FARENG Robert, Ernest

Par Laurent Besse

Né le 19 juillet 1921 à Saint-Girons (Ariège), mort le 21 décembre 2014 à Saint-Lizier (Ariège) ; membre du Comité départemental de Libération de l’Ariège ; ajiste, responsable régional et national des Maisons des jeunes et de la culture des origines à la fin des années 1970, président de l’UNIREG, personnalité du secteur de l’enfance inadaptée.

Fils d’un ouvrier fondeur et d’une femme de ménage, Robert Fareng prépara au cours complémentaire de Saint-Girons le concours d’entrée à l’École normale de Foix qu’il intégra en 1939. Après son brevet supérieur, il effectua son stage à Toulouse en 1941 où il put entamer des études universitaires. Il avait découvert par des lectures les auberges de la jeunesse et s’était inscrit à la Ligue des auberges de la jeunesse, d’inspiration catholique, alors que tout aurait logiquement dû le conduire au Centre laïque des auberges de la jeunesse (CLAJ).

Devenu instituteur à Saint-Girons en 1942, Robert Fareng s’intéressa aux potentialités pédagogiques de l’ajisme et milita aux Camarades de la Route, où il fit la connaissance de militants, trotskistes ou communistes, en particulier Gilbert Trigano, responsable départemental du Front patriotique de la Jeunesse. Réfractaire au STO – officiellement à partir de mars 1944 – il créa, à la demande de René Tauziède, les « Jeunes laïcs combattants » dans l’Ariège. À la Libération, Robert Fareng fut chargé de représenter les Forces unies de la jeunesse patriotique au Comité départemental de Libération de l’Ariège. Il milita également à Tourisme et travail et rejoignit le conseil national du Mouvement laïque des auberges de la jeunesse. Sur le plan professionnel, il fut affecté sur un poste provisoire au collège de Pamiers. Des responsables ajistes le recommandèrent Robert Fareng auprès d’André Philip*, fondateur de la République des jeunes, premier organisme fédérateur des maisons des jeunes. Inspecteur régional puis délégué de la République des jeunes, devenue en 1948 Fédération française des MJC, il fut chargé de liquider les maisons héritées de Vichy et soutint très activement le développement des nouvelles MJC dans le Sud-Ouest qu’il parcourut en vélo. Grâce à son appartenance au monde des instituteurs, les maisons des jeunes se développèrent en lien étroit avec le monde laïque dans l’académie de Toulouse, résultat qui contrastait avec la méfiance qu’elles suscitèrent chez les laïques de nombreuses autres parties du territoire.

L’activité de Robert Fareng ne l’empêcha pas de soutenir en 1946 un diplôme d’études supérieures d’histoire consacré à la Résistance dans l’Ariège et d’exercer les fonctions de correspondant de l’Institut d’histoire de la Seconde Guerre mondiale. Quarante ans plus tard, il présenta à l’université de Toulouse, une thèse de 3e cycle consacrée au même thème. À partir de 1949, Robert Fareng songea à réintégrer l’Éducation nationale et présenta le concours d’inspecteur primaire. Il reçut alors la formation d’un an à l’ENS de Saint-Cloud. Ce fut le seul intermède parisien dans une carrière qui fut exclusivement provinciale et surtout toulousaine. La même année, Robert Fareng réussit le concours d’inspecteur principal de Jeunesse et sports (reçu premier) mais y renonça à cause du poste aux Antilles qui lui était proposé. Il fut alors affecté comme inspecteur primaire à Villefranche-de-Rouergue et Decazeville (Aveyron) de 1952 à 1959 puis à Muret (Haute-Garonne) à partir de 1959.

Robert Fareng fut actif dans le militantisme culturel local, comme son épouse Marthe, institutrice avec laquelle il publia des manuels scolaires. En 1960, sa carrière se tourna vers l’éducation adaptée dont il devint inspecteur pour la Haute-Garonne. Il participa également à la vie de nombreuses associations du secteur (Association pour la sauvegarde des enfants invalides, Centre régional de l’enfance et de l’adolescence inadaptée), ainsi qu’à la création des écoles d’orthophonistes et de psycho-motriciens de Toulouse.

Robert Fareng demeura membre du conseil d’administration de la FFMJC dont il devint vice-président en 1961. Il représenta les MJC du Tarn, et indirectement celles du Sud-Ouest. Celles-ci formaient un ensemble original : l’écrasante majorité ne possédait pas de directeur-permanent, alors que la professionnalisation était le trait dominant des MJC des années 1960. Elles restaient animées par des instituteurs bénévoles, dont la laïcité sourcilleuse – leurs adversaires disaient sectaire – contrastait avec la « laïcité ouverte » promue par la FFMJC. Beaucoup de ces instituteurs de sensibilité socialiste se reconnaissaient dans les positions de Robert Fareng qui revendiquait un humanisme de gauche non partisane. Sa conception de la laïcité était moins intransigeante que celle de ses collègues du Sud-Ouest et donc plus compatible avec les positions majoritaires au conseil d’administration fédéral. Divers indices dans sa correspondance laissaient supposer que Robert Fareng était entré en maçonnerie, sans doute au cours des années soixante. Au niveau national, il se fit l’avocat des « bénévoles » contre le pouvoir d’un centre fédéral, où le poids des directeurs syndiqués à la CGT, et membres pour certains du PCF, avait acquis trop d’importance selon lui. Il prôna avec d’autres élus la décentralisation de la fédération. Il se rallia à la scission initiée en mars 1969 par le délégué général Lucien Trichaud*, en liaison avec le ministre Comiti qui entendait réduire une FFMJC qu’il jugeait politisée depuis les événements de Mai 68. Sa fidélité à André Philip*, qui appuya la scission car il dénonçait une fédération ossifiée dans sa structure et prise en otage par la CGT, fit le reste.

Ce choix fut suivi par les MJC du Sud-Ouest qui formèrent le noyau dur de la scission. Mais moins d’un tiers des MJC quittaient la FFMJC, chiffre qui tomba à moins du quart dans le cas des MJC urbaines avec directeurs. Robert Fareng fonda et présida la fédération autonome des MJC de l’académie de Toulouse, devenue fédération des MJC de Midi-Pyrénées. Avec l’aide des MJC rurales du Tarn, il lutta contre les MJC toulousaines marquées par le gauchisme culturel. Il joua un rôle central dans le processus qui conduisit à la création de l’Union des fédérations régionales de MJC (UNIREG) à Narbonne en 1971. Robert Fareng en devint président et représenta la composante de gauche d’une union qui se voulait apolitique mais était soutenue, y compris par des avantages financiers jusqu’en 1973, par le gouvernement contre la FFMJC. Fidèle à ses conceptions décentralisatrices, Robert Fareng limita le rôle de l’union. Il quitta l’ensemble de ses fonctions en 1979, au moment où plusieurs membres de la génération des fondateurs de la Libération s’effaçaient, tant à l’UNIREG, qu’à la FFMJC.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article49605, notice FARENG Robert, Ernest par Laurent Besse, version mise en ligne le 25 mars 2009, dernière modification le 18 avril 2022.

Par Laurent Besse

ŒUVRE : « L’ajisme et l’instituteur », Routes, n° 10, avril-mai 1943. — Comment faire ? L’apprentissage du calcul avec les enfants de 4 à 7 ans, Nathan, 1966 (avec Marthe Fareng). — Préface à Michel Mirabail, La débilité mentale de l’enfant : connaissance et éducation des enfants déficients intellectuels, Privat, 1979. — L’occupation en Ariège, DES Toulouse 1946. — La Résistance en Ariège 1940-1944, thèse d’histoire, université de Toulouse II, 1984.

SOURCES : Fonds Robert Fareng déposé auprès de la FRMJC Languedoc-Roussillon, Narbonne. – Arch. de la FFMJC. - Nathalie Boulbès, MJC, un demi-siècle d’histoire. Mémoires de la Fédération Languedoc-Roussillon, INJEP, 2003. — Laurent Besse, Les MJC 1959-1981. De l’été des blousons noirs à l’été des Minguettes, Presses universitaires de Rennes, 2008. — Entretien avec Robert Fareng, Tournefeuille, octobre 2005. — Note d’André Balent.

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