HOEFFEL Charles, Léon, ou HÖFFEL Charles dit Stahl (acier)

Par Pierre Schill, Léon Strauss

Né le 25 janvier 1894 à Troisfontaines (Lorraine annexée), mort le 24 février 1968 à Strasbourg (Bas-Rhin) ; cheminot serrurier aux ateliers de Montigny-lès-Metz (Moselle) ; délégué du personnel ; militant CGTU puis CGT réunifiée ; membre suppléant de la commission administrative de l’Union départementale CGT de la Moselle ; membre de la commission de contrôle de la Fédération PCF de Moselle ; résistant ; conseiller municipal de Montigny-lès-Metz.

Charles Hoeffel
Charles Hoeffel
Photo d’identité dans les années soixante. Collection personnelle de Marie Hoeffel

Fils d’un forgeron, Charles Hoeffel était l’aîné d’une famille de huit enfants installée dans le sud de la Moselle. Vers 1910, il apprit le métier de forgeron à l’atelier paternel de Troisfontaines (Lorraine annexée). Mobilisé dans l’armée impériale allemande pendant la Grande Guerre, il milita après l’armistice dans les organisations d’anciens combattants. Il travailla au début des années vingt à l’arsenal de Metz avant d’exercer, à partir de 1923, son métier aux ateliers du réseau des chemins de fer d’Alsace-Lorraine à Montigny-lès-Metz. Il milita activement au syndicat unitaire des cheminots et au Parti communiste.

Il se présenta à de nombreuses reprises aux élections municipales à Montigny-lès-Metz sur la liste communiste. Candidat aux élections des 3 et 10 mai 1925, il obtint au premier tour 724 voix sur 1 955 suffrages exprimés. Au second tour la liste communiste fusionna avec la liste socialiste et il obtint 862 voix mais ne fut pas élu. Charles Hoeffel fut à nouveau candidat aux élections municipales complémentaires du 20 février 1927. Il obtint 673 voix sur 1 892 suffrages exprimés et subit un nouvel échec. Candidat aux élections municipales des 5 et 12 mai 1929, il obtint au premier tour 572 voix sur 2 062 suffrages exprimés et ne fut pas élu.

En décembre 1930, il était membre du bureau du rayon communiste et de la commission d’Agit-Prop de Moselle, de la commission régionale de contrôle du Parti communiste, et fut secrétaire du comité de la Moselle de l’Association républicaine des anciens combattants (ARAC). En août 1931 il était considéré par la police comme l’un des militants du syndicat unitaire des cheminots les plus actifs et les plus influents aux ateliers de Montigny-lès-Metz.

Les 5 et 6 novembre 1932 à Metz se tint le congrès annuel du rayon communiste de la Moselle. Il était toujours membre du bureau et fit le compte rendu d’une mission effectuée dans les jours précédents à Berlin (Allemagne). Il analysait la situation en Allemagne comme « pré-révolutionnaire ». Le congrès décida la création d’une commission de contrôle des cellules et sous-rayons pour dépister d’éventuels « mouchards ». Charles Hoeffel fut désigné pour faire partie de cette commission, une responsabilité qui l’amena à effectuer des visites dans ces structures. En août 1932, il assista au congrès d’Amsterdam avec son ami, l’instituteur Jean Burger.

À la fin de l’année 1934, il était membre du comité directeur la section de Metz du syndicat unitaire des cheminots de la Moselle. La section comptait près de mille adhérents. Il était au même moment directeur politique de la cellule communiste des ateliers de Montigny-lès-Metz (Exploitation) rattachée au rayon communiste de Metz-Montigny-lès-Metz et Saint-Julien-lès-Metz qui regroupait alors sept cellules et environ cent-cinquante membres. C’est à ce titre qu’il participa à la constitution d’un comité antifasciste à Metz et qu’il organisa la grève du 12 février 1934 pour protester contre la montée du fascisme et l’émeute parisienne du 6 février.

En 1935, il fut également membre de l’Union régionale des syndicats unitaires. Le 12 janvier 1936 à Metz, il assista au congrès réunissant une soixantaine de délégués du Parti communiste mosellan et fut élu au nouveau comité régional. Charles Hoeffel prit une part active aux grèves du Front populaire à Metz.

Au printemps 1938 à Metz, il participa au congrès de l’Union départementale des syndicats confédérés de la Moselle et fut élu membre suppléant de la commission administrative de l’UD.

En septembre 1939, Charles Hoeffel et sa famille restèrent à Montigny-lès-Metz. Après l’armistice de 1940 et l’annexion de fait de l’Alsace et de la Moselle à l’Allemagne nazie, il tenta de reconstituer un embryon de structure syndicale et politique pour résister face aux nazis. À la fin de l’année il sillonna à bicyclette, en compagnie de sa jeune camarade Marguerite Durrmeyer, fille du militant communiste Pierre Durrmeyer, les principaux centres industriels du département pour faire un état des lieux de la situation auprès des militants de la CGT et ceux du Parti communiste qui avaient été libérés des camps d’internements où ils avaient été placés suite à l’interdiction du PC.

Dès l’été 1940, Hoeffel aurait pris contact avec ses camarades du PC illégal dans les bassins du fer et de la houille de Moselle annexée. Apprenant le retour de captivité de l’instituteur communiste Jean Burger, il vint, accompagné du cheminot alsacien Georges Wodli, au domicile de ses parents à Metz en juillet 1941. Georges Wodli apportait des instructions de Paris et chargea Jean Burger de l’organisation de la résistance communiste en Lorraine annexée. Grâce à sa « tournée » de la fin 1940, Charles Hoeffel put leur indiquer quelle était la situation dans les principales zones où la CGT et le PC étaient le mieux implantés à la fin des années trente. Une connaissance de la géographie communiste en Moselle qui s’expliquait aussi par sa présence, au début des années trente, au sein de la commission de contrôle des cellules et sous-rayons de la Moselle.

La lourde tâche qui leur incombait fut confirmée, à la fin de l’année, par le comité directeur du Front national de lutte et d’indépendance de la France et par le comité militaire du PCF. Jean Burger mit ainsi sur pied le « Groupe Mario », du nom de son pseudonyme, et Charles Hoeffel en devint l’un des principaux dirigeants. Dès le mois de juillet 1941 il participa à l’organisation de la direction du mouvement et à la répartition des tâches. Ce mouvement de résistance devait devenir le plus important de la Lorraine annexée. Son fils Raymond, alors jeune adolescent, faisait la « boîte aux lettres » pour son père.

Charles Hoeffel fut arrêté par la Gestapo le 25 septembre 1943 à Biesheim (Haut-Rhin annexé) où il s’était réfugié après que Jean Burger lui eut recommandé de passer dans l’illégalité. Sa femme Hélène fut arrêtée le même jour à Metz. Charles Hoeffel fut ensuite détenu à la prison militaire de Metz avec les autres responsables du Groupe Mario arrêtés dans les jours précédents. Il y séjourna quelques semaines jusqu’à ce que l’aménagement de la cellule n° 1 du SS Sonderlager du Fort de Queuleu dans la banlieue messine fut achevé. Il fut ensuite déporté au camp de Dachau (Allemagne), après un passage au camp de concentration de Natzweiler-Struthof (Bas-Rhin annexé) en septembre 1944. Charles Hoeffel fut libéré de Dachau par l’avancée des Alliés à la fin du mois d’avril 1945. Sa femme fut quant à elle emprisonnée au Grand séminaire de Metz puis à la prison de Sarreguemines (Moselle annexée).

Après la guerre, Charles Hoeffel fut reconnu comme « ancien responsable départemental des FTPF » et homologué dans le grade de sous-lieutenant avec Croix de guerre. Il obtint le titre de déporté résistant et la Médaille de la Résistance. Il édita une brochure, en langue allemande, dans laquelle il décrit sa détention et celle de ses camarades au Fort de Queuleu, principal centre d’internement de résistants en Lorraine annexée.

Il se présenta le 23 septembre 1945 aux élections municipales à Montigny-lès-Metz sur la Liste d’union nationale républicaine démocratique et antifasciste. Il obtint 1 882 voix sur 4 616 suffrages exprimés. La liste de gauche n’eut aucun élu. Il fut à nouveau candidat aux élections municipales d’octobre 1947 sur la liste d’Union républicaine et résistante qui rassemblait des candidats socialistes et communistes. La liste à dominante communiste rassembla au premier tour une moyenne de 1 000 voix environ sur 5 372 suffrages exprimés et obtint cinq élus dont Charles Hoeffel. Elle était opposée à une liste d’entente communale qui remporta les élections.

À la conférence fédérale du PC mosellan des 18 et 19 février 1950 à Metz, il fut nommé à la commission de contrôle de la fédération.

Dans les années cinquante, il était vice-président de la fédération de la Moselle de la Fédération nationale des déportés et internés résistants et patriotes (FNDIRP) et dans la première moitié des années soixante il était membre de la présidence collective de la fédération. En 1951 il était aussi l’un des membres du bureau de l’Association départementale des anciens FFI-FTPF de la Moselle.

Il décéda des suites d’une longue maladie et un hommage lui fut rendu à Strasbourg. Fernand Obrecht* prononça son éloge funèbre.

Charles Hoeffel signa la fin de l’ouvrage Heimat unterm Hakenkreuz édité par l’Union des syndicats de cheminots d’Alsace-Lorraine CGT en 1953 à l’occasion du dixième anniversaire de la mort de Georges Wodli.

Marié le 8 janvier 1923 à Biesheim (Haut-Rhin) avec Hélène Muller, le couple a eu un fils.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article4955, notice HOEFFEL Charles, Léon, ou HÖFFEL Charles dit Stahl (acier) par Pierre Schill, Léon Strauss, version mise en ligne le 30 juin 2008, dernière modification le 9 août 2017.

Par Pierre Schill, Léon Strauss

Charles Hoeffel
Charles Hoeffel
Photo d’identité dans les années soixante. Collection personnelle de Marie Hoeffel

ŒUVRE : « SS-Sonderlager Fort Queuleu Metz », Helden und Märtyrer der lothringischen Widerstandsbewegung, Strasbourg, ICAL, s.d. [1946].

SOURCES : Arch. Nat., F7/13129, juillet 1932. — Arch. Dép. Moselle, M. Sûreté générale 53 ; M. Industrie 93 ; 301 M 78 ; 303 M 77 et 137 ; 310 M 95 ; 151 W 726, 821, 823 ; 1330 W 265 et 266 ; 24 Z 15 et 16. — Arch. Dép. Bas-Rhin, 102 AL 47. — Arch. Direction interdépartementale d’Alsace du secrétariat d’État à la Défense chargé des Anciens combattants : fichier du camp de Natzweiler-Struthof (renseignements fournis par Thierry Heidmann). — Arch. familles de Robert Schitterer et de Léopold Ziegler. — Arch. personnelles de Marguerite Obrecht, née Durrmeyer. — Arch. personnelles de Ralph Konopnicki. — Volkstribüne, 30 avril 1925, 5 et 12 mai 1925. — Le Républicain lorrain, 25 septembre 1945 et 20 septembre 1947. — François Goldschmitt, Alsaciens et Lorrains à Dachau, tome 5, Les derniers jours de Dachau, Sarreguemines, Pierron, 1947, 79 p. — Union des syndicats des cheminots A.-L. CGT, Heimat unterm Hakenkreuz, Strasbourg, 1953, 196 p. — Léon Burger, Le Groupe « Mario », une page de la Résistance lorraine, Metz, Imprimerie Louis Hellenbrand, 1965, 194 p. — Didier Kompa, La formation du Front populaire en Moselle, 1934-1936, mémoire de maîtrise d’histoire sous la direction d’Alfred Wahl, Université de Metz, 1985, 173 p. — Fernand Leroy, Montigny cité cheminote. Histoire des ateliers SNCF de Montigny-lès-Metz qui n’a jamais eu de gare ! Metz, Union départementale d’économie sociale de Moselle, 1993 (2e édition), 127 p. — Renseignements fournis par Marguerite Obrecht, Marie Hoeffel sa bru et Jean Geiger. — État civil de Trois-Fontaines.

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