HEINIMANN Auguste, Léon

Par Pierre Lévêque, Jean Belin

Né le 6 novembre 1886 à Dijon (Côte-d’Or), mort le 21 juin 1949 à Dijon ; cheminot employé au PLM ; syndicaliste CGTU, dirigeant de l’UD de Côte-d’Or et de la Bourse du travail de Dijon ; militant communiste ; conseiller municipal de Dijon ; libre penseur ; résistant, interné ; coopérateur.

Fils de Jacques Heinimann, peintre en bâtiment, et de Catherine Augustine Petitjean, Auguste Heinimann, était poseur auxiliaire à la Compagnie du PLM avant son incorporation d’octobre 1907 à septembre 1909. Il appartint au Parti socialiste SFIO avant 1914. Mobilisé d’août 1914 à mars 1919, il prit une part active au mouvement syndical chez les cheminots, et en particulier aux grèves de 1919 et de 1920 au cours desquelles il seconda Lucien Midol. Secrétaire général du syndicat unitaire des cheminots de Dijon à partir de 1922, il fut délégué du personnel auprès de la direction du PLM. Il appartint également à l’ARAC dès sa fondation à Dijon en 1919.

Lors de la scission de la SFIO au XVIIIe congrès de Tours qui se tint en décembre 1920, Auguste Heinimann suivit la majorité qui fonda la SFIC. Il était membre du bureau et de la commission de défense communiste mise en place en novembre 1922, qui était chargée de reconstituer la fédération communiste affaiblie après l’exclusion d’Henri Barabant, d’Arthur Vacher et le départ de quelques autres militants qui revinrent à la SFIO. En réaction aux attaques qui visèrent le jeune PC, il écrit dans Le Rappel communiste de novembre 1922 : « Si quelques-uns espèrent tuer le communisme en Côte-d’Or, ils en seront pour leur frais et pour leur honte. Malgré tout, le Parti communiste vivra et continuera sa mission libératrice ». En 1923, il préconisait dans la même publication du 6 janvier la création d’une « ferme communiste » modèle en Côte-d’Or.

En 1924, il était secrétaire du syndicat unitaire des cheminots de Dijon ; l’année suivante, son mandat lui fut renouvelé ; il était alors assisté de Firmin Roy, secrétaire adjoint, Georges Filiatre, trésorier, et Étienne Dureuil, trésorier adjoint. En 1926, Auguste Heinimann et Étienne Dureuil furent maintenus dans leurs fonctions, Léon Filiatre remplaça Georges Filiatre et Virgile Girard, Firmin Roy. Auguste Heinimann fut, en outre, délégué à Dijon de la commission de propagande de l’Union des syndicats PLM, 3e secteur. Il fut également l’organisateur du comité de gare de Dijon dont les délégués pour Dijon-Ville et Dijon Porte-Neuve étaient Jules Carpentier et Émile Guinot, Georges Filiatre étant le délégué pour la gare de triage de Perrigny-lès-Dijon. Le syndicat qui menait sous l’impulsion de Lucien Champenois une propagande active par voie d’affiches, tracts et papillons comptait vers 1925-1926 environ 800 adhérents.

Auguste Heinimann était également engagé dans les activités interprofessionnelles et fut un des principaux dirigeants de la 22e Union régionale CGTU qui avait son siège à la Bourse du travail de Dijon, aux côtés de son futur gendre Adrien Langumier, secrétaire général de l’Union, et de Jean Bouscand.
Auguste Heinimann représenta le parti à différentes reprises dans les affrontements électoraux : élections législatives à Dijon de mai 1924 où il conduisit la liste du Bloc ouvrier et paysan (BOP) (il obtint 3 672 suffrages dont 1 135 à Dijon), 1928, 1932, 1936 ; élections cantonales à Dijon-Sud en 1931 et à Dijon-Nord en 1935. Lors des élections municipales de 1935, il arriva en tête de tous les candidats communistes avec 912 voix sur 26 679 inscrits et 17926 votants.

Candidat de la CGTU au Conseil supérieur du PLM en 1934 (Dijon), Auguste Heinimann fut délégué des cheminots de Dijon au congrès national CGTU en 1931 et 1935, aux congrès nationaux CGT en 1936 et 1938. Il était secrétaire de l’Union des cheminots CGT du Sud-Est en 1938-1939.

Il était membre du conseil d’administration de l’Imprimerie coopérative ouvrière (ICO) en 1938.

Il fut exclu de la commission administrative de l’UD-CGT de Côte-d’Or par la majorité de la tendance confédérée avec quatre autres militants de la tendance unitaire, pour la plupart communistes le 29 septembre 1939. Ces derniers furent mis en demeure de désavouer le Pacte germano-Soviétique sous peine d’exclusion. Ils refusèrent et il s’ensuivit un pugilat. Le préfet fit occuper la Bourse du travail par les gendarmes (voir Gabriel Lejard). Son syndicat fut dissous et les biens saisis par le préfet. Après la dissolution du Parti communiste, Auguste Heinimann fut l’objet d’une surveillance spéciale de la police. Sur ordre du préfet de Côte-d’Or, le commissaire de police perquisitionna son domicile au 21 rue de Larrey à Dijon et le siège du syndicat des cheminots le 29 septembre 1939 afin de rechercher des documents et tracts du Parti communiste.

Il participa au bureau clandestin qui s’était constitué afin d’assurer des liaisons avec les membres du PC pour assurer le tirage et la distribution du matériel. Il fut parmi les principaux militants qui reconstituèrent le parti en Côte-d’Or. Il participa à la Résistance en zone sud. Arrêté par la police de Vichy, il fut interné au camp de Nexon en Haute-Vienne, créé en 1940 par l’État français, et la SNCF le révoqua. À la Libération du camp en juin 1944, il revint très affaibli à Dijon et apprit à ce moment là que son fils Roger (voir Roger Heinimann) était déporté à Buchenwald et sans nouvelles de lui.

Il participa au Comité départemental de Libération (CDL) présidé par le socialiste Claude Guyot et fut élu membre du comité fédéral du PCF de la 1e conférence en juin 1945 à la 5e conférence en février 1949. Il reprit sa place à la commission administrative de l’Union départementale CGT après la Libération et devint président du conseil d’administration de la Bourse du travail en 1946 succédant à Louis Uffler. Il fut réélu à la CA de l’UD au 27e congrès en janvier 1946. Marcel Petit et ses camarades de la tendance confédérée qui détenaient la direction de l’UD avant la guerre furent battus par les unitaires lors des votes au congrès. Gabriel Lejard, élu secrétaire général, qui avait besoin de s’appuyer sur des militants solides et expérimentés pour contrer les attaques des membres du groupe des amis de Force ouvrière, fit appel à Auguste Heinimann. Au congrès suivant de l’UD en avril 1947, il rentra au secrétariat avec notamment la responsabilité de trésorier général. Il fut un des principaux orateurs d’un meeting qui se tint à la salle des États de Bourgogne à Dijon le 16 janvier 1945 en présence d’Ambroise Croizat. Ce dernier intervint sur le thème « du rôle des travailleurs et l’effort de guerre, le rôle de tous les patriotes sur le Front du travail ». La question du ravitaillement était une des principales préoccupations des salariés et du combat que devait mener les dirigeants de l’UD après la guerre. Ils constituèrent des comités de surveillance des prix, contrôlant les bouchers et les commerçants. Avec l’aide de militants de grosses entreprises, Heinimann participa aux côtés de membres du bureau de l’UD à des réquisitions illégales chez des éleveurs de l’Auxois qui se livraient au marché noir.

Auguste Heinimann fut élu avec cinq autres militants communistes, conseiller municipal de Dijon en octobre 1947. Il fut une des personnalités les plus marquantes et des plus engagées du mouvement ouvrier de Côte-d’Or au cours de la première moitié du XXe siècle. Lors de ses obsèques, une foule défila devant la chapelle ardente installée à la Bourse du travail. Le chanoine Kir, député-maire de Dijon, Pierre Meunier, député de la Côte-d’Or et secrétaire général de Jean Moulin au Conseil National de la Résistance, des dirigeants de la CGT et du PCF, prirent la parole pour lui rendre un dernier hommage. Un cortège de plusieurs milliers de dijonnais se forma ensuite derrière le corbillard pour parcourir les rues de la ville de Dijon.

Auguste Heinimann s’était marié le 11 août 1906 à Dijon avec Céline Collin avec laquelle il eut deux enfants, Pauline Lucienne, militante de la Jeunesse communiste qui épousa [Adrien Langumierè>50058] et Roger qui mourut en déportation. Il était domicilié à Dijon lors de son décès. Il repose au cimetière de Chenôve (Côte-d’Or). Une salle de la Bourse du travail de Dijon porte son nom.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article4844, notice HEINIMANN Auguste, Léon par Pierre Lévêque, Jean Belin, version mise en ligne le 19 avril 2021, dernière modification le 19 avril 2021.

Par Pierre Lévêque, Jean Belin

SOURCES : Arch. Nat., F7/12981, Dijon, 15 avril 1925 et F7/13672 Dijon, 27 juin 1925, 16 avril 1926 et 13686, Dijon, 16 et 20 septembre 1924, 13 octobre 1925. Arch. Dép. Côte-d’Or, 5 M 7741, rapport de police de janvier 1925. — RGASPI, Moscou, 495 270 4962 : autobiographie d’Adrien Langumier, 1932. — Le Rappel socialiste. — Le Rappel communiste, 1922-1923. — Le Travailleur de Bourgogne, 17 octobre 1931. — L’Avenir de la Côte-d’Or. — S. Courtois, thèse, op. cit., annexe n° 18. — Résistance en Côte-d’Or, Gilles Hennequin, tome 1, édition de 1987. — Les communistes dans la Résistance en Côte-d’Or, édition de 1996. — Arch. Dép. de Côte-d’Or, état civil, fiche de recrutement militaire, recensement de la population. — Arch. IHS CGT Côte-d’Or, fonds de l’UD et du syndicat des cheminots. — La Bourse du travail de Dijon et le syndicalisme CGT en construction de 1890 à 1930, Jean Belin, édition de 2016. — AD 21, fiches des militants communistes particulièrement suivis par la police française, côte 40M309. — Comités fédéraux du PCF Côte-d’Or. — Arch. Municipales de Dijon, sous-série 7F.

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