FOULON Charles, Camille

Par François Prigent

Né le 19 août 1912 à Marseille (Bouches-du-Rhône), mort le 13 février 1997 à Chantepie (Ille-et-Vilaine) ; professeur de faculté ; secrétaire fédéral des JS du Finistère (1935-1940), dirigeant fédéral de la SFIO d’Ille-et-Vilaine (1945-1947), exclus en 1948, secrétaire national du Parti socialiste unitaire (1948) puis membre du Parti socialiste de gauche, secrétaire fédéral de l’UGS d’Ille-et-Vilaine jusqu’en 1960, secrétaire fédéral du PSU d’Ille-et-Vilaine (1963-1968) ; responsable local et national (1971-1981) de la Ligue des droits de l’Homme (LDH) ; militant du SNES-SUP ; militant laïque ; résistant Libération-Nord, secrétaire du CDL d’Ille-et-Vilaine (1944-1946).

Charles Foulon avec son épouse Louise
Charles Foulon avec son épouse Louise

Son père Adolphe Foulon, originaire du Finistère, était officier de port à Marseille. Cadet d’une famille de huit enfants, Charles Foulon fut élevé par sa mère Émilie née Derrien, couturière vivant seule à Brest à partir de 1917. Boursier, il fit ses études primaires et secondaires dans les écoles laïques de Brest, fréquentant le patronage laïc de Recouvrance. En 1929, Charles Foulon entra à la Faculté des Lettres de Rennes. Agrégé de grammaire avant ses vingt-un ans (plus jeune agrégé de France), il occupa successivement les postes de professeur de première au lycée de Brest (1933-1939 et 1940-1941), puis de professeur de première au lycée de Rennes (1941-1942). Chargé de cours de langue et littérature médiévale (1942-1945), puis de langue et littérature française moderne (1945-1947), Charles Foulon était assistant à la faculté de lettres de Rennes, avant de devenir professeur titulaire de la chaire de langue et littérature française anciennes en 1954. Deux de ses frères furent par ailleurs directeur d’un cours complémentaire et professeur de lycée, sa sœur normalienne étant institutrice, avant de se cloîtrer chez les clarisses en 1937.

Adhérant à la SFIO dès 1933, Charles Foulon fut secrétaire fédéral des JS du Finistère entre 1935 et 1940, contribuant à fonder dix-sept groupes de jeunes socialistes, alors que la fédération était dirigée par Guy Le Normand*, conseiller général de Morlaix depuis 1937. Dirigeant national des JS, il intervint lors de la conférence des JS à Toulouse en avril 1939.
Au plan syndical, Charles Foulon fut membre du bureau du syndicat cégétiste des professeurs du lycée de Brest (1937-1939). Au Collège du Travail de la Maison du Peuple, de Brest, il assurait des cours d’histoire du travail et du mouvement ouvrier. Il fut suspendu huit jours, en raison de sa participation à la grève de novembre 1938. Par ailleurs, il était membre du Grand Orient de France, initié dans la loge des « Amis de Sully » en 1935 (accédant au grade de maître en 1938).

Résistant à Libération-Nord, il seconda Tanguy Prigent* dans la reconstitution de l’organisation socialiste clandestine. Arrêté le 7 février 1942 par la Gestapo, à la suite du démantèlement d’un réseau de renseignement gaulliste (réseau Johnny), il fut interné à Angers et à Fresnes, puis relâché fin mars 1942. Membre du CDL d’Ille-et-Vilaine au titre de Libération-Nord, Charles Foulon en devint le secrétaire général dans la clandestinité au printemps 1944, après l’arrestation de l’ancien conseiller d’arrondissement SFIO Honoré Commeurec* (mort en déportation). Très actif dans l’épuration dans le domaine économique particulièrement, il conserva ses fonctions à la tête du CDL jusqu’en 1946.

Rapporteur de la commission d’épuration de la SFIO, il intervint au nom des fédérations bretonnes lors du congrès qui reconstitua la SFIO en novembre 1944 sur l’épuration, le problème économique et financier ainsi que le problème industriel et agricole. Il rapporta aussi les décisions de la commission chargée d’étudier le cas des anciens parlementaires, se révélant notamment intransigeant vis-à-vis de la figure historique de la SFIO à Saint-Nazaire, François Blancho*, en raison de son vote du 10 juillet 1940. Au conseil national de la SFIO du 20 mai 1945, il invita ses camarades à renforcer l’unité de la résistance et de la gauche et à rompre avec la droite. Il siégea à la commission chargée d’examiner les comptes du Populaire au congrès national d’août 1945, présida une séance et défendit une motion fédérale demandant la reprise des pourparlers d’unité organique avec le PCF. À la conférence des présidents de CDL du 4 octobre 1945, Il appuya la proposition du PCF d’appeler à voter oui-non au référendum constitutionnel d’octobre 1945, s’opposant violemment à Lamarque-Cando*. À la conférence des présidents de CDL du 26 octobre 1945, il réclama, comme Emmanuel d’Astier de La Vigerie*, député apparenté communiste d’Ille-et-Vilaine, une épuration plus radicale, la suppression de la DGER, qu’il qualifiait « d’organisme de lutte contre les membres de la Résistance » et proposa une motion en faveur des « camarades indochinois » arrêtés à Paris. Au conseil national de juin 1946, disant parler au nom de ceux qui se sentaient « plus près des communistes que du MRP », il dénonça violement ce dernier comme « le masque de la réaction en Bretagne » (…) « pas seulement le cléricalisme, il représente également et à coup sûr le capitalisme ».

Secrétaire fédéral à la propagande pour l’Ille-et-Vilaine de 1945 à 1947, il épaulait dans l’organisation de la vie partisane le secrétaire fédéral Eugène Quessot*, conseiller général depuis 1919 et conseiller de la République entre 1946 et 1948. Charles Foulon figurait en seconde position lors des législatives de juin 1946 (19,4 % des voix) et novembre 1946 (17,17 % des suffrages exprimés), derrière Albert Aubry*, qui fut élu député jusqu’à son décès en 1951. Rédacteur de nombreux éditoriaux et articles dans L’Aurore Socialiste, Charles Foulon n’était pas en phase avec les orientations globales de la SFIO, voulant tisser des liens unitaires avec le PCF dans la continuité de son action pour préserver l’unité des mouvements de résistance.

Membre de la Bataille Socialiste en 1947, il se déclara solidaire de Bloncourt, Haas et Morin exclus le 8 janvier 1948. Exclu à son tour le 15 janvier 1948 en compagnie de Jean Guignebert, il adhéra au MSUD puis au premier PSU (Parti Socialiste Unitaire), dont il devint le premier secrétaire national en 1948. Son exclusion correspondait à un moment de tension entre la fédération SFIO d’Ille-et-Vilaine et le centre socialiste parisien, Alexis Le Strat* s’élevant contre la direction nationale qui avait annoncé l’exclusion de Foulon sans en avertir les socialistes rennais. De fait, le départ de Charles Foulon accéléra la rétraction profonde du milieu partisan aussi bien en terme d’effectifs que d’élus : la SFIO qui comptait deux parlementaires et trois conseillers généraux en 1948, n’a plus aucun élu de premier plan en 1951.

En novembre 1954, Charles Foulon était membre du comité directeur du Parti Socialiste de Gauche, structure partisane minoritaire à la base militante étroite.

Socialiste unitaire, Charles Foulon avait entamé un rapprochement avec le PCF en 1948, qui se poursuivit jusqu’au début des années 1960. Ainsi, il figurait en troisième position sur la liste d’Unité Républicaine et Progressiste, présentée par le PCF en janvier 1956, en compagnie d’un autre compagnon de route non adhérent communiste, à savoir le chrétien progressiste Henri Denis*, directeur de Ouest-Matin. Cette liste qui obtint 11.33 % des suffrages exprimés n’eut aucun élu, au contraire de la SFIO (7,14 % des voix), Alexis le Strat, adjoint de Henri Fréville dans la municipalité rennaise de Troisième Force, devenant député grâce aux apparentements avec le MRP et les radicaux.

Secrétaire fédéral de l’UGS, Charles Foulon fut suppléant en novembre 1958 du candidat communiste Émile Guerlavas*, secrétaire de l’UL CGT de Rennes et secrétaire fédéral du PCF. Dans la circonscription de Rennes Sud, le duo obtint 8561 voix soit 14.3 % des suffrages exprimés, nettement distancé à gauche par le tandem SFIO Alexis Le Strat et Roger Chambrelan (16.8 % des voix).

En 1960, Charles Foulon entra au PSU avec son puissant réseau de socialistes unitaires, opposés à la SFIO et méfiants vis-à-vis du PCF. Bénéficiant du relais de son suppléant Albert Renouf*, cheminot qui faisait partie de la direction départementale de la CGT, Charles Foulon se présenta sous l’étiquette PSU aux législatives de 1962 dans la circonscription de Rennes Nord, recueillant 5178 voix soit 11.93 % des suffrages exprimés. Il dépassait ainsi le score du duo radical (Prudent Porée, ancien conseiller général et leader de la FOL) et socialiste (Charles Biétry*, adjoint SFIO à Rennes), qui avait obtenu 4 955 voix en 1958.

À partir de 1963, Charles Foulon devint secrétaire fédéral du PSU, à la suite de Pierre Le Coadic*, professeur de lycée, très impliqué dans les filières laïques. Il fut d’ailleurs le candidat du PSU dans le canton de Rennes Nord-Ouest, améliorant de façon continue son score : en 1961 (606 voix et 7.35 % des suffrages exprimés), en 1963 (579 voix et 9.01 % des suffrages exprimés), en 1964 (874 voix et 9.75 % des suffrages exprimés) et en 1967 (1948 voix et 22.08 % des suffrages exprimés).

Délégué du comité Mitterrand en Ille-et-Vilaine lors des présidentielles de 1965, il figurait également sur la liste du PSU aux municipales à Rennes, qui n’eut pas d’élu. En 1967, Charles Foulon obtint 1948 voix, soit 22.08 % des suffrages exprimés lors des cantonales, mais aussi 31.9 % des voix lors du second tour des législatives, sous l’étiquette PSU. En 1968, il recueillit 5 313 voix et 9.17 % des suffrages exprimés, toujours avec Albert Renouf comme suppléant, qui fut conseiller général PS entre 1976 et 1988 (avant d’être relayé par Jeannine Huon, fille du militant PSU de Rennes Marcel Lepinay).

En 1968, ce militant du SNES-Sup passa le relais à la tête de la fédération PSU à Pierre-Yves Heurtin*, symbole du renouvellement des réseaux militants à la suite du mouvement de mai 1968 à Rennes notamment. En effet, le milieu partisan fut profondément renouvelé, en raison de l’entrée en militance de la génération née après 1945 et de l’intégration des matrices militantes chrétiennes, en voie de décrochage du bloc conservateur et clérical.

Déjà trésorier de la LDH à la fin des années 1930 à Brest, Charles Foulon devint président de la section Saint-Malo-Côte d’Émeraude de la LDH depuis 1965 à la suite du secrétaire départemental du SNI entre 1951 et 1961, Robert Le Foulgoc* et de Jean Delalande, (diplomate syndiqué à la CGT, ministre plénipotentiaire en Hongrie, mort en 1965). Dans les cercles militants de la LDH, il côtoyait la femme de l’universitaire communiste, Serge Villeret. Entre 1971 et 1981, il fut membre du comité central de la LDH, organe dirigeant national mené par Daniel Mayer*.

Charles Foulon s’était marié en 1941 avec Louise Ropars, assistante sociale, fille de petits paysans qui fut proche du PSOP en 1938-1939, militant notamment dans le mouvement des auberges de jeunesse jusqu’en 1941. Passée par l’école protestante de Poullaouen soutenue par les mineurs gallois, elle fréquenta ensuite les communautés protestantes de Bordeaux et de l’Aisne (liens avec les Américains). Charles Foulon l’avait rencontré en 1937 au sein des filières militantes antialcooliques (le groupe des « Bons Templiers), dont le couple fut un des piliers en Bretagne de la Libération jusqu’aux années 1960. Infirmière dans la compagnie FTP Aunis dans le Finistère, Louise Foulon a suivi ensuite la trajectoire de son mari au point d’entrer dans la franc-maçonnerie (loge du « Droit Humain ») peu avant sa mort, le 6 juin 1969. Très marqué par le décès de sa compagne, qui avait fondé les services sociaux et médicaux de l’enseignement supérieur en Bretagne et avec qui il forma un couple fusionnel, Charles Foulon se retira de la scène politique électorale en 1970, se remariant en mars de la même année à Paris (XIVe arr.) avec Odette Prunet, assistante sociale du CROUS de Rennes, fille d’un pasteur missionnaire à Madagascar au temps de Galliéni.

Historien, son fils Charles-Louis Foulon rédigea en 1970 un mémoire de recherche sur le CDL d’Ille-et-Vilaine, sous la direction de Michel Denis, qui devait pour sa part évoquer le parcours du « professeur-citoyen », lors de l’inauguration de l’avenue Professeur Charles Foulon à Rennes, le 8 mai 1998. Son autre fils, Jacques Foulon, assistant à la faculté de médecine puis inspecteur technique des PTT, fut candidat communiste à des élections cantonales. C’était aussi un militant social de premier plan, président de la Confédération nationale du Logement (CNL Bretagne depuis 1981). La section LDH de Rennes porte depuis 1997 le nom de Charles Foulon. Les papiers de Charles Foulon ont été déposés aux archives municipales de Rennes.

Par ailleurs, Charles Foulon fut le premier secrétaire général de la société internationale arthurienne (1948-1966) ; enseignant au centre universitaire d’été pour les étudiants étrangers à Saint-Malo, de 1963 à 1979. Directeur du laboratoire de phonétique expérimentale de l’Université de Rennes à compter de 1966, il fut aussi directeur de l’Institut de français de l’Université de Haute-Bretagne après 1972 et directeur de l’UER Littérature de 1973 à 1978 avant d’être professeur émérite de 1979 à 1992.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article50213, notice FOULON Charles, Camille par François Prigent, version mise en ligne le 13 mai 2009, dernière modification le 31 juillet 2021.

Par François Prigent

Charles Foulon avec son épouse Louise
Charles Foulon avec son épouse Louise
Charles Foulon en 1945
Charles Foulon en 1945
Charles Foulon à la tribune du congrès national de la SFIO en 1945
Louise Foulon-Ropars
Louise Foulon-Ropars
Charles Foulon
Charles Foulon

SOURCES : Arch. Dép d’Ille-et-Vilaine, 518 W 65. — Arch. de l’OURS, dossiers Finistère et Ille-et-Vilaine. – Liste des adhérents du PSU d’Ille-et-Vilaine en 1965, transmise par Christian Bougeard et Gilles Morin. — Le Breton Socialiste. — L’Aurore Socialiste d’Ille-et-Vilaine. – Documents transmis par Charles-Louis Foulon (son fils). — Mairies de Marseille et de Rennes. — Charles Foulon, L’oeuvre de Jean Bodel, thèse de doctorat, PUF. – Charles-Louis Foulon, Le Comité Départemental de Libération d’Ille-et-Vilaine, maîtrise, Université de Rennes 2, 1970. – Nicolas Le Jean, Le parti socialiste SFIO en Ille-et-Vilaine (août 1944- juin 1951), maîtrise, Université de Rennes 2, 1997. – Jacqueline Sainclivier, L’Ille-et-Vilaine (1918-1958) : vie politique et sociale, Rennes, PUR, 1996. — François Prigent, « Les réseaux socialistes PSU en Bretagne (1959-1981) : milieux partisans, passerelles vers le PS, rôle des chrétiens de gauche », in Tudi Kernalegenn, François Prigent Gilles Richard, Jacqueline Sainclivier (dir.), Le PSU vu d’en bas. Réseaux sociaux, mouvement politique, laboratoire d’idées (années 50 - années 80), Rennes, PUR, 2009, pages 41-54. — Notes de Charles-Louis Foulon, Gilles Morin, Georges-Michel Thomas, Franck Keller. — Fond Ropars, l’AAPBC (Association des Amis du Protestantisme en Bretagne Centrale, Carhaix 29) . — État civil de Marseille.

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