GERMON Claude, Abel

Par Michel Dreyfus, Gilles Morin

Né le 2 mai 1934 au Grand Quevilly (Seine-Inférieure, Seine-Maritime) ; inspecteur des impôts ; syndicaliste, militant socialiste de la Vienne puis de l’Essonne, rédacteur en chef du Peuple (1971-1978), membre de la commission exécutive de la CGT (1972-1981), secrétaire national du Parti socialiste (1979-1981), maire de Massy (1974-1995), député de l’Essonne (1981-1993).

[Assemblée nationale, Notices et portraits]

Fils de Gérard Germon, fonctionnaire, et Germaine née Ladoumègue, Claude Germon fut inspecteur des impôts aux Contributions indirectes. En fonction à la Direction générale des impôts (DGI) de Poitiers (Vienne) à partir de décembre 1964, il devint un des responsables du syndicat CGT des impôts et fut un conseiller syndical national des agents des Contributions indirectes. Il joua un rôle important au premier trimestre 1966 à l’occasion de la campagne contre la fiscalité organisée par la CGT. Il fut alors désigné secrétaire du Comité de liaison de défense des contribuables qui avait été constitué en octobre 1965 à Poitiers.

Socialiste, adhérant à la Convention des institutions républicaines (CIR) en 1965, il fut promu le 20 mars 1967 secrétaire de la fédération de la Vienne de la CIR. Il rejoignit ensuite le Parti socialiste constitué lors du congrès d’Épinay.

Membre de la Fédération des Finances de la CGT, Claude Germon fut élu à la commission exécutive de la Confédération en 1972, 1975 et 1978, y accomplissant trois mandats consécutifs. Désigné rédacteur en chef du Peuple à partir de 1971, il était, selon le mot de Thierry Pfister qu’il reprenait à son compte, le « socialiste officiel » de la CGT. Il quitta la Vienne pour s’installer dans la région parisienne.

Élu en 1971 conseiller municipal, puis en 1974 maire socialiste de Massy, syndicaliste de la CGT en vue, Claude Germon exprimait dans le PS un courant marxisant, situé à gauche selon la terminologie de l’époque, qui se montra réticent à l’ouverture du PS à d’autres courants, notamment aux chrétiens et surtout aux responsables de la CFDT. Avant les « Assises du socialisme », il publia ainsi dans le journal du parti, L’Unité en juillet 1974, une « opinion » sous le titre « des ambiguïtés à lever ». Aux Assises, avec Lionel Jospin*, Jean Poperen* et Pierre Joxe*, il exprima de nouveau ses réserves envers une alliance privilégiée entre le PS et la CFDT, avec « la bénédiction » de François Mitterrand*, toujours selon Thierry Pfister. Il défendait le principe de l’indépendance de chaque organisation, mais précisait que « l’indépendance n’est ni indifférence ni neutralité », et prônait le double engagement politique et syndical qui favorise le lien entre la théorie et la pratique.

Il était membre du comité d’orientation de la revue Faire, dirigée par Gilles Martinet.

Claude Germon entra au comité directeur du PS en 1975-1977, mais très vite, lui qui avait été l’un des socialistes mis en avant dans la direction la CGT, après le radical Pierre Lebrun*, pour prouver l’ouverture de la centrale et sa non dépendance du Parti communiste, il dut tenir tête aux communistes sur plusieurs fronts.

Il se vit tout d’abord contester en 1977 la tête de liste à Massy par les communistes qui se présentaient comme la première force de gauche et voulaient lui opposer la candidature de Pierre Juquin*, membre du comité central et député de la circonscription. Le PS tint bon et argua des sondages nettement plus favorables au maire sortant. Les communistes cédèrent finalement, pour conserver le siège de député semble-t-il. L’année suivante, il affronta Pierre Juquin dans la circonscription et la campagne fut particulièrement acharnée. Il se mit en congé de la direction de la CGT, mais des tracts de la CGT locale le mettaient en cause, sans oublier d’autres attaques et l’apparition d’un candidat qu’il estimait être de diversion. Au premier tour, Pierre Juquin emporta 42 860 suffrages (29,2 %) et Claude Germon arriva en deuxième position avec 32 982 (22,5 %), soit près de 2 000 voix de plus que le candidat RPR. Pierre Juquin fut élu au deuxième tour, mais Claude Germon avait fait progresser le PS de 8 points depuis 1973, réduisant l’écart entre les deux partis de 17,1 % en 1973 à 6,7 % en 1978.

Mais c’est surtout à la CGT que sa place et sa liberté de parole posaient problèmes dès lors que les rapports internes à la gauche se transformaient. En 1977, alors que débutaient les débats sur l’actualisation du Programme commun, avec notamment la question de l’extension des nationalisations à toutes les filiales de groupes susceptibles d’être nationalisés demandée par le PCF, le bureau confédéral de la CGT, au cours d’une conférence de presse où étaient présents les responsables syndicaux des neuf groupes nationalisables, en donna une définition dont le PS et Claude Germon estimèrent qu’elle correspondait exactement à celle du PCF. D’autant que des syndicats manifestèrent alors devant le siège du Parti socialiste et envoyèrent des délégations auprès des élus socialistes. Réaffirmant son souci de l’indépendance syndicale, Claude Germon demanda dans L’Unité du 30 septembre 1977 « que rien ne soit fait qui puisse porter atteinte au crédit de la CGT et aux règles qui permettent à des millions de travailleurs de toutes opinions de se trouver dans la même organisation syndicale ». Lors du comité confédéral national de la CGT tenu en mars 1978, Claude Germon et Pierre Carassus, également membre de la commission exécutive et du Parti socialiste, critiquèrent les prises de position de la CGT, favorable au PCF depuis la rupture de l’Union de la gauche survenue en septembre 1977. Ces interventions furent suivies d’un « débat spontané » où les deux hommes firent l’objet d’une attaque en règle. En novembre suivant, il fut relevé de sa fonction de rédacteur en chef du Peuple. Mais, au 40e congrès de la CGT (Grenoble, 25 novembre-1er décembre 1978), Claude Germon dénonça le manque d’autonomie du syndicat et, en 1980, fut de ceux qui exigèrent que la CGT condamnât l’intervention en Afghanistan. Dans sa ville de Massy, le PS rassembla la IVe conférence nationale des groupes d’entreprises socialistes, avec 800 délégués présents en mai 1980.

Son élection au secrétariat national du Parti socialiste, chargé des entreprises en 1979, avec Michel Coffineau, militant de la CFDT, prit tout son sens dans ce cadre : le PS affirmait ainsi qu’il conservait sa ligne unitaire en dépit des coups de butoir du PCF. Le rôle de Claude Germon s’affirma encore lorsque, déjà directeur-fondateur de Combat socialiste, mensuel destiné aux entreprises depuis janvier 1973, il prit l’initiative qui aboutit à la création du journal du même nom, quotidien du PS pour la campagne présidentielle de 1981, paraissant du 24 février au 10 juillet 1981. En dépit de ses accrochages avec les communistes, Claude Germon rappelait depuis 1977 que l’adversaire principal restait le pouvoir et il participa à de très nombreuses manifestations contre celui-ci. Localement, il installa à Massy en 1978 Radio Massy-Pal, une des « ancêtres » du mouvement des Radios libres. Il figurait aussi dans l’organigramme de campagne du candidat Mitterrand en février 1981.

Claude Germon fut élu député de la 3e circonscription de l’Essonne en juin 1981, en devançant nettement cette fois Pierre Juquin. Il obtint au premier tour 43 639 voix (34,7 % des suffrages exprimés), alors que Juquin n’en obtenait plus que 32 962 (26,2 %). Il fut réélu à l’Assemblée en 1986 et 1988, et appartint à la commission des finances, de l’économie générale et du plan. Rapporteur spécial du budget des transports terrestre et de la SNCF, il rédigea, à la demande de Pierre Mauroy* puis de Laurent Fabius, plusieurs rapports sur le sujet.

Le député Claude Germon resta membre du comité directeur jusqu’au début des années 1990. Il fut encore suppléant du bureau exécutif en 1985-1987 et fut réélu comme simple suppléant en 1990 au congrès de Rennes au titre de la motion 1 (Lionel Jospin). En 1988, il contesta la politique d’ouverture du gouvernement Rocard à des membres de l’UDF, dont Jean-Pierre Soisson au ministère du Travail.

Sa gestion locale commença à être contestée, sur fond d’affaires nationales du PS, et il fit face à une offensive interne, menée notamment par Jean-Luc Mélanchon, son adjoint à la mairie, et par Marie-Noëlle Lienemann. Demandant que le PS « fasse le ménage parmi ses élus », la ministre déléguée au Logement et au Cadre de vie, représentante locale de « la Nouvelle école socialiste », le citait avec Jacques Guyard en mai 1992 comme bénéficiaire des fausses factures établies par la SAGES, bureau d’études proche du PS, considéré comme l’une de ses sources de financement occulte. Il fut inculpé par le juge Renaud Van Ruymbeke en janvier 1993. En mars de la même année, il perdit son mandat de député comme les deux tiers des députés socialistes sortants. Au premier tour, treize candidats étaient présents et il obtint seulement 20 % des suffrages, sa concurrente RPR le devançant de 0,2 %. Au second tour, il n’obtint que 45,7 % des suffrages. Il devait rester encore deux ans maire de Massy. Dans sa ville, il fut à l’origine de la réalisation de l’interconnection des TGV en 1991, du technopole Massy-Orsay et d’un opéra prestigieux inauguré en 1993, mais qui greva les finances de la ville et dont les ambitions furent revues à la baisse. Ces difficultés s’ajoutaient à son inculpation dans les affaires de la SAGES. En 1995, il perdit sa mairie, avec 40,2 % des suffrages exprimés au premier tour et 49,6 % au second. Les affaires de financement devaient régulièrement revenir devant la justice et dans les médias, en 2000, où il fut condamné à un an de prison avec sursis, et en 2008. Il tenta de se représenter à la mairie, comme divers gauche en 2001, mais il n’obtint que 12,7 % des suffrages.

Marié le 27 juillet 1957 avec Colette Roux, Claude Germon était père de deux enfants.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article49495, notice GERMON Claude, Abel par Michel Dreyfus, Gilles Morin, version mise en ligne le 17 mars 2009, dernière modification le 5 avril 2020.

Par Michel Dreyfus, Gilles Morin

[Assemblée nationale, Notices et portraits]

SOURCES : Arch. Dép. Vienne, 1 W 4326 (David Hamelin). — Dominique Andolfatto, Le personnel dirigeant de la CGT (1944-1966), Grenoble, CERAT, septembre 1996, p. 130. — Dominique Andolfatto, Dominique Labbé, La CGT. Organisation et audience depuis 1945, Paris, La Découverte, 1997, p. 29. — Le Peuple, n° 1036, 15-30 avril 1978. — Thierry Pfister, Les Socialistes, Albin Michel, 1975. — Martine Pradoux, Combat socialiste, vie et mort d’un quotidien sans importance, mémoire de DESS, Université Paris I, 1981. — L’Unité.

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