurait été, d’après un rapport de police du 14 janvier 1848 rédigé à l’occasion de l’emprisonnement de Étienne Cabet, le correspondant à Limoges de celui-ci. Voir Pierre Langely, Tallerie.
Pourtant, le 2 janvier 1848, François Villegoureix, participant au banquet offert à Pierre Leroux, semble y avoir porté un toast associationniste. Mais peut-être accommodait-il le communisme icarien avec l’associationnisme, comme d’autres l’accommodaient avec le fouriérisme ?
Membre du Comité administratif provisoire organisé à Limoges le 25 février, à la nouvelle de la chute de Louis-Philippe, il adhérait le lendemain à la Société Populaire fondée ce jour-là. En mars, il fit partie de la commission chargée de rechercher les moyens de soulager les industries limougeaudes.
À compter du 1er avril, il parcourut avec Pierre Leroux le département en vue des élections prochaines à la Constituante.
Candidat de la Société Populaire le 23 avril, il échoua. Dès que cet échec, conjugué avec l’échec de Marcellin Dussoubs, apparut probable aux ouvriers de Limoges (26 avril), et tandis que se poursuivaient les longues opérations de dépouillement, une vive émotion naquit, particulièrement chez les « Naveteaux » (habitants du port du Naveix, maniant le lancis pour accrocher les bûches flottées). Les Naveteaux brisèrent les urnes contenant les bulletins de l’armée hostiles aux démocrates et mirent le feu à des paquets de bulletins. François Villegoureix fut de ceux qui s’employèrent à calmer les gardes nationaux bourgeois rassemblés devant l’Hôtel de Ville et qui les amenèrent à décharger leurs fusils en l’air. Il empêcha d’autre part les ouvriers de s’emparer du poste de la garde nationale bourgeoise à l’Hôtel de Ville (27 avril).
Le soir, Jean-Baptiste Chamiot-Avanturier nommait François Villegoureix membre du nouveau Comité administratif provisoire composé d’amis des ouvriers.
Le lendemain, 28 avril, Villegoureix apaisa la foule qui voulait malmener le minotier Lanoaille, accusé d’avoir vendu aux boulangers la farine à un prix excessif, et d’être ainsi à l’origine de la hausse du prix du pain. « Le peuple ne doit pas se faire justice lui-même », dit-il.
Il devint président de la Société Populaire, lors de sa réorganisation.
Le 22 mai, jour de la grande foire de Saint-Loup, un rassemblement considérable de citoyens de la ville et de la campagne s’était formé devant son magasin. Un journaliste de L’Ordre, feuille conservatrice, l’accusa d’avoir fait un cours de communisme. Il s’en défendit, assurant dans le Carillon républicain qu’il n’avait pas prêché le partage des biens, mais l’association. « Interrogé sur ces faits au procès de Poitiers [en avril 1849], il déclara que certaines candidatures avaient été combattues en les taxant de communisme, alors que les candidats ne réclamaient pas le partage des biens, mais l’amélioration du sort de tous par le travail. Nous ne voulons pas prendre les biens de ceux qui en ont, mais faire une situation meilleure à ceux qui en sont dépourvus. » Un avocat déclara avoir voté pour lui, parce qu’il avait déclaré dans un discours n’être pas communiste.
Arrêté le 25 mai pour les événements du 27 avril, François Villegoureix fut de ceux qui comparurent devant les assises de la Vienne en mars-avril 1849. Défendu par Théodore Bac, il fut condamné à deux ans de prison (26 avril). Voir Charles Briquet
Détenu à Belle-Île avec Denis Dussoubs, il fut libéré le 13 juillet 1851. Il ne se trouvait pas à Limoges lors des événements de décembre 1851, « pour des raisons indépendantes de sa volonté », considéra le préfet. Aussi, en mars 1852, la Commission mixte du département de la Haute-Vienne le condamna-t-elle à l’expulsion du territoire. Il reçut un passeport pour l’Angleterre, obtint un sursis de départ et, le 4 juin 1852, l’expulsion fut commuée en internement à Bordeaux. François Villegoureix se trouvait alors à Paris. Un congé accordé après les élections municipales d’août 1852 lui permit de n’arriver à Bordeaux qu’à la fin de novembre 1852. Il fut interné à Saint-André-de-Cubzac (Gironde). Le 12 janvier 1853, Villegoureix obtint remise de l’internement et s’installa à Bordeaux où il ouvrit un magasin de porcelaine. À l’occasion d’un voyage à Limoges, le 14 avril 1856, la police de cette ville constata qu’il fréquentait toujours les socialistes. Le 27 mars 1858, le préfet de la Gironde signalait toutefois qu’il n’y avait plus lieu de le considérer comme dangereux. Il était employé dans une maison de Bordeaux qui faisait le commerce des vins. Il semble s’être fixé définitivement à Bordeaux où, sans doute, il est mort. En 1882, ses enfants reçurent la pension accordée aux victimes du coup d’État ou à leurs ayants droit.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article38790, notice VILLEGOUREIX François, version mise en ligne le 20 février 2009, dernière modification le 2 avril 2022.

SOURCES : Arch. Dép. Haute-Vienne série M, Surveillance des individus, liasse 747. — Victor Chazelas, « Un épisode de la lutte des classes à Limoges », La Révolution de 1848, années 1910 et 1911. — L’Abeille de la Vienne, mars-avril 1849 (compte rendu du procès de Poitiers). — P. Cousteix, « L’opposition ouvrière au Second Empire en Haute-Vienne », Bulletin de la Société archéologique et historique du Limousin, année 1955.
Pierre Caron a publié le rapport de police du 14 janvier 1848, rédigé à propos de l’emprisonnement de Cabet, dans le tome VIII (1906) de la Revue d’Histoire moderne et contemporaine.

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