DE SCHRYDER Pierre, alias « Jacquemin »

Par Jean-Pierre Ravery

Né le 12 octobre 1913 à Beauvais (Oise) ; vendeur aux Halles de Paris ; résistant communiste ; condamné à mort évadé.

Vendeur aux Halles de profession, Pierre De Schryder était domicilié 144 rue Saint-Denis à Paris (IIe arr.). En 1943, il était commissaire aux effectifs pour la région R X (ancienne R 75) des FTP sous le pseudonyme de « Jacquemin ».

Le 19 novembre 1943, alors qu’il se rendait à un rendez-vous avec Roland Cauchy, il fut arrêté à la sortie de la gare de Combs-la-Ville par sept policiers de la BS 2. En descendant du train, il rencontra par hasard le recruteur régional Georges Nicol* et le responsable politique de la région P2 (Paris-Nord), Leon Cledat alias « Perret » qui était blessé de plusieurs balles dans le ventre alors qu’il tentait de s’enfuir. Amené à la préfecture, il subit des séances de torture pendant trois jours mais ne dit rien, ce que confirme le PV d’interrogatoire retrouvé à la Libération. Le 14 décembre, il fut livré aux Allemands et transféré à Fresnes. Le 20 mars 1944, il fit partie des 27 FTP de la région parisienne traduits devant une cour martiale. Le procès dure quatre jours et vingt d’entre eux furent condamnés à mort pour « actes de francs-tireurs ».
Dans le rapport qu’il fit passer le 15 avril 1944 à Jean Chaumeil, Pierre De Schryder résuma ainsi les motifs de la sentence : « Il (le tribunal) a cru devoir nous donner la raison de la sévérité de son jugement en ces termes : nous menons un dur combat défensif et nous ne pouvons admettre que nos ennemis nous tirent dans le dos. »
À l’issue du procès, les condamnés furent autorisés à revoir une fois leurs familles et à recevoir des colis. Le 11 avril 1944, ils furent changés de cellule. À 11 h 00, un officier les informa que leur recours en grâce était rejeté, sauf pour deux d’entre eux (Nicol* et Ladsous*), et que les autres seront fusillés à 15 h 00. Ils furent autorisés à écrire deux lettres. À 14 h 00, ils furent rassemblés et embarqués dans deux camions. Deux FTP condamnés dans d’autres affaires furent joints à leur groupe. Pierre De Schryder bénéficia d’une chance providentielle. Alors que le convoi franchit le pont de Neuilly et se trouva à quelques centaines de mètres du fort du Mont-Valérien, il réussit à libérer l’une de ses mains des menottes, à ouvrir la bâche et à sauter du camion.

Dans le climat de l’époque, cette évasion ne pouvait qu’apparaître suspecte aux cadres, responsables de la sécurité du parti et des FTP. À réception du rapport qu’il transmit, Jean Chaumeil écrivit le 21 avril : « j’ai du mal à y croire (…). Qu’en pensez-vous après les exemples d’évasion simulées que nous avons eues dernièrement ? ». Sans doute Jean Chaumeil songeait-il au commissaire des FTP-MOI, Dawidowitz que la police allemande avait retourné et relâché sous couvert d’une évasion simulée ? Georges Beyer abonda dans le même sens : « Il faut être très méfiants et voir cette affaire de prés. On peut se trouver devant une provocation. » Le 9 juin suivant, Jean Chaumeil ajouta une note au dossier : « il se confirme qu’à Suresnes, tout le monde sait qu’il y a eu un évadé et que les boches fouillaient tout le quartier maison par maison ». Par ailleurs, des renseignements élogieux remontèrent vers la direction du parti : « sur sa région, il avait la réputation d’être très courageux. Ayant une fois déjà été coursé par les flics, il avait avalé sa liste de rendez-vous ».

Peu après la Libération de Paris, dans ses éditions des 4 et 5 octobre 1944, L’Humanité raconta « la miraculeuse évasion d’un condamné à mort » et publia une photo de De Schryder tenant les menottes qu’il venait d’aller déterrer dans un jardin de Suresnes.
Pierre De Schryder était employé au siège du quotidien communiste.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article49575, notice DE SCHRYDER Pierre, alias « Jacquemin » par Jean-Pierre Ravery, version mise en ligne le 21 mars 2009, dernière modification le 9 septembre 2014.

Par Jean-Pierre Ravery

SOURCES : Archives CCCP. — L’Humanité, 4 et 5 octobre 1944

ICONOGRAPHIE : L’Humanité, 4 octobre 1944

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