FARINE Philippe, Louis

Par André Caudron

Né le 1er mai 1917 à Marseille (Bouches-du-Rhône), mort le 21 novembre 2006 à Paris (XXe arr.) ; avocat, journaliste ; militant de la JEC, dirigeant du mouvement Cœurs vaillants (1935-1938), militant du MRP, secrétaire général (1961-1968) puis président du CCFD (1968-1977) ; député MRP des Basses-Alpes [Alpes-de-Haute-Provence] (1946-1951), conseiller de Paris (1983-1989, 1993-1995) ; membre du Haut conseil à l’Intégration (1990-1997).

[Mairie du XIIe arondissement de Paris]

D’origine marseillaise, Philippe Farine, fils d’un employé, milita dans les mouvements d’Action catholique des jeunes : la Jeunesse étudiante chrétienne (JEC) et les Cœurs vaillants dont il fut l’un des dirigeants nationaux de 1935 à 1938, avant de s’inscrire comme avocat au barreau de sa ville natale. Mobilisé en 1939, blessé pendant la campagne de France, il obtint la Légion d’honneur et la Croix de guerre pour sa conduite au front et, malgré de nombreuses tentatives d’évasion, subit ensuite cinq années de captivité en Allemagne.

A son retour en France, Philippe Farine commença une carrière politique en étant cinquième sur la liste du MRP dans la première circonscription des Bouches-du-Rhône pour la première Assemblée nationale constituante (scrutin du 21 octobre 1945). Il ne fut pas élu et essuya un nouvel échec le 2 juin 1946. Il fut plus heureux, dans les Basses-Alpes cette fois, aux élections législatives du 10 novembre 1946 et devint l’un des plus jeunes députés. Siégeant notamment à la commission de l’Éducation nationale et nommé juge à la Haute cour de justice, Philippe Farine intervint surtout à propos du budget de la Jeunesse et des sports, insistant sur la nécessaire neutralité gouvernementale dans l’attribution des subventions aux divers mouvements. Le renouvellement du 17 juin 1951 fut fatal à Philippe Farine qui fut battu par le radical Marcel Massot malgré un accord d’apparentement avec la SFIO et le RGR. Le 2 janvier 1956, il échoua encore, la liste du MRP arrivant en troisième position derrière les socialistes et les communistes.

De 1951 à 1954, Philippe Farine avait été chef de cabinet de Maurice Schumann*, secrétaire d’État aux Affaires étrangères. Partisan résolu de la construction d’une Europe unie, il prit aussi des responsabilités dans les Nouvelles équipes internationales (NEI) dont il présida l’équipe française des jeunes. Il dirigea ensuite le cabinet de Robert Lecourt, garde des Sceaux dans les gouvernements Gaillard et Pflimlin (1957-1958). En 1958, l’équipe française des NEI lui confia le poste de secrétaire général.

Philippe Farine prit bientôt ses distances avec le régime gaulliste en passe de « confisquer l’État » et s’engagea dans le secteur associatif voué à la lutte contre la misère et l’oppression. Il fut en 1961 l’un des fondateurs du Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFD) qui le choisit aussitôt comme secrétaire général. Il en fut ensuite le président de 1968 à 1977, premier laïc à cette fonction où il succéda à Mgr Jacques Ménager, évêque de Meaux. Tous deux prirent part aux travaux de la commission pontificale Justice et paix, spécialisée dans le domaine de la solidarité et de la justice internationale. Pour Philippe Farine, le CCFD devait être une sorte de « catalyseur des engagements politiques, syndicaux et culturels », ainsi qu’il le définissait lors d’une réunion de l’UNESCO à Paris en 1977. Sous sa direction, le Comité se constitua en groupe de pression, appelant à une remise en question de la société et prenant des positions qui suscitèrent des réserves de la part d’autres organismes caritatifs comme le Secours catholique et la Société de Saint-Vincent-de-Paul. Le CCFD ne rejetait pas la rhétorique de la lutte des classes ; il entendait contribuer à libérer les pays en développement « de toutes les structures oppressives et de toutes les aliénations ».

En 1974, l’adhésion de Philippe Farine au Parti socialiste avait marqué son retour dans la vie politique. Bientôt délégué national de ce parti à l’immigration, membre du CERES, il fut élu conseiller municipal dans le XIIe arrondissement de Paris en 1983. Chef de file des opposants, il perdit son siège en 1989 mais le retrouva de 1993 à 1995, se consacrant en particulier à la commission enseignement-culture-jeunesse, sports-environnement-parcs et jardins. Son acharnement et sa force de conviction jouèrent un rôle déterminant dans la conquête par la gauche, aux élections de 2001, de cet arrondissement traditionnellement acquis à la droite.

Très sensible à la condition de la population immigrée, Philippe Farine avait participé à la création du centre social « Relais 59 » qu’il présida dans son quartier parisien de 1980 à 1998. Il fonda l’association « Génériques » en 1987 pour mieux faire connaître les phénomènes migratoires par des activités scientifiques et culturelles. Il publia de nombreux articles et organisa maints colloques destinés à favoriser une approche progressiste et humaniste des politiques d’immigration. Membre du Haut conseil à l’intégration de 1990 à 1997, Philippe Farine fut nommé président du comité de pilotage du Conseil de la citoyenneté des Parisiens non-communautaires, en mars 2001, par Bertrand Delanoë, maire de la capitale. Cet organisme donnait la possibilité de se faire entendre à des milliers de personnes dénuées jusqu’alors de moyens d’expression. Philippe Farine était alors président du Centre d’information et d’études sur les migrations internationales (CIEMI) dont il dirigeait la revue, Migrations société.

Inhumé à Étoile-sur-Rhône (Drôme),Philippe Farine avait fait partie de l’Amicale des anciens du MRP jusqu’à ses derniers jours. Sa femme Jeannine née Biro, qu’il avait épousée le 21 juin 1946 à Marseille, avait milité elle aussi au MRP.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article50147, notice FARINE Philippe, Louis par André Caudron, version mise en ligne le 9 mai 2009, dernière modification le 21 juin 2009.

Par André Caudron

[Mairie du XIIe arondissement de Paris]

ŒUVRE : L’Europe en devenir, Institut Culture et promotion, Éditions du Centurion, 1964. — Préface aux Inconnus d’Afrique de Claude Goure et Jean Pottier, Éditions Spes, 1968. — L’exclusion sociale et les exclus en Île-de-France, avec Yvette Boissarie, CESRIF, 1995.

SOURCES : Dictionnaire des parlementaires français, 1940-1958, IV. — Le MRP vous parle, n° 101, juin 2004 ; n° 111, décembre 2006. — Le Monde, 29 novembre 2006. — Notes de Gilles Morin. — État civil de Marseille.

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