FORASTER Albert

Par André Balent

Avocat avant 1939 ; employé de l’OFPRA à Paris ; militant de la fédération catalane du PSOE en exil ; résistant (MUR) des Pyrénées-Orientales.

Albert Foraster, réfugié en France après la Guerre civile, en 1939, résidait à Perpignan (Pyrénées-Orientales). Avant la Retirada, il militait au PSOE, parti dont la fédération catalane s’était fondue en juillet 1936, dans le PSUC, section catalane de l’Internationale communiste, ne laissant ainsi plus aucun espace politique, en Catalogne, à un parti de sensibilité sociale-démocrate. Mais en 1939, une petite fédération catalane du PSOE existait à nouveau.

Réfugié politique à Perpignan, Albert Foraster fut un membre du conseil d’administration perpignanais du Casal de Catalunya, organisation culturelle qui regroupait les exilés sud catalans de la ville.

Albert Foraster fut un très proche collaborateur de Camille Fourquet, chef départemental des MUR. Lorsque ce dernier dut quitter le département pour se réfugier d’abord en Aveyron puis dans l’Aude, Albert Foraster et un autre militant du PSOE réfugié, le Madrilène Carlos Roncero, furent ses actifs agents de liaison qui lui permirent de maintenir les liens avec les dirigeants des MUR demeurés dans les Pyrénées-Orientales, Pierre Gineste en premier lieu. Le rôle d’Albert Foraster fut alors décisif. Il faisait déjà la navette entre Perpignan et Limoux (Aude) où Camille Fourquet fut un moment caché au printemps 1944. Il continua à assurer cette tâche décisive lorsque, le 24 juillet, Camille Fourquet, fut caché par Joseph Calvet à Saint-Paul-de-Fenouillet (Pyrénées-Orientales), d’où il dirigea les opérations de mise en place du Comité départemental de Libération (CDL) et de préparation des opérations de la libération du département. Son rôle dans les opérations qui conduisirent à la Libération de Perpignan fut des plus importants, dans l’entourage immédiat de Camille Fourquet et du CDL. Le 16 août 1944, trois jours avant la Libération de Perpignan, Albert Foraster prévint Camille Fourquet que le major Parthey, commandant allemand de la place de Perpignan, était désireux d’entrer en contact avec lui. Le choix d’Albert Foraster et de Carlos Roncero en faveur d’une action au sein des MUR s’explique par leur volonté de demeurer à l’écart de l’UNE (Unión nacional española) impulsée et animée par le PCE et soutenue par le PSUC.

Après la Libération, Albert Foraster demeura un proche de Camille Fourquet, président du CDL. Son activité auprès des résistants les plus en vue inquiéta les autorités espagnoles. Le gouverneur civil de la province de Gérone, dans un rapport au ministre de Gobernación (Intérieur) à Madrid (31 août 1944), sur la Libération à Perpignan, signalait avec inquiétude la présence d’Albert Foraster, un « Rouge » espagnol, à la préfecture du département et son rôle dans les incidents survenus au consulat espagnol de la ville le 27 août. En effet, Albert Foraster utilisa les bureaux du CDL, à la préfecture afin d’organiser à Perpignan la Junta española de Libéración (JEL), rassemblement antifranquiste rival de l’Unión nacional española (UNE) placée sous le contrôle du PCE. Mis au courant par les communistes, Camille Fourquet n’apprécia guère la liberté qu’avait prise son collaborateur en utilisant à des fins partisanes « étrangères » des locaux officiels français. Il mit un terme à cet usage mais conserva malgré tout son amitié à Albert Foraster dont il avait apprécié les remarquables qualités pendant la clandestinité. Par la suite, Albert Foraster, présida le « Comité Roussillon – Languedoc » de la JEL dont le siège fut installé au palais consulaire (Chambre de commerce et d’industrie). La correspondance entretenue avec le président du CDL montre que les relations demeuraient cordiales. Il assurait toujours ces fonctions en juillet 1945.

Albert Foraster était de sensibilité « catalaniste », très mal vue dans un parti centraliste comme le PSOE. En janvier 1945, il participa, à Toulouse (Haute-Garonne), au congrès de fondation du Moviment socialista de Catalunya (MSC), parti socialiste de sensibilité catalaniste. Le 11 janvier 1945, le communiqué officiel annonçant la fondation du MSC (destiné à devenir une force importante de l’opposition antifranquiste en Catalogne) annonça qu’Albert Foraster représentait à Toulouse la fédération catalane du PSOE. Mais le PSOE annonça aussitôt qu’il refusait cette affiliation (El Socialista, 3 février 1945). De retour à Perpignan, Albert Foraster proposa la création d’une fédération socialiste catalane qui, de fait, demeura lettre morte. Il lutta alors sans succès pour la création d’un parti socialiste catalan et d’une UGT purement catalane. Ces revendications se heurtèrent à l’incompréhension, pour ne pas dire à l’hostilité du PSOE et de l’UGT. Cet épisode est relaté dans l’édition de la correspondance du grand historien catalan exilé à Perpignan, Antoni Rovira i Virgili (1882-1949) qui orthographie son patronyme : « Forasté ».

Par la suite, Albert Foraster, installé à Paris, fut un fonctionnaire de l’OFPRA.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article49467, notice FORASTER Albert par André Balent, version mise en ligne le 14 mars 2009, dernière modification le 23 janvier 2019.

Par André Balent

SOURCES : Arch. Dép. Pyrénées-Orientales, 26 W 20 (correspondance entre le CDL et les organisations espagnoles (septembre 1944-juillet 1945), lettres de d’Albert Foraster, président de la JEL (« Roussillon – Languedoc ») à Camille Fourquet, juillet 1945 et réponses. — André Balent, « Les séjours de Camille Fourquet, président du CDL, et de Jean Latscha, préfet de la Libération, à Saint-Paul-de-Fenouillet (juillet-août 1944) », Fenouillèdes, 20, Saint-Paul-de-Fenouillet, 2006, p. 22-28. — Maria Capdevila (dir.), Antoni Rovira i Virgili, Cartes de l’exili (1939-1949), Barcelone, Publicacions de l’Abadia de Montserrat, 2002, p. 156. — Josep Clara, « El Gobernador, el Prefecto y los exiliados republicanos en los Pirineos Orientales », Anales de Historia Contemporánea, Universidad de Murcia, 23, 2007, p. 573-593 [p. 578 et 586-587]. —Camille Fourquet, Le Roussillon sous la botte nazie, tapuscrit inédit, Perpignan, s.d. [1959], p. 69, 77-78, 82, 93, 99, 101, 103-105 et 109. — Jean Larrieu, « Vichy, l’occupation nazie et la résistance catalane », I, « Chronologie des années noires », Terra Nostra, 89-90, Prades, 1994. —Maria Teresa Martínez de Sas, « Foraster Albert », in Maria Teresa Martínez de Sans, Pelai Pagès i Blanch (dir.), Diccionari biogràfic del moviment obrer als Països Catalans, Barcelone, Publicacions de la Universitat de Barcelona, Publicacions de l’Abadia de Montserrat, 2000, p. 592. — Courrier électronique de Josep Clara, professeur d’histoire contemporaine à l’université de Gérone, 10 mars 2009.

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