GATIGNON Louis, Georges, Alexandre

Par Daniel Grason, Claude Pennetier

Né le 25 janvier 1902 à Châteauroux (Indre), mort le 24 novembre 1974 à Paris (XIIe arr.) ; métallurgiste (ajusteur-mécanicien) dans le Cher ; secrétaire de la Région communiste du Centre ; syndicaliste CGT des Métaux.

Louis Gatignon
Louis Gatignon
Candidat aux élections législatives de 1936 dans le Cher

Louis Gatignon était issu d’une famille de petits commerçants vendant du tissu sur les marchés. Son père était libre penseur, mais ne faisait pas de politique. Ruinés par la guerre, ils travaillèrent ensuite comme ouvrier d’usine et moururent en 1932.
Louis Gatignon fréquenta l’école primaire publique de Châteauroux mais ses « études furent arrêtées par la guerre » (autobiographie de 1933) ; il entra à quatorze ans comme apprenti ajusteur à la compagnie de Paris-Orléans (février 1916-avril 1917). Il travailla ensuite dans les usines de guerre de Châteauroux, il y fit la connaissance d’Ernest Gazeaux* et d’un noyau de pacifistes qui diffusaient le journal La Vague. En 1918, Gatignon adhéra au syndicat des Métaux de Châteauroux. L’année suivante, il s’installa à Bourges et travailla aux usines Merlin : il prit part à la grève de mai 1920 et fut licencié. Il partit alors pour Paris et travailla chez Hubert. « A la suite des grèves de 1920 et par dégoût de la guerre », Gatignon adhéra en août 1920, au Parti socialiste et participa à la campagne pour l’adhésion à la IIIe internationale dans la section du Raincy (Seine-et-Oise) qu’il quitta en juillet 1921.
Après un passage de quelques mois à Chenonceaux (Indre-et-Loire), il travailla chez Charitat à Lury (Cher) de décembre 1921 à mai 1923. En 1922, réformé, il vint habiter à Vierzon (Cher) et créa en novembre, avec A. Briand et Lucien Barrat, la Jeunesse communiste de Vierzon, dont il fut secrétaire à partir de décembre 1923. Il était alors influencé par Auguste Gauvin* défenseur de la politique de Front unique et comme lui, il vota pour la motion Souvarine lors avant le congrès de Paris (octobre 1922). Après avoir suivi une école des JC à Saint-Denis, il lut et « étudia une grande partie des livres et brochures éditées par le PC depuis 1920 ». Il fut délégué au congrès national du Parti communiste tenu à Lille en juin 1926 et siégea au comité régional. En mai 1925, Gatignon succéda à Eugène Galopin* comme secrétaire de la XIIe entente des JC. Un article lui valuu une condamnation à deux mois de prison en 1925 (amnistiés) et il fit douze jours de prison pour sa participation à une manifestation de rue à Vierzon en 1926.
Élu membre du Comité central des JC en 1926, il appartint pour quelques mois, en 1928, au secrétariat national ; Pépin lui succéda alors comme secrétaire de la XIIe Entente. Gatignon ne resta que quelques mois à Paris où il refusa une place à la direction de la Fédération sportive du Travail (il animait le comité du Berry depuis 1924). De retour à Bourges, il participa aux réunions du bureau régional où il approuva l’exclusion de Maurice Boin. Ce dernier l’a décrit dans son roman inédit Les Cellulards sous le nom de Langlois « l’homme qui s’exprimait sur ce ton péremptoire faisait partie du bureau régional depuis quelques mois seulement. Le type de l’ouvrier jeune, bien bâti, fort en muscles, et qui le sait. Des cheveux drus, plantés bas sur le front. La taille élancée du sportif, bien prise sur les jambes nerveuses. L’air énergique, un tantinet vulgaire, dominateur. » (manuscrit pages 65 bis). Gatignon succéda à Maurice Boin comme administrateur appointé de l’Émancipateur de février 1929 à juillet 1933.
Aux élections législatives de mai 1932, il fut choisi au dernier moment comme candidat de la 1re circonscription de Bourges (celle de M. Boin en 1928) ; il obtint 11,8 % des suffrages des électeurs inscrits au premier tour, 3,1 % au second (Boin 1928 : 27 % et 30 %). À la suite d’un conflit entre A. Guillot et le Bureau politique (voir A. Guillot*), Gatignon lui succéda comme secrétaire de la Région du Centre, en juin 1933. Il reprit son travail d’ajusteur en 1935, par suite de la décentralisation de la Région. Aux élections législatives de 1936, à nouveau candidat à Bourges, il gagna des voix mais resta bien en deçà des pourcentages de 1928 avec 18,8 %. Il distançait cependant le député socialiste sortant Cochet et fut au deuxième tour le candidat du Front populaire, il obtint 42 % des suffrages des électeurs inscrits et fut battu par le « républicain de gauche » J. Massé.
Louis Gatignon, ajusteur dans les usines d’aviation de Bourges (SNCAC) anima la grève du 30 novembre 1938 et fut licencié. Resté six mois sans travail, il partit en avril 1939 à Nevers (Nièvre) pour travailler chez Thomson-Houston, laissant la direction de la Fédération Cher-Indre à Lagarde. La Fédération avait alors 4 900 adhérents groupés en 13 sections, 179 cellules locales et 38 cellules d’entreprise.
Arrêté le 3 juin 1940, il fut interné à Chibron, commune de Signes (Var). À la dissolution du camp, il fut envoyé le 16 février 1941 à Saint-Sulpice-la-Pointe dans le Tarn où étaient internés des communistes, des syndicalistes de la CGT, des anarchistes et des étrangers qualifiés d’indésirables, notamment des Allemands de confession chrétienne qui avaient été déchus de leur nationalité. Il s’évada le 14 juillet 1943, participa au bureau clandestin de la Fédération des Métaux. Dans son dossier Résistance, il apparaît comme membre du Front national, ce qui généralement recouvre un engament au PC clandestin.
Quelques mois plus tard, il accepta d’assumer la fonction de trésorier du bureau syndical des Métaux de la Région parisienne sous le contrôle de Félix qui était le secrétaire du bureau illégal du Syndicat des Métaux de la Région parisienne.
En mai 1944, il vivait légalement à Riousse, commune de Livry (Nièvre), mais habitait en fait sous la fausse identité de Raymond au 102 rue du Dôme à Boulogne (Seine, Hauts-de-Seine).
Le 3 mai 1944 Louis Gatignon fut interpellé à Paris sur la voie publique par des inspecteurs de la Brigade spéciale n° 1, alors qu’il était en compagnie de Félix Portet. Fouillé, il portait sur lui 2.000 francs, une fausse carte d’identité et un faux certificat de travail établis au nom de Raymond, ainsi que des documents manuscrits et dactylographiés, sur l’un figurait les noms et adresses de deux militants communistes de province.
Son domicile au 102 rue du Dôme à Boulogne (Seine, Hauts-de-Seine) a été perquisitionné. Les policiers saisissaient : 64 075 francs, il déclara que la somme appartenait au Parti communiste clandestin ; une fausse carte d’identité portant sa photographie au nom de Lachanel et de Raymond ; un lot de cartes d’alimentation et de feuilles de tickets de rationnement ; un reçu manuscrit du terme de la location d’un local qui servait à entreposer des tracts ; une fausse carte d’identité portant la photographie de Louis Gatignon au nom de Lachanel ; trois faux certificats de travail aux noms de Lachanel et Raymond ; un lot de cartes d’alimentation et de feuilles de tickets rationnement ; un reçu manuscrit du terme de location d’un local ; des bilans, états de frais et documents divers intéressait l’activité de l’organisation communiste au sein des sections syndicales de la Fédération clandestine du Syndicat de la métallurgie et un lot de tracts et circulaires édité par le Parti communiste clandestin.
Lors de son interrogatoire Louis Gatignon reconnaissait être membre du Parti communiste depuis 1920 et avoir été secrétaire régional du Cher de 1935 à décembre 1938. Il était appointé 2 500 francs par mois. Répertorié aux Archives centrales des Renseignements généraux, il faisait l’objet d’un mandat d’arrêt délivré par le Parquet de Castres à la suite de son évasion du camp de Saint-Sulpice la Pointe.
L’adresse du 2 Sentier de l’Égalité fut saisie sur Louis Gatignon, interrogé il affirma que ce local devait servir à entreposer du matériel de propagande du Parti communiste et de l’organisation syndicale ainsi que des machines à écrire et à ronéotyper.
Inculpés d’infraction au décret du 26 septembre 1939 Louis Gatignon et Félix Portet ont été mis à la disposition du Procureur de la République.
Il fut incarcéré à la prison de la Santé jusqu’à la Libération. Il fut incarcéré à la prison de la Santé jusqu’à la Libération, il a été homologué au titre de la Résistance intérieure française (RIF).
Louis Gatignon s’installa après la guerre dans la région parisienne rue Victor Hugo à Gennevilliers dans les Hauts-de-Seine et fut trésorier de la Fédération des Métaux jusqu’en 1963. Son épouse, Jeanne Gatignon née Rebardeau, couturière en 1933, mourut le 12 février 1999 à Gennevilliers, âgée de quatre-vingt-douze ans. Sa fille Michelle née le 24 avril 1929 à Vierzon épousa Roger Bourgoin, militant de la CGT et du Parti communiste à la SAVIEM à Saint-Ouen, puis à Suresnes (Hauts-de-Seine), elle mourut le 14 janvier 2019 à Gennevilliers. Son fils, Claude Gatignon, né le 4 août 1931, ajusteur, eut d’importantes responsabilités aux Jeunesses communistes dans les années cinquante (secrétaire fédéral, membre du bureau national), au P.C.F (secrétaire fédéral à l’organisation du Val d’Oise de 1966 à 1969), puis maire-adjoint à Argenteuil dans la municipalité de Robert Montdargent. Il mourut le 13 juin 2003 dans sa 72e année et fut enterré au cimetière de Livry (Nièvre). Son petit-fils, Stéphane Gatignon, historien, communiste refondateur, fut un des responsables de la revue Futur dans les années quatre-vingt-dix puis maire de Sevran (Seine-Saint-Denis).
Le département du Cher, n’a pas oublié Louis Gatignon, le centre de formation professionnelle de Vierzon porte son nom. Depuis le 3 février 2020 ce centre a été installé dans des nouveaux locaux à Vierzon. « Il peut accueillir douze stagiaires, avec une priorité pour les demandeurs d’emploi ». Dans le même lieu, il y a également le conservatoire national des arts et métiers (CNAM), un espace de formation de la société Honeywell, Forma Santé et Aksis.
Le journal Le Berry Républicain précisait que ce centre n’était qu’un « un des éléments du centre de réadaptation professionnelle et sociale situé à Vouzeron » dans le même département.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article50527, notice GATIGNON Louis, Georges, Alexandre par Daniel Grason, Claude Pennetier, version mise en ligne le 17 août 2021, dernière modification le 22 février 2022.

Par Daniel Grason, Claude Pennetier

Louis Gatignon
Louis Gatignon
Candidat aux élections législatives de 1936 dans le Cher
Les candidats communistes du Cher aux élections législatives de 1936
Les candidats communistes du Cher aux élections législatives de 1936
Louis Gatignon, Gaston Cornavin, Jules Bornet, Joseph Millerioux
Photographie GB 152 (Arch. PPo DR.)
Photographie GB 152 (Arch. PPo DR.)

SOURCES : RGASPI, Moscou, 495 270 4724. — Arch. Nat. F7/13090. — Arch. Dép. Cher, 20 M 46-47. 25 M 127-128. — I.M.Th., bobines 120 et 122. — Bureau Résistance GR 16 P 245697. — L’Émancipateur, 1922-1939. — Claude Jamet*, Notre Front populaire, journal d’un militant 1934-1939, La Table ronde, 1977, p. 32. — Arch. dép. Var 4 M 291 et 292, notes de Jacques Girault et Jean-Marie Guillon. — Témoignage de Louis Gatignon.

Photographies : Arch. PPo. (D.R.)

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