BARBET Raymond, Lucien, Alexandre

Par Jean Maitron, Claude Pennetier

Né le 18 novembre 1902 à Chartres (Eure-et-Loir), mort le 8 mars 1978 à Nanterre (Seine, Hauts-de-Seine) ; ouvrier ajusteur ; militant communiste ; maire de Nanterre (1935-1939, 1945-1973), conseiller général (1937-1940 et 1945-1967), député (1962-1978).

Raymond Barbet naquit à Chartres dans une famille ouvrière. Sa mère faisait des lessives pour des particuliers et son père travaillait comme manœuvre dans le Bâtiment. En avril 1915, les parents et les trois enfants - Raymond étant le plus jeune - vinrent s’installer à Nanterre où le père fut chauffeur de chaudière aux établissements Lorilleux. Mobilisé peu après, il mourut à Verdun en mai 1916. Raymond Barbet fréquenta l’école publique Félix Pyat puis, à l’automne 1915, travailla de nuit sur un tour pour la fabrication d’obus, dans une petite usine de Puteaux. Il s’embaucha ensuite avec sa sœur dans un atelier de fabrication de jeux de dames, à Nanterre. Reconnu pupille de la Nation, Raymond Barbet put entrer comme apprenti ajusteur chez De Dion Bouton où il resta trois ans. Il prit part très jeune à l’agitation ouvrière et fit la grève en mai 1917. Il travailla dans diverses entreprises de l’ouest parisien avant d’entrer, en 1930, aux chemins de fer de l’État à titre d’ouvrier ajusteur. Il adhéra au syndicat CGTU des Métaux en septembre 1923 et au Parti communiste en janvier 1924 (et non en 1922 comme l’affirment par erreur plusieurs articles du Monde et de l’Humanité parus en 1973 et 1978).

Les militants communistes de Nanterre confièrent très vite le secrétariat de la section locale à Raymond Barbet. Après la réorganisation de 1925, il milita dans ses différents lieux de travail. En 1927-1930, il assurait le secrétariat de la cellule Donnet-Zedel du sous-rayon de Nanterre (journal d’usine : Le Vigilant). Sept communistes entrèrent au conseil municipal lors des élections complémentaires du 29 juin 1924, mais Raymond Barbet, n’ayant pas atteint l’âge d’éligibilité, n’avait pu être candidat. Ils perdirent leur siège en mai 1925. Le Parti communiste chargea André Marty et Raymond Barbet de diriger la liste « Bloc ouvrier et paysan » aux élections des 5 et 12 mai 1929. La victoire paraissait possible : au premier tour les listes se réclamant du mouvement ouvrier regroupaient 3 380 voix (moyenne de la liste communiste 2 090 suffrages, socialiste-communiste 340, socialiste SFIO 950) contre 2 861 voix à la liste de Concentration républicaine. Les suffrages socialistes et socialistes-communistes se partagèrent entre les candidats communistes (2 760 voix) et les candidats « républicains » (3 460) qui furent élus.

En 1932, Raymond Barbet devint responsable de la section syndicale unitaire des ateliers de chemin de fer de Paris-Batignolles. Son organisation l’envoya en Roumanie, en 1934, lors du procès des cheminots de Bucarest.

Raymond Barbet prit la tête de la liste communiste au premier tour des élections municipales, le 5 mai 1935. Selon l’Humanité, les communistes recueillirent 2 906 voix de moyenne, les socialistes 1 825 et les candidats « républicains » 3 247. Socialistes et communistes formèrent au second tour une liste antifasciste comprenant douze communistes (Clarin Baixas, Barbet, Pierre Brandy, Ferdinand Chevalier, Jean Giacottino, André Hénault, Isaïe Lanniaux, Robert Mathoux, Georges Musset, Pierre Muzard, Jean-Baptiste Roul, Léon Staincq), sept sympathisants (Paul Chaumont, André Doucet, René Jacky, Maurice Potin, Corentin Ravaud, Just Remund, Pierre Robin) et dix socialistes SFIO (Paul Boucher, Louis Comlar, Clément Conte, Charles François, René Godefroy, Jean Houlard, Marcel Mainguet, David Mendès-France, Pierre Savineau, Paul Welch). Plusieurs conseillers socialistes (Comlar, David Mendès-France, François) rejoignirent rapidement le Parti communiste. La liste antifasciste fut élue le 12 mai, par 4 162 voix contre 3 826 à la municipalité sortante. Barbet accéda à la première magistrature municipale le 19 mai 1935. Il siégea au bureau de la fédération des muniçcipalités communistes.

Le succès électoral donna une impulsion nouvelle au rayon communiste : les effectifs passèrent de 250 cartes en janvier 1936 à 926 en octobre 1936, et 1 450 en octobre 1937 (Ve et VIe conférence régionale Paris-Ouest). Il devint conseiller général de la deuxième circonscription du canton de Puteaux le 28 février 1937 (premier tour), en remplacement de Waldeck Rochet démissionnaire après son élection à la Chambre des députés. Il avait obtenu 4 043 voix sur 8 044 suffrages exprimés (50,2 %) et 10 578 inscrits (38,2 %). Waldeck Rochet avait recueilli en mai 1935, 4 357 voix sur 7 746. Il fit partie de la troisième commission (Assistance aux vieillards et aliénés) et de la septième (Préfecture de police, prison). Il fut suspendu de ses fonctions de maire en octobre 1939 et déchu de son mandat de conseiller général le 21 janvier 1940.

Arrêté le 19 décembre 1939, Raymond Barbet fut envoyé à la Ferme-Saint-Benoît le 12 janvier 1940 puis à Fort-Barrau (Isère) d’où il s’évada le 2 septembre 1940. Revenu à Paris le 18 septembre 1940, il s’occupa de la réorganisation clandestine du Parti communiste en Seine-et-Oise jusqu’en juin 1941. Il créa ensuite des comités populaires de cheminots qui jouèrent un grand rôle dans le freinage des moyens de transport utilisés par les Allemands. « Pour passer le plus inaperçu possible, il laisse pousser une superbe moustache qui effectivement le rend méconnaissable », suivant le témoignage de Robert Hernio. La direction illégale de l’Union des syndicats de la région parisienne le chargea de mettre en place des directions syndicales dans les ateliers et les gares. Il participa à la préparation d’actions de sabotage, fut un des organisateurs des grèves de mai et juillet 1944 et des grèves insurrectionnelles du 10 août 1944.

Raymond Barbet reprit ses fonctions à la mairie de Nanterre le 22 août 1944. Réélu en mai 1945, il garda son écharpe jusqu’en mai 1973, avec une interruption entre le 25 octobre 1948 et le 28 mai 1950 en raison d’une révocation. Conseiller général de 1945 à 1967, il fut vice-président du conseil général de la Seine dans les années soixante. Devenu député communiste de la trente-troisième circonscription de la Seine en 1962, il ne se représenta pas en 1978. Raymond Barbet siégeait à la commission de contrôle politique de son parti en 1945, à la commission de contrôle financier en 1947 ; il était suppléant au Comité central à la même date. Le Parti communiste ayant entrepris, au début des années soixante-dix, une politique de rajeunissement des cadres et des élus, Raymond Barbet transmit la direction de la municipalité de Nanterre à Yves Saudmont en mai 1973. Le conseil municipal le nomma maire honoraire le 3 juin 1973. Il annonça en septembre 1977 qu’il ne briguerait pas un nouveau mandat législatif dans la septième circonscription des Hauts-de-Seine. Marié, père d’une fille, Raymond Barbet mourut dix jours avant les élections du 18 mars 1978. Il était Chevalier de la Légion d’honneur depuis décembre 1945.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article474, notice BARBET Raymond, Lucien, Alexandre par Jean Maitron, Claude Pennetier, version mise en ligne le 30 juin 2008, dernière modification le 5 juillet 2022.

Par Jean Maitron, Claude Pennetier

Raymond Barbet
Raymond Barbet
[Assemblée nationale]

SOURCES : Arch. PPo. 101. — Arch. Dép. Seine, DM3, Versement 10451/76/1. — Arch. Com. Nanterre. — RGASPI, 495 270 2221, dossier presque vide, une page donnant un CV sommaire ; une page d’évaluation sans intérêt, sans date mais après 1935 ; il y a sans doute un autre dossier ailleurs. — Arch. Maitron (tract électoral avec photo, 1946). L’Humanité, 28 avril et 7 mai 1929, 6 et 13 mai 1935, 9 et 13 mars 1978. — Le Monde, 17 mai 1973, 17 septembre 1977 et 10 mars 1978. — Comités fédéraux du PCF. — Ve et VIe conférence régionale communiste Paris Ouest, 1936-1937. — B. Lafon et P. Zarka, Recherches sur l’implantation du Parti communiste français à Nanterre, Mémoire de Maîtrise, Paris I, 1971, 2 vol., 161 p. (interview de Raymond Barbet, 20 juillet 1971, p. 133-138). — Édouard Combes, Le Conseil municipal : nos édiles (1935-1941), Paris, (1938), p. 955-956. — Stéphane Courtois, Le PCF dans la guerre. De Gaulle, la Résistance, Staline..., Paris, Ramsay, 1980, annexe 18. — Claude Pennetier, Élus et militants à l’époque du Front populaire, Société d’histoire de Nanterre, Nanterre, 1996. — Robert Hernio, Avant que les cloches sonnent..., Fédération CGT des cheminots, 2000, p. 79 et 247.

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