BERLIOZ-BENIER Johanny, dit BERLIOZ Joanny (version Dictionnaire du Komintern)

Par Claude Pennetier

Né le 7 juillet 1892 à Saint-Priest (Isère), mort le 18 mars 1965 à l’hôpital Broussais (Paris) ; professeur de langues vivantes (anglais, allemand) dans les écoles primaires supérieures et les écoles normales ; journaliste ; membre du comité central de1925 à 1959 ; secrétaire du Bureau latin d’information de l’Internationale syndicalerouge (ISR).

Berlioz naquit dans une famille de petits paysans. Après ses études à l’école primaire supérieure, il fut élève à l’école normale d’instituteurs de Lyon de 1908 à 1911 et obtint l’autorisation de séjourner pendant deux ans en Allemagne pour accéder au certificat d’aptitude au professorat d’allemand dans les écoles normales. Mobilisé au 30e régiment d’infanterie, il partit au front le 4 août 1914 et combattit dans les Vosges. Blessé, Joanny Berlioz fut versé dans le service auxiliaire, il servit d’interprète dans les camps de prisonniers en 1916-1917. Il épousa Yvonne Lelec qui sans être militante lui sera d’une aide constante dans son travail de documentation et d’information (sa discrétion permit detenir dans la maison d’Épinay des réunions illégales avec des représentants de l’IC ou de cacher des illégaux, Maurice Thorez* par exemple).

Berlioz adhéra fin 1919 à la Fédération socialiste des Vosges où il défendit les thèses favorables à la IIIe Internationale. Il obtint un poste à l’école normale de Montbrison (Loire) et participa à la création de la section communiste locale après le congrès de Tours (décembre 1920). Professeur à l’école primaire supérieure de Dijon (Côte-d’Or) en 1921-1922, il adhéra à la Fédération de l’enseignement et intensifia son action dans le Parti communiste dont il devint permanent.
Signataire de la déclaration de la « gauche », Joanny Berlioz fut déçu par le 2e congrès du Parti communiste (Paris, octobre 1922). Il écrivit à Pierre Monatte le 22 octobre 1923 : « Content de vous voir quitter l’Humanité immédiatement après l’écœurant congrès qui vient de tuer le Parti communiste en France [...] l’hypocrisie centriste est aussi dégoûtante que le franc sabotage droitier » (Les Archives Monatte, op. cit., p. 367). Berlioz débuta dans les services permanents du Parti communiste comme collaborateur de Claude Calzan*, lorsque celui-ci fut appelé, en mars 1923, à succéder à Boris Souvarine*, à la direction du Bulletin communiste. Il le suivit à l’Humanité où il remplit les fonctions, en remplacement de Rosmer*, de secrétaire général à partir du 8 mai 1924 (décision du bureau politique, 22 avril). Le bureau politique réuni le 12 juin 1924 le nomma secrétaire général de la presse quotidienne, (Humanité et Humanité-Midi) mais il demanda à être relevé de cette fonction au mois d’août 1924. Lozovski*, secrétaire de l’Internationale syndicale rouge (ISR) avait demandé sa présence au congrès de l’ISR comme rédacteur-traducteur. Il était, en 1925, secrétaire du Bureau latin d’information de l’ISR et également responsable à l’information d’Inprekorr (La Correspondance internationale).

Il participa activement en 1923-1924, « sur l’ordre de l’ISR », à la mise sur pied de l’Internationale de l’enseignement. Sa connaissance de l’allemand et de l’anglais l’amena pendant ces deux années à faire des voyages à l’étranger : trois fois en Angleterre dont deux illégalement — il fut recherché par la police anglaise — plusieurs fois en Belgique comme représentant de l’ISR à des congrès d’enseignants. Il se rendit également plusieurs fois en URSS, notamment au Ve congrès de l’IC.
Johanny Berlioz fut élu au comité central lors du congrès de Lille (20-26 janvier 1926). En fait, selon son autobiographie du 5 février 1932, il participait depuis 1923 aux séances de cette instance. Il fut d’ailleurs invité ou délégué à partir de cette date à presque tous les congrès et conférences du Parti. Il fut même intérimaire au bureau politique ainsi qu’au secrétariat à plusieurs reprises et régulièrement pendant la période d’illégalité de septembre 1929 à mai 1930. Il resta au comité central (élu suppléant en 1932 et 1936 puis titulaire en 1937) jusqu’à la guerre. Il eut pendant plusieurs années, la responsabilité de la section d’études économiques. Le BP lui demanda de faire le rapport sur les problèmes syndicaux à la conférence nationale de Saint-Denis, en juin 1927. Le même mois il rédigea, avec Thorez*, la « lettre ouverte au Parti » qui amorçait la tactique « classe contre classe ». Il intervint au congrès national de Saint-Denis (31 mars7 avril 1929) et traduisit le discours du représentant de l’Internationale communiste « William ». Le 5 mai 1930, il fut rédacteur de la lettre aux cellules sur la lutte sur les deux fronts. Ses fonctions l’amenaient à se déplacer à l’étranger comme journaliste ou comme syndicaliste. La police signalait qu’il avait obtenu en juin 1925, un passeport pour se rendre en Tchécoslovaquie et en Autriche, et le notait parmi les membres de la délégation française au congrès mondial de l’Internationale communiste tenu à Moscou en juillet 1928. Il effectua peut-être clandestinement d’autres voyages, en particulier pendant sa période d’illégalité. La justice l’avaitinculpé pour complot contre la sûreté de l’État, en août 1929, dans l’affaire connue sous le nom de « complot Tardieu ». Il disparut de la vie légale pendant une dizaine de mois. En janvier 1930, Berlioz fit partie avec Servet* et Gitton* du bureau de l’agit-prop passée sous le contrôle direct de Barbé*. Il fut également correspondant de journaux soviétiques et responsable de l’agence « Internationale Presse Korrespondenz ». Le bureau politique le désigna, en juillet 1931 — à l’époque de la mise à l’écart du « groupe » — , pour succéder à Florimond Bonte* au poste de rédacteur en chef de l’Humanité. Mais, il fut à son tour remplacé par Paul-Laurent Darnar et ne conserva que le secrétariat général ; André Marty* le remplaça rapidement. Il travailla au secrétariat de la revue les Cahiers du bolchevisme pendant l’année 1933 et collabora étroitement à La Correspondance internationale. Berlioz avait également appartenu au Conseil d’administration de la Banque ouvrière et paysanne créée par le Parti communiste et mise en liquidation judiciaire le 5 février 1930. Il fut inculpé lors du procès de février 1932 sur cette affaire.

Ce fut à Épinay-sur-Seine, où il aurait déjà été tête de liste en mai 1929, qu’il conquit ses mandats électoraux : devenu maire le 19 mai 1935 à la tête d’une municipalité entièrement communiste élue le 12 mai, Joanny Berlioz accéda au conseil général dans la deuxième circonscription de Saint-Ouen (Saint-Ouen Nord-Est, Épinay, Ile-Saint-Denis) le 2 juin 1935. Il devint député en mai 1936 et siégea aux commissions des Finances du conseil général et de l’Assemblée nationale. Il assista au 7e congrès du Parti communiste suisse en 1939.
Antifasciste militant et connaisseur de l’Allemagne nazie, Joanny Berlioz semble avoir été surpris et déconcerté par le Pacte germano-soviétique mais, fidèle au Parti communiste, il répliqua à la dissolution de son organisation en participant à la création du Groupe ouvrier et paysan français de la Chambre. Berlioz fut arrêté le 6 octobre 1939 et déchu de ses mandats électoraux. Le 3 avril 1940, le troisième Tribunal militaire de Paris jugeant les députés communistes, le condamna à cinq ans de prison. Devant l’avance allemande de mai-juin 1940, les prisonniers furent déplacés à plusieurs reprises, entre le 17 et le 30 juin, de la Loire aux Pyrénées, pour aboutir à la prison du Puy (Haute-Loire). Durant les mois qui suivirent, Joanny Berlioz fut à plusieurs reprises mandaté par ses camarades pour écrire au gouvernement de Vichy et demanda à être cité comme témoin à charge au procès de Riom.

Vers avril 1941, le gouvernement de Vichy décida de déporter les principaux détenus politiques communistes en Algérie.
Emprisonné à Maison-Carrée, Joanny Berlioz put être libéré en 1943. Délégué de la « Résistance métropolitaine » à l’Assemblée consultative provisoire d’Alger, il y développa une grande activité et assura le secrétariat général du groupe de la « France Combattante ».
Le Parti communiste le présenta, en tête de liste, aux élections de la première Assemblée nationaleconstituante en Isère. Élu le 21 octobre 1945 et réélu le 2 juin 1946 (deuxième Assemblée nationale constituante), il fut un membre influent de la commission des Finances et du contrôle budgétaire. Berlioz conserva son siège le 10 novembre 1946 mais démissionna le 23 décembre à la suite de son élection, le 8 décembre 1946, au Conseil de la République. Il resta sénateur de la Seine jusqu’au renouvellement du 8 juin 1958, où il ne se représenta pas pour raison de santé.

Membre du comité central de son retour en France à 1959, il fut, de 1948 à 1954, un animateur des sections centrales de politique étrangère et idéologique du PCF. Il remplit les fonctions de rédacteur en chef de la revue Démocratie nouvelle de 1945 à 1962.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article50078, notice BERLIOZ-BENIER Johanny, dit BERLIOZ Joanny (version Dictionnaire du Komintern) par Claude Pennetier, version mise en ligne le 4 mai 2009, dernière modification le 4 mai 2009.

Par Claude Pennetier

SOURCES : RGASPI, 495 270 4, autobiographie du 5 février 1932. — Notice Berlioz par J. Maitron et Cl. Pennetier, DBMOF.

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