GUERROUDJ Abdelkader dit Djilali

Par René Gallissot

Mort le 7 novembre 2020 à Alger ; instituteur, associé à l’organisation des groupes paysans par le Parti communiste algérien dans sa région natale de Tlemcen ; expulsé en 1955, revient diriger avec Yahia Briki les commandos du grand Alger en liaison avec le FLN ; arrêté à la fin de 1956 et condamné à mort au procès des Combattants de la libération (groupes du PCA) en décembre 1957 ; à l’indépendance, membre du FLN ; en rupture depuis le coup d’État du 19 juin 1965 du colonel Boumedienne.

C’est dans les villages autour d’Aïn Fezza où il était instituteur, à 11 kms au nord-est de Tlemcen qu’A. Guerroudj participa à l’organisation et aux luttes des groupes paysans suscités après 1945, par le PCA ; ces petits paysans comme les frères Berrahou* des villages comme Chouly ou Ouchba s’associaient aussi aux actions et souvent aux grèves des ouvriers agricoles du vignoble un peu plus au sud autour de Descartes (Ben Badis) et Lamoricière (Aïn Nahala) pénétré dès avant 1936 par le syndicalisme agricole des activistes communistes venant de Tlemcen comme les frères Badsi*. Ces communistes paysans furent parmi les premiers à monter au maquis en 1955 sans attendre les instructions du PCA. En 1950, A. Guerroudj épousa Jacqueline Netter qui venait d’être déplacée comme institutrice à Aïn Fezza. Dans sa dernière campagne électorale en mars-avril 1955, le PCA présenta A. Guerroudj comme candidat au conseil général ; avec Ahmed Akkache* dans l’Algérois, Laïd Lamrani* dans les Aurès, il fut un des orateurs communistes qui osèrent parler de lutte armée pour l’indépendance au-delà des mots d’ordre du parti. Le préfet d’Oran expulsa en France en avril 1955 le couple Guerroudj « agitateurs communistes notoirement connus ».

Tandis que Jacqueline Guerroudj et leurs enfants, nés de mariages précédents, séjournaient plus longuement près de Carmaux accueillis par des camarades communistes, A. Guerroudj revint d’abord à Tlemcen alors que les communistes des groupes paysans passèrent au maquis ; il fut ensuite appelé à Alger quand le PCA envisagea après juin 1955 de constituer ses propres groupes armés. Ainsi A. Guerroudj alla se retrouver aux côtés de Yahia Briki qui était déjà sorti d’Alger républicain avant toute directive du PCA en se joignant au FLN ; rejoignirent ensuite des militants envoyés par le PCA et lui restant attachés comme G. Acampora*, J. Farrugia*, et plus tard F. Iveton et J. Salort*. En février 1956, A. Guerroudj était à la tête du commando d’Alger-nord. ; il aurait dû participer au détournement d’armes par l’aspirant Henri Maillot ; mais il fut arrêté quelques semaines avant puis relâché.

L’opération Maillot, début avril 1956, fut suivie sous le nom de Combattants de la libération, de la mise en place du noyau d’un maquis proprement communiste dans le massif de l’Ouarsenis, détruit en juin alors que le PCA négocia et signa ensuite à Alger avec le FLN, l’accord de ralliement individuel de ses militants à l’ALN. Le rôle d’A.Guerroudj grandit à la direction des commandos d’Alger qui exécutèrent quelques sabotages et attentats, mais ne réussirent pas celui contre le général Massu à la fin de 1956. Placé sous les ordres de Yacef Saadi qui commandait à la Casbah au titre du FLN, A. Guerroudj fut arrêté en janvier 1957 une quinzaine de jours avant la grève de 8 jours à la fin du mois qui marqua les débuts du terrible écrasement de la Résistance par la Bataille d’Alger.

Tandis qu’en mars-avril 1956, le PCA entendait disposer de ses propres groupes armés, à Paris les députés du PCF venaient de voter le 12 mars, les pouvoirs spéciaux accordés au gouvernement de Guy Mollet* pour « le maintien de l’ordre en Algérie ». Le PCF envoya du reste un membre de sa section coloniale, Georges Thévenin*, défendre ses positions. Dans les discussions en juin 1956, avec la direction politique du FLN à Alger (Ramdane Abane* et Benyoussef Benkhedda*), la direction clandestine du PCA (Bachir Hadj Ali* et Sadek Hadjerès) firent valoir la participation communiste aux groupes armés dont celle d’A. Gherroudj. Celui-ci tint alors à marquer ses distances avec le Parti communiste en affirmant son choix de la lutte armée et du FLN. Dans sa lettre rendue ensuite publique, on peut lire : « Si le PCA s’était décidé à faire [… ] le geste nécessaire, à savoir sa dissolution, il aurait non seulement donné une preuve de courage politique, mais il aurait également contribué à rendre plus complète l’unité du peuple algérien en lutte… » ; A Guerroudj alla jusqu’à parler de l’égarement des dirigeants communistes.

En décembre 1957 au procès dit des Combattants de la libération, Abdelkader et Jacqueline Guerroudj furent condamnés à mort ainsi qu’Abderrhamane Taleb, l’artificier des commandos, qui fut guillotiné le 24 avril 1958. Les Guerroudj furent épargnés. Après l’indépendance, A. Guerroudj devint président du conseil d’administration de la SNCFA avant la cassure du coup d’État du 19 juin 1965.

Il est décédé le 7 novembre 2020 et a été inhumé à Alger le même jour.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article50826, notice GUERROUDJ Abdelkader dit Djilali par René Gallissot, version mise en ligne le 14 juillet 2009, dernière modification le 19 octobre 2021.

Par René Gallissot

SOURCES : A. Haroun, La 7e Wilaya : la guerre du FLN en Franc, Le Seuil, 1986. – H. Khatib, 1er juillet 1956 : l’accord FLN-PCA et l’intégration des « Combattants de la libération » dans l’Armée de Libération Nationale en Algérie, OPU, Alger 1991. —J. Guerroudj, Des douars et des prisons, Bouchène, Alger 1993. — S. Kastell, Le Maquis rouge. L’aspirant Maillot et la guerre d’Algérie, 195, L’Harmattan, Paris, 1997. — Notes de Jean-Pierre Ravery.

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