GÉNON Camille, Victor, Michel

Par Didier Bigorgne

Né le 9 août 1892 à Montcy-Notre-Dame (Ardennes), mort le 31 mai 1957 à Mézières (Ardennes) ; peintre en bâtiment, puis chef d’équipe hospitalier ; syndicaliste, militant socialiste, secrétaire général de l’UD-CGT des Ardennes (1930-1940, 1944-1949) ; résistant.

Fils d’Edmond Désiré Génon, peintre, et de Marie Eugénie Peltriaux, sans profession, Camille Génon avait un frère et une sœur. Dès l’âge de dix ans et demi, il entra dans la vie active. Il travailla dans le bâtiment pour y exercer le métier de peintre. Mobilisé lors de la Première Guerre mondiale, il combattit les Allemands avec courage, ce qui lui valut d’être distingué par l’attribution de la Croix de guerre 1914-1918 et de la Médaille militaire. Le 18 juillet 1925, à Charleville, il épousa Clotilde Schacky, sans profession ; de cette union naquirent deux enfants, un garçon et une fille. Divorcé depuis le 15 février 1934, il se remaria avec Jeanne Louise Lallement, sans profession, le 12 mars 1936 à Mézières.

Camille Génon, qui tout jeune avait adhéré à la CGT, connut une ascension syndicale rapide après de longues années de militantisme. Secrétaire général du syndicat des peintres en bâtiment de Charleville, Mézières et Mohon, il fut d’abord élu conseiller prud’homme, pour l’arrondissement de Charleville, en 1929. L’année suivante, il devint secrétaire général de l’UD-CGT des Ardennes en remplacement de Gaston Delcourt*. Dès son installation, la crise économique et le chômage réclamèrent à Camille Génon un important travail d’information et de nombreuses interventions auprès des élus et du préfet des Ardennes. Après la journée d’émeute du 6 février 1934, il organisa le meeting de protestation du 11 février qui rassembla trois cents personnes à Charleville et la grève générale du 12 février. Citant volontiers l’exemple de l’union syndicale réalisée à Revin, il se réjouit du pacte d’unité d’action SFIO-PCF signé le 27 juillet 1934 et préconisa la force commune révolutionnaire. En septembre 1934, lors d’un meeting avec les cégétistes unitaires, il fut nommé membre d’un comité de coordination qui avait vu le jour.

Les 22 et 23 février 1935, Camille Génon participa à la Marche de la faim pour exiger l’ouverture de grands chantiers et du fonds de chômage national. La manifestation qui s’acheva devant la préfecture des Ardennes se heurta aux forces de police. Arrêté avec les principaux responsables de la marche, il comparut en audience de simple police le 28 mars suivant et fut condamné à trois francs d’amende pour avoir enfreint l’arrêté préfectoral du 30 janvier 1935 qui interdisait la manifestation. Au congrès départemental de la CGT, le 7 avril 1935, Camille Génon exalta les récentes fusions à la base et conclut son rapport en lançant : « Vive la CGT unique ! » Le 19 janvier 1936, il participa au congrès de fusion CGT-CGTU qui réunit soixante-seize délégués représentant quarante- trois syndicats à Charleville : il fut élu secrétaire général de l’UD-CGT des Ardennes reconstituée. Après les grèves de l’été 1936, il fit partie, avec Ambroise Croizat de la Fédération des métaux, Clément Pierlot secrétaire adjoint de l’Union départementale, et Jules Périn président de l’UD-CFTC, de la délégation ardennaise qui négocia la convention collective de la métallurgie au ministère du Travail à partir du 24 juin : il leur fallut deux jours pour obtenir un salaire de base de quatre francs. Dès le 18 juillet 1936, Camille Génon représenta l’UD-CGT à la commission départementale paritaire de conciliation des conflits du travail composée d’un nombre égal d’employeurs et d’ouvriers et présidée par le préfet des Ardennes.

Délégué au congrès de l’Internationale syndicale à Varsovie en 1937, Camille Génon effectua un voyage à Moscou l’année suivante ; il parla à Radio-Moscou le 21 mai 1938. Sa tâche fut d’autant plus délicate en 1939, après la signature du Pacte germano-soviétique, quand il dut faire rédiger et signer un formulaire aux deux communistes de la direction syndicale, Jules Fuzelier et Clément Pierlot, qui furent exclus de la CGT.

Pendant toutes ces années, Camille Génon participa aux congrès nationaux de la CGT : au 21e (Paris, 15-18 septembre 1931), au 22e (Paris, 26-29 septembre 1933), au 23e (Paris, 24-27 septembre 1935), au 24e (Toulouse, 2-5 mars 1936), au 25e (Nantes, 14-17 novembre 1938). Il fut également réélu conseiller prud’homme, section industrielle, pour l’arrondissement de Charleville en 1935, fonction qu’il occupa jusqu’au 9 novembre 1940. À sa création en 1930, il était devenu membre de la caisse départementale des Assurances sociales. Il fut ensuite nommé au conseil d’administration du Comité d’entente des caisses du département des Ardennes, puis il entra en qualité d’administrateur à l’Union régionale du Nord-Est.

Camille Génon adhéra quelque temps à la Charte du Travail promulguée par le gouvernement de Vichy. À partir du 5 mai 1942, il siégea à la section des Ardennes de l’Office des comités sociaux ; il y occupa le poste de vice-président, la présidence étant réservée à l’industriel Pierre Faure. En novembre 1942, Camille Génois, qui avait auparavant rendu des services à la Résistance (fabrication de fausses cartes d’identité, filière d’évasion pour les prisonniers de guerre), s’engagea dans le mouvement Libération-Nord. Le 1er octobre 1943, il fut arrêté par la Gestapo et interné pendant cinq jours. À sa sortie de prison, il reprit son activité clandestine (recherche de terrains de parachutage, fourniture d’explosifs) et dut se réfugier le 15 novembre suivant dans le département du Nord pour échapper aux Allemands et aux miliciens. De retour dans les Ardennes en février 1944, il reprit contact avec le mouvement Libération-Nord dans la région de Vireux. Mais l’arrestation de sa fille le 16 mars 1944 l’obligea à la prudence ; il quitta de nouveau le département pour continuer la lutte contre l’occupant dans le Pas-de-Calais. Dans les années qui suivirent la Seconde Guerre mondiale, Camille Génon fut distingué : il fut d’abord élevé au grade de chevalier de la Légion d’honneur en 1951, puis il reçut la croix du combattant volontaire de la Résistance en 1957.

Le 8 octobre 1944, Camille Génon fut réélu secrétaire général de l’UD-CGT des Ardennes. Il fut confirmé dans sa fonction par le premier congrès syndical du 13 avril 1946. Pendant ce nouveau mandat, il dut faire face à la scission Force ouvrière : lors du congrès départemental du 14 avril 1947, il s’opposa notamment à Robert Bothereau à propos des mandats syndicaux. Le 23 avril 1949, Camille Génon quitta son poste de secrétaire général de l’UD-CGT. Il se rapprocha alors de Force ouvrière. Il y adhéra et en resta membre jusqu’à la fin de sa vie. Le 15 avril 1951, il participa au congrès de l’UD-Force ouvrière des Ardennes :il se fit remarquer par un exposé très complet sur la Sécurité sociale tout en insistant sur les solutions préconisées par les représentants Force ouvrière pour améliorer son fonctionnement.

Dans le même temps, Camille Génon, qui était devenu chef d’équipe à l’hôpital de Manchester à Mézières, continua d’exercer de nombreuses responsabilités. Réélu conseiller prud’homme en 1945, il remplit la fonction de président (ou de vice-président) du conseil des Prud’hommes de Charleville jusqu’en 1951. En 1947, il fut élu administrateur de la Caisse primaire de Sécurité sociale des Ardennes dont il devint le vice-président ; il siégea aussi au conseil d’administration de la Caisse régionale de Nancy. Administrateur de l’hôpital de Manchester, il fonda la Banque du sang et présida l’Association des donneurs de sang des Ardennes jusqu’en 1955.

Parallèlement à son activité syndicale et à son engagement dans les organismes sociaux, Camille Génon entra en politique Adhérent du Parti socialiste SFIO depuis les années 1930, il fut élu membre de la commission exécutive de la Fédération des Ardennes le 11 mars 1945. Dans les premiers jours de septembre 1947, il rompit avec son parti pour rejoindre le Parti communiste qu’il quitta quelques années plus tard.

Camille Génon était malade depuis deux ans quand il mourut. Il fut enterré civilement le 3 juin 1957 au cimetière de Charleville en présence de nombreuses délégations de syndicats ardennais

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article49915, notice GÉNON Camille, Victor, Michel par Didier Bigorgne, version mise en ligne le 23 avril 2009, dernière modification le 3 juillet 2009.

Par Didier Bigorgne

SOURCES : Congrès départementaux de l’UD-CGT des Ardennes, 1930-1935. — L’Ardenne syndicale, novembre 1937. — Le Socialiste ardennais, 1930-1936. — Le Réveil ardennais, 17 mars 1945 et 17 janvier 1946. — Liberté, 13 septembre 1947. — L’Ardennais, 12 novembre 1951, 1er-2 et 3 juin 1957. — Notes d’Henri Manceau. — États civils de Montcy-Notre-Dame et de Charleville-Mézières (commune de Mézières).

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