FAVARO Octave [FAVARO Ottavio, Marino, dit]

Par Tangi Cavalin, Nathalie Viet-Depaule

Né le 6 décembre 1922 à Fontaniva (région de Padoue en Italie) ; employé, ouvrier, aide-chimiste ; prêtre de la Mission de France (1965), prêtre-ouvrier (1966) ; secrétaire et trésorier CFTC de la Chimie (1954-1957) à Marseille (Bouches-du-Rhône).

Fils d’un immigré italien, ouvrier brasseur à Pont-à-Mousson (Meurthe-et-Moselle) puis docker occasionnel à Marseille (Bouches-du-Rhône) ou saisonnier dans la région de Montpellier (Hérault) à partir de 1926, Octave Favaro grandit à l’Estaque, quartier marseillais peuplé d’Italiens et d’Espagnols qui vivaient dans des logements de fortune. Il fréquenta l’école communale, obtint le certificat d’études primaires et, après trois années passées dans une école commerciale italienne, trouva une place d’employé de bureau au consulat d’Italie. Son père avait été embauché en 1930-1931 à la fois comme concierge et jardinier dans une institution religieuse qui, après avoir abrité l’orphelinat Principo Umberto, s’était transformée en école privée sous l’égide du consulat italien et était tenue par des sœurs de l’Immaculée d’Ivrea (Piémont).

La Seconde Guerre mondiale, dans une ambiance où les Italiens pouvaient être assimilés à des fascistes, frappa de plein fouet la famille d’Octave Favaro. Son père perdit son emploi en 1941 lorsque les religieuses regagnèrent l’Italie et dut reprendre du travail sur les quais jusqu’à sa mort subite en mars 1945. Lui-même fut contraint de travailler dans le bâtiment comme manutentionnaire ou terrassier. Sa famille fut expulsée de son logement et hébergée par des amis lorsque la propriété fut réquisitionnée par les Allemands. Devenu chef de famille (il était l’aîné et seul garçon de cinq enfants), Octave Favaro entra en septembre 1945 la Compagnie française de raffinage, à Martigues, comme aide-chimiste et se syndiqua jusqu’en 1947 à la CGT, la seule organisation existant dans l’usine.

Ce furent la présence des prêtres-ouvriers puis les tensions entre desmilitants de l’Action catholique et des chrétiens progressistes à Marseille qui amenèrent Octave Favaro à s’interroger sur son propre désir d’être prêtre. Il fréquentait alors les paroisses Saint-Louis et Saint-Michel. Confiées à la Mission de France, celles-ci avaient rompu avec tout style de vie bourgeoise, ouvert leurs presbytères aux mal-logés et défendaient le sacerdoce des prêtres-ouvriers. Octave Favaro fit quelques retraites à Chabeuil et à Châteauneuf-de-Gallaure dans la Drôme en 1951 et 1953. N’y trouvant pas ce qu’il recherchait, il s’orienta vers la Mission de France. Il différa sa décision, attendant que ses sœurs soient mariées. Entre-temps, devenu agent de laboratoire, il s’investit dans le militantisme qu’il soit d’Action catholique ou syndical. Fin 1953, Octave Favaro participa au démarrage de l’Action catholique ouvrière (ACO) dont il compta parmi les délégués diocésains pour le secteur sud de l’Étang de Berre. En 1954, il implanta le syndicat CFTC dans la Compagnie française de raffinage (branche chimie) et assuma les fonctions de secrétaire et de trésorier jusqu’en 1957. Il faisait partie de la commission régionale de conciliation au sein de l’Union locale dont le secrétaire était alors Achille Galli.

Octave Favaro entra au séminaire des vocations tardives, à Morsang-sur-Orge (Seine-et-Oise, Essonne). Il y resta trois ans puis intégra le séminaire de la Mission de France, à Pontigny (Yonne) en 1960. Il fit des stages ouvriers dans des équipes de la Mission, à Saint-Michel à Marseille en 1961 et à Tergnier à Pâques 1963. Ordonné prêtre le 24 mai 1965, il fut nommé dans l’équipe sacerdotale de Saint-Michel à Marseille jusqu’à ce qu’il devienne prêtre et ouvrier à partir de novembre 1966. Octave Favaro faisait partie des 52 prêtres désignés pour travailler à plein temps à la suite des décisions prises à la fin du concile Vatican II et avait participé à la session de formation de Morsang-sur-Orge en 1966. Il travailla occasionnellement dans des silos à blé à La Joliette. A la suite de son licenciement, il devint en 1967 préparateur dans une usine d’encres (les établissements Lorilleux Lefranc). Il s’était syndiqué à la CFDT et assurait une permanence de conseil à l’Union locale des Crottes (Marseille-Nord). Encadré par la Mission ouvrière, Octave Favaro appartenait alors à l’équipe des prêtres au travail composée de Paul Doaré (Mission de France), des pradosiens Jean Lahondès et André Pinatel. Il se rapprocha ensuite de l’équipe sacerdotale de Saint-Louis, confiée à la Mission de France. Il habita dans un foyer de jeunes travailleurs au Cap Janet, où il offrait ses services d’écrivain public, jusqu’au moment où son entreprise lui octroya un logement social dans la cité de la Castellane. Octave Favaro fit alors équipe avec Roger Philippe, prêtre-ouvrier de la Mission de France, pendant cinq ans.

En préretraite en 1980 (il avait été licencié), Octave Favaro partagea son temps entre la quarantiane de compagnones de la communauté Emmaüs de Cabriès près d’Aix-en-Provence, la prison des Baumettes en tant que visiteur, les ASSEDIC où il siégeait dans une commission paritaire pour défendre les droits des chômeurs . Il accompagna aussi pendant quelques temps une équipe de l’’ACO . Domicilié à Gignac-la-Nerthe (Bouches-du-Rhône), dans une maison qu’il avait construite lui-même, il continue en 2009, malgré de graves soucis de santé, à se réunir avec son équipe de prêtres au travail dont les membres sont tous retraités.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article50330, notice FAVARO Octave [FAVARO Ottavio, Marino, dit] par Tangi Cavalin, Nathalie Viet-Depaule, version mise en ligne le 25 mai 2009, dernière modification le 22 juin 2009.

Par Tangi Cavalin, Nathalie Viet-Depaule

SOURCES : Arch. nationales du monde du travail à Roubaix, 5 K 1-9. — Arch. CFDT, 5H97, Bouches-du-Rhône, relations entre la confédération et les unions départementales, 1956-1957. — Arch. du Centre national de l’Église de France, 113 CE 63 et 65. — Arch. Emmanuel Deschamps, dossier rencontre ENPO 1967. — « Fils d’un peuple de migrants », portrait d’Albert Grimaux, Lettre d’information de la Mission de France, 10, 21 février 1990 ; 294, mars 2007. — Séverin Montarello, Et pourquoi pas moi, Marseille, 1994, p. 85-86. — Tangi Cavalin et Nathalie Viet-Depaule « Catholiques engagés à Marseille », in Bruno Duriez, Étienne Fouilloux, Denis Pelletier, Nathalie Viet-Depaule (dir.), Les catholiques dans la République (1905-2005), Les Éditions de l’Atelier, 2005, p. 301-312. — Achille Galli, Le battoir [autobiographie inédite, 1999], p. 76-77. — Entretien avec Octave Favaro, juin 2004. — Notes de Roger Philippe, le 27 février et 11 mars 2009.

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