MOREAU Yves, Fernand. [Pseudonymes de Résistance : CHARDON, ALAIN, MARTEL, ANTOINE, LANGRE, LUCIEN]

Par Claude Willard

Né le 26 août 1917 à Paris (XIIe arr.), mort le 27 février 2014 à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis, ex Seine) ; licencié en allemand, journaliste ; militant communiste ; emprisonné en Allemagne pour activité antifasciste (1934) ; militant actif des Étudiants communistes (1936-1939) ; résistant ; rédacteur à l’Humanité (1945-1998), chef adjoint, puis, de 1963 à 1982, chef de la rubrique internationale.

Le père d’Yves Moreau, Fernand Moreau était botaniste ; sa mère, Valentine, née Jeanneau, était aussi docteur ès sciences. Yves Moreau commença ses études primaires à Nancy, pousuivit son cursus scolaire à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) et fit sa terminale à Paris (Lycée Henri IV).
Ayant passé l’été 1932 à Berlin, Yves Moreau s’insurgea contre l’arrivée de Hitler au pouvoir. Il adhéra à la JC en juin 1933 et fut en 1934 secrétaire du comité Amsterdam-Pleyel du Lycée Henri-IV. Après son baccalauréat, il commença sa licence d’allemand à Strasbourg. Il se rendit à maintes reprises en Allemagne pour organiser la solidarité avec les antinazis allemands et pour préparer le Congrès mondial des étudiants contre la guerre et le fascisme (qui se tint a Bruxelles en décembre 1934). Mais il fut arrêté par la Gestapo à Kehl, le 19 décembre 1934, et condamné à 10 mois de prison pour « haute trahison » (il avait alors 17 ans). Ayant purgé sa peine, il fut expulsé d’Allemagne « à perpétuité ». En octobre 1935, il reprit ses études à Clermont-Ferrand (où son père était doyen de la faculté des Sciences) ; il y adhéra aussitôt au PCF et suivit, en mai 1937, l’école interrégionale du PCF. Secrétaire des Étudiants communistes de Clermont-Ferrand (1936-1938), membre du bureau des JC du Puy-de-Dôme (1937-1938), il fut, en 1938-1939, membre du premier bureau national de l’Union des étudiants communistes (UEC). A Clermont, il avait été élu président de l’Amicale des étudiants de la faculté des Lettres, qui réunissait tous les étudiants sans distinction d’opinions. En 1937, il avait intégré le Comité régional du PCF du Puy-de-Dôme, renouvelé dans son mandat en 1939.

En 1938, Yves Moreau termina sa licence d’allemand. Il épousa, le 5 novembre, Camille Margottat ; le couple eut trois enfants : Michel (6 novembre 1939), Serge (21 juillet 1948), Marianne (22 juillet 1954).

Membre de la direction du Rassemblement mondial des Étudiants (RME), Yves Moreau participa à ce titre à une délégation qui, à la fin du printemps 1939, se rendit dans les camps d’Argelès et de Gurs, où les républicains espagnols étaient regroupés, ainsi qu’à la forteresse de Collioure où le général Lister était assigné à résidence.

Mobilisé en 1939, Yves Moreau combattit sur la Loire, près de Saumur, et fut fait prisonnier à Chinon (Indre-et-Loire) (juin 1940). Il s’évada deux semaines plus tard. A l’automne 1940, alors qu’il commençait un diplôme d’études supérieures sur Goethe à l’Université de Montpellier, il travailla — en liaison avec Pierre Georges (colonel Fabien) et Yvon Djian — à l’organisation de la Résistance des étudiants de la zone sud. En février 1941, il fut recherché dans le cadre d’une enquête sur les milieux communistes étudiants à Clermont-Ferrand, considéré comme en fuite. Yvon Djian, secrétaire national de l’UEC, alors à Clermont-Ferrand, dût fuir la police en novembre 1940, remplacé par Marc Lefort. Il avait été désigné par « Paul », responsable des JC fin 1940 comme son remplaçant en cas d’arrestation. La police pense alors que le « Yves » ainsi désigné est Moreau.

Il fut, à la fin de l’hiver 1941, arrêté à Lyon et condamné à 3 ans de détention. Appartenant au « triangle » d’organisation du PCF à la prison de Montluc, il parvint à s’en échapper, avec l’accord et l’aide de son parti (voir Lucien Benoit, Histoire de prison du maquis et d’ailleurs, Aléas, p. 61-65). Au début de 1943, il entra aux Mouvements unis de la Résistance (MUR), avec comme pseudonymes successifs : Chardon, Alain, Martel, Antoine, Langre ; en 1943-1944, il fut chef national du service de sécurité du MLN. A partir du printemps 1944, il fut, en outre, chef du service B du Comité militaire de la zone sud (CMZ) des FTPF (pseudonyme : Lucien), que dirigeaient Roger Roucaute et Émile Guillemot.

Après la Libération, Yves Moreau fut à la fois rédacteur en chef de France d’abord (1945-1946) et rédacteur à l’Humanité ; d’abord affecté à la rubrique étrangère de ce quotidien, son premier article signé y fut publié le 17 août 1945 ; il devint, peu après, responsable de la rubrique de politique intérieure (1945-1946), puis chef adjoint de la rubrique de politique extérieure, dont il assuma la direction après la mort de Pierre Courtade, en 1963. Il combattit notamment pour le désarmement, contre les guerres coloniales et en faveur de la solidarité internationale, ce qui lui valut, entre autres, d’être expulsé de la Grèce des colonels et, en 1960, de l’Algérie. Il eut aussi à subir plusieurs poursuites judiciaires.
Depuis 1945, Yves Moreau collabora activement aux travaux de la « polex » du CC ; il assista ainsi à de nombreux congrès de partis communistes et participa à plusieurs délégations du CC.
En 1978, en raison de son âge, Yves Moreau demanda à être déchargé de la responsabilité de chef de rubrique, demande accordée seulement en 1982. Remplacé par José Fort, il continua jusqu’en 1998 à travailler quotidiennement à l’Humanité.

Séparé de sa femme, Yves Moreau vécut depuis 1957 avec Gerda Müller (nom de plume : Gerda Lorenzi), correspondante à Paris de la radio de la RDA.

Croix de guerre 1939-1945, il était Médaille de la Résistance.

Il se maria à Saint-Denis en 2008 avec Gorda Muller. Yves Moreau est resté membre du Parti communiste jusqu’à sa mort.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article50087, notice MOREAU Yves, Fernand. [Pseudonymes de Résistance : CHARDON, ALAIN, MARTEL, ANTOINE, LANGRE, LUCIEN] par Claude Willard, version mise en ligne le 5 mai 2009, dernière modification le 4 août 2022.

Par Claude Willard

ŒUVRE : De fort nombreux articles et éditoriaux. — Les Fils de Hitler, Éditions de l’Archipel, 1993.

SOURCES : RGASPI, 495 270 3989, autobiographie, 13 novembre 1938 Clermont-Ferrand, classé A1. — Jacques Varin, Jeunes comme JC, Éditions sociales 1975. — Archives du CN du PCF. — Interview (octobre 1999). — Arch. dép. du Puy-de-Dôme, 1296 W 75 : Le commissaire de police au commissaire divisionnaire chef de la 2° section, police criminelle, 17 février 1941, Vichy. — Archives privées Roger Champrobert (Clermont-Ferrand). — SHD Vincennes, GR 16 P 429942, dossier de résistant d’Yves Moreau (nc). —RAGSPI : Fonds de la direction du Parti Communiste Français : année 1937 = dossier 1865, p. 148, année 1939 = dossier 1909. — "Yves Moreau Une grande signature disparaît", L’Humanité, 3 avril 2014. — Alain Montchablon, "Biographie Yves Moreau", http://www.germe-inform.fr/?p=1138. — Généanet. — État civil. — Notes d’Eric Panthou.

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