ESCARPIT Robert

Par Jean-Pierre Augustin

Né le 24 avril 1918 à Saint-Macaire (Gironde), mort le 19 novembre 2000 à Langon (Gironde) ; universitaire, journaliste ; militant laïque.

Fils d’un instituteur socialisant de Gironde, Robert Escarpit fit ses études au lycée de Bordeaux puis à la faculté des lettres de la même ville. Il entra à l’École normale supérieure en 1938 et obtint l’agrégation d’anglais en 1942, ainsi qu’un doctorat.

Professeur au lycée d’Arcachon de 1943 à 1945, engagé dans la Résistance, Robert Escarpit participa aux combats du Médoc avec la Brigade Carnot et fut décoré de la Croix de guerre en 1945. Il partit ensuite à Mexico où il devint secrétaire général, puis directeur de l’Institut français d’Amérique latine de 1945 à 1949.

C’est à son retour que Robert Escarpit débuta ses chroniques au journal Le Monde, chroniques qui lui donnent une grande notoriété. Assistant d’anglais, il devint chargé de maîtrise de conférences en littérature comparée à la faculté de lettres de Bordeaux (1949-1951), puis professeur (1951-1984). Robert Escarpit fut directeur-fondateur de centres de recherches associés au CNRS, directeur de 1970 à 1975 de l’IUT du secteur tertiaire qu’il avait fondé en 1967 autour des options liées au journalisme, à la communication et à l’animation socioculturelle. Il présida l’université de Bordeaux III de 1975 à 1978 et prit sa retraite en 1984, mais resta actif comme professeur émérite et devint docteur honoris causa de plusieurs universités.

Au-delà des dates clés de sa carrière universitaire, bien d’autres engagements de Robert Escarpit méritent d’être évoqués : son militantisme laïque et politique, sa figure de journaliste et de romancier et ses travaux et recherches universitaires. C’est son militantisme d’homme de gauche, teinté d’idéologie marxiste qui donne sens à son action ; son activité de résistant est évoquée dans ses écrits (Le jeune homme et la nuit, 1979 ; Les va-nu-pieds, 1982), son engagement laïque illustré par la présidence de la Ligue de l’enseignement de la Gironde et l’ouvrage École laïque, école du peuple, 1961. Son positionnement politique (Vivre la gauche, 1978) amena Robert Escarpit à être un « compagnon de route » du Parti communiste français au plein sens du terme. Il accepta de siéger au conseil régional d’Aquitaine dans le groupe communiste de 1986-1992, d’être conseiller municipal de Pessac et conseiller de la Communauté urbaine de Bordeaux. Avec le soutien de Chaban-Delmas, il marqua la vie culturelle bordelaise, notamment lors de la création de la semaine Sigma en 1965, où il soutint activement son animateur Roger Lafosse ; il fut co-fondateur des Amitiés Franco-Albanaises et directeur de sa revue Albanie.

L’œuvre journalistique de Robert Escarpit débuta, en réponse à la demande d’Hubert Beuve-Méry, avec l’écriture du billet d’humeur « Au jour, le jour », une vingtaine par mois, à la une du quotidien Le Monde, de 1949 à 1979. Robert Escarpit fit une grande place à l’humour. Il n’hésita pas à faire venir un ministre, en 1956, au centenaire de Jean-Sébastien Mouche, inventeur des bateaux-mouches et créateur d’un corps d’inspecteur de police spécialisés dans le renseignement (les mouchards). Outre ses « billets » du Monde marqués par l’esprit critique et l’humour, il collabora à L’Express, au Nouvel observateur, au Canard enchaîné, au Matin (1983) et à Sud-Ouest.

L’œuvre d’écrivain de Robert Escarpit est considérable. Il publia une vingtaine de romans pour adultes dont plusieurs sont primés (Les dieux de Patamba, 1958 ; Peinture fraîche, 1960 ; Honorius pape, 1967), mais le plus connu reste Le littératron (1964) et son préféré Appelez-moi Thérèse (1975) qui l’amenèrent à correspondre avec François Mauriac. Ses essais furent aussi du succès, la Lettre ouverte à Dieu (1965) à laquelle répondit la Lettre ouverte au diable (1972) ; ses écrits pour enfants sont nombreux et en particulier les Contes de la Saint-Glinglin écrits en 1973 pour ses petits enfants ou encore la série Roultabosse (1978). Mais sa notoriété scientifique internationale provenait de ses travaux universitaires.

Dans la chronologie, les recherches et écrits de Robert Escarpit concernent d’abord les domaines des civilisations anglaise, hispanique et française. Il dirigea le Centre de sociologie des faits littéraires qui donna naissance à l’Institut de littérature et de techniques artistiques de masse (ILTAM). Sa production autour de la littérature fut d’une grande richesse, marquée par La sociologie de la littérature (1977). En 1972, il créa un groupe de recherche qui devint la Société française des sciences de l’information et de la communication et permit la reconnaissance par le ministère d’une nouvelle discipline au sein du Comité consultatif des universités. Il proposa en 1976 une Théorie générale des sciences de l’information et de la communication montrant comment s’étaient constituées les écoles de pensée issues de multiples sources géographiques et disciplinaires ; il écrivit encore en 1978 une Théorie de l’information et pratique politique et un Livre blanc de la communication.

Les figures du militant, du journaliste, de l’écrivain et de l’universitaire se mêlent dans celle de l’humaniste. Sa capacité d’écoute, sa convivialité, son attachement aux classes populaires et au terroir gascon en font un personnage marquant de Bordeaux et sa région.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article49735, notice ESCARPIT Robert par Jean-Pierre Augustin, version mise en ligne le 6 avril 2009, dernière modification le 3 juillet 2009.

Par Jean-Pierre Augustin

SOURCES : Notice « Robert Escarpit » par Jean-Pierre Augustin, in Geneviève Poujol, Madeleine Romer, Dictionnaire biographique des militants, op. cit. — Sites internet. — Nicole Robine, Hommage à Robert Escarpit, universitaire, écrivain, journaliste (24 avril 1918-19 novembre 2000), université de Bordeaux, 2001.

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