GUILLOSSOT Alphonse

Par Jean-Yves Guiomar

Né en 1882 ; cheminot ; syndicaliste en 1919-1920 dans les Côtes-du-Nord [Côtes-d’Armor].

Alphonse Guillossot était, en 1919, ouvrier chaudronnier au dépôt de la gare de Saint-Brieuc (Côtes-du-Nord) et secrétaire général du syndicat des cheminots, syndicat qu’il représenta à Laval au congrès de mars de l’Union État. Extrêmement actif, il dut répondre le 26 juin au reproche de trop s’occuper des autres corporations. C’était, disait-il, son devoir, et il le remplissait aux côtés de Chérel avec quelque succès puisqu’ils avaient organisé les métallurgistes (240 syndiqués), les brossiers (400 syndiqués) et les cheminots du réseau départemental (170 syndiqués). En août, il participa à la formation d’une coopérative financée par trois syndicats briochins et fut délégué pour contacter une coopérative de gros à Paris. Déçu cependant par l’attitude générale des travailleurs lors du 1er Mai et de la préparation de la grève de solidarité du 21 juillet, il démissionna avec l’ensemble du bureau, le 16 octobre, prétendant rencontrer trop d’obstructions et dénonçant l’influence de la presse bourgeoise sur le syndicat. À la suite de cette manœuvre classique, il était de nouveau secrétaire général quelques jours plus tard, avec Vallée comme adjoint et en position désormais assez forte pour préparer les batailles de 1920. Ce fut lui qui fit élire Gourio et Vallée comme délégués au congrès fédéral extraordinaire des 3 et 4 février, avec pour mandat précis de tout faire pour qu’une « action générale » soit engagée avant le 10. Le 29 février au soir, intervenant avec Chérel et Vallée au cours d’une réunion, il déclencha la grève, votée à l’unanimité par les deux cents présents, déclarant que le gouvernement n’oserait pas prendre de sanctions et donnant la consigne de ne pas suivre les ordres de mobilisation mais de remettre les formulaires au comité de grève qui les ferait parvenir au ministre des Travaux publics. La grève se poursuivit à Saint-Brieuc toute la journée du 2 mars malgré la consigne fédérale de reprise, le comité de grève, c’est-à-dire le bureau du syndicat, « voulant ainsi, selon la police, donner la mesure de toute sa puissance ». Guillossot contribua très efficacement à maintenir la mobilisation en mars et en avril. Il fut délégué, avec Vallée, au second congrès fédéral de 1920, à Paris, les 23 et 24 avril, où, de sa propre initiative et en contradiction avec le mandat reçu, il joignit la voix dont il disposait à celles qui renversèrent le bureau Bidegaray et élirent Gaston Monmousseau. Préparant le 1er Mai et la bataille qui devait le suivre, il appela en termes violents, lors de la réunion du 26 avril de son syndicat, à la grève générale illimitée et ce fut très certainement de ses efforts d’abord que provint l’ampleur du mouvement de mai à Saint-Brieuc. Classé en tête de la liste de « meneurs » que la préfecture adressa le 7 mai à la compagnie État — on préparait déjà les révocations — Guillossot y était ainsi présenté : « On le trouve dans toutes les réunions publiques qu’il organise et dans lesquelles il prend la parole, s’efforçant de dénigrer les chefs dans l’esprit de ses auditeurs et déniant leur valeur et leur capacité professionnelle [...] Guillossot est un syndicaliste militant qui, dans toutes les réunions, prend systématiquement à partie le patronat et le gouvernement, et prêche le renversement de l’ordre établi... » Le 1er Mai, il était à la tête du cortège ouvrier, lui faisant entonner l’Internationale, et il assista à plusieurs réunions de cheminots. Dès le 2, il partit en automobile pour Brest, où le nombre de grévistes était très faible. Il se rendit, au matin du 3, aux ateliers de la gare mais sans succès car les cadres de la Compagnie, ainsi que la police, avaient été alertés par le commissariat spécial de Saint-Brieuc. Le 4 mai, la préfecture des Côtes-du-Nord envoya à son sujet un télégramme chiffré à celle du Finistère et Guillossot fut arrêté le 6. Quoique gêné par l’urgence des tâches locales, un mouvement de solidarité se développa, surtout à Saint-Brieuc où les grévistes firent à plusieurs reprises le serment de poursuivre l’action jusqu’à ce qu’il soit libéré.

Révoqué après la défaite de mai, Guillossot resta cependant aux côtés du syndicat, siégeant au bureau de plusieurs de ses réunions. Il fut même sollicité, le 27 février 1921, comme président mais refusa et disparut ensuite des organisations ouvrières.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article4715, notice GUILLOSSOT Alphonse par Jean-Yves Guiomar, version mise en ligne le 30 juin 2008, dernière modification le 21 juin 2010.

Par Jean-Yves Guiomar

SOURCES : Arch. Dép. Côtes-du-Nord, série M, réunions syndicales et corporatives ; grèves et conflits du travail. — CGT, Répertoire des organisations adhérentes, 1919.

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