LACOSTE Étienne. Pseudonyme GARRIGUE-GARRONE

Par Jean Maitron et Claude Pennetier révisé par François Ferrette

Né le 21 août 1886 à Bordeaux (Gironde), mort le 17 juin 1957 à Pau (Basses-Pyrénées) ; militant syndicaliste des cheminots Paris-État rive droite, membre de la commission administrative de la Fédération communiste des soviets, poète sous le nom de Garrigue-Garonne.

Un poème d’Étienne Lacoste. WWW.delcampe.net

Fils de Denis Lacoste, sergent à la 18ème section des commis ouvriers, et de Camille Antoinette Huguet, institutrice, Étienne Lacoste s’engagea comme volontaire au 16e Régiment d’Infanterie le 21 août 1904 et en revint avec le grade de sergent. Il entra aux chemins de fer le 26 juillet 1910 comme piqueur d’abord à Chartres puis à Paris en 1911. Mais le service médical de la compagnie de chemin de fer le réforma le 9 octobre 1912 pour dégénérescence mentale. Son état s’étant amélioré, il reprit ses activités professionnelles le 3 février 1913 et nommé chef de district en avril à la gare Montparnasse. À la mobilisation, il a été maintenu aux chemins de fer comme « affecté spécial ». Il fut maintenu dans cette position pendant toute la guerre. En décembre 1917, il s’affirma comme anarchiste dans une réunion syndicale. Au cours de la guerre il assista aux réunions de la fédération des cheminots et critiqua l’union sacrée et la timidité revendicative des dirigeants de la CGT.

Il s’intéressait à la presse et écrivit dans nombre de publications. À la date du 24 février 1918, Garrigue-Garonne, membre fondateur de l’Union Indépendante des Écrivains, à la suite de divergences survenues au sein de ce groupement s’est désolidarisé de l’organe de cette union : Les Écrits Libres. Il déployait une activité journalistique importante et trouva à s’exprimer dans des revues et journaux aussi divers que le Libertaire, La Vague, La Vérité, la Mêlée, Les Humbles….

Engagé dans le mouvement révolutionnaire, il fut membre du Comité de la IIIe Internationale et au parti communiste formé par des libertaires en mai 1919. En la fin de cette année, il était membre du Soviet central provisoire en qualité de délégué du Soviet du Ve arr. Il suivit Henri Bott, Camille Fabre et Jacques Sigrand dans l’autonomie le 6 février 1920. Ceux-ci formèrent une organisation structurée qui prit le nom de Parti communiste, section de l’Internationale communiste de Moscou. Poursuivi par la police vers mai 1920, Lacoste se réfugia chez son ami Wullens et réussit à passer en Russie en 1921. Il proposa ses services au comité de la IIIe Internationale pour être intermédiaire avec les bolcheviks. Il semble qu’il ne soit revenu en France qu’après plusieurs années.
Etienne Lacoste, organisé des réunions du club littéraire de la Voie lactée à son domicile, dont les invités étaient, entre autres, Akhmatova et Maïakovsky.
Proche d’Anna Alexandrovna Lunacharskaya qui était à la tête de l’industrie du cirque de l’URSS, il écrivit sur les arts du cirque.
Dans un livre en russe de Galperin Yuri Manuilovich, on découvre cette évocation des milieux que fréquentait Étienne Lacoste : " L’appartement de Kozlovsky Lane était familier à beaucoup à l’époque : les journalistes de Gudok, où Khariton Nikanorovich collaborait parfois, le correspondant de L’Humanité et ses amis du Komintern, qui visitaient volontiers la maison où la joyeuse propriétaire et l’hôtesse parlent couramment le français, ils connaissent l’allemand. « Nous n’avons jamais vécu aussi intéressant et amusant que ces années-là », se souvient Tatyana Aleksandrovna Slavorossova plus d’un demi-siècle plus tard dans des lettres de Piatigorsk. - Khariton Nikanorovich avait un ami, Etienne Lacoste, un communiste qui a émigré de France. Deux fois par mois, nous rassemblions nos amis politiques émigrés pour des soirées, les appelant « Voileakte » - « Voie lactée ». Nous lisons de la poésie et de la prose, chantons la Marseillaise avec l’accompagnement de Khariton. Un couple marié italien a joué de l’harmonica, puis ils ont tous chanté Stenka Razin en chœur. Les paroles de la chanson ont été traduites en français par le même Etienne. Parfois, Anna Alexandrovna Lunacharskaya a visité. Le poète Vasily Kamensky, une personne inhabituellement spirituelle et joyeuse, est souvent venu nous voir. " (communiqué par Mr Gubenko E., Russie, février 2021).

Nous connaissons surtout ses activités moscovites que par le journal de Pierre Pascal qui ne le ménagea pas : « De pareils antécédents lui ouvrirent la Russie, où ses talents impressionnèrent Lounatcharski au point qu’il le donna comme précepteur à ses enfants. Il vécut d’ailleurs un temps au domicile du couple Lounatcharski. Pour les délégués français à Moscou, il était le « fou » dont tour à tour on s’amusait, s’inquiétait ou s’apitoyait ». Il cite à l’appui une lettre circulaire datée du 16 novembre 1927 où Lacoste, très exalté, se plaçait en arbitre dans l’affrontement entre Staline et l’Opposition. Le 25 décembre suivant, il fit irruption au Music-hall de Moscou en criant « Vive la révolution chinoise ! Vive le vice-ministre de Canton, Khasis ! Je suis Lacoste ». Pierre Pascal écrit dans son journal à la date du 31 décembre 1927 : « On assure que Lacoste a été interné après l’incartade de l’autre soir. C’est fou, plus fou encore que lui, et méchant ».

Il revint en France en novembre 1928 et était accompagné d’un certain A. Terechkovitch, qui se présentait comme médecin en chef de l’asile pour aliénés à Moscou missionné par l’hôpital du Kremlin. Ce médecin écrivit au préfet de police de Paris un courrier en date du 27 décembre 1928 (dont une copie se trouve dans son dossier de police) demandant à ce qu’un suivi médical soit assuré pour Étienne Lacoste et même un internement. Lacoste quitta Paris pour se fixer chez ses parents à Saint-Cirq-du-Bugue (Dordogne). En 1930, il réclamait des dommages et intérêts à l’URSS sans qu’on en connaisse la raison.

En 1933, il fut arrêté par la police alors qu’il allait perturber l’inauguration de la rue Paul-Doumer par Albert Lebrun, Président de la République. La police le fouilla et découvrit un pistolet et constata une aliénation mentale. Elle l’orienta vers une infirmerie spéciale du dépôt.

Il écrivit le 14 mars 1938 à l’ambassadeur d’URSS en France pour demander grâce au présidium soviétique alors que Boukharine et Rikov devaient être exécutés à la suite du troisième procès stalinien qui s’était déroulé du 2 au 13 mars 1938.

Il se confond avec le Lacoste dont Doriot annonça l’exclusion lors du Comité central du 31 janvier 1926. Il était accusé de s’être solidarisé avec Souvarine.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article5394, notice LACOSTE Étienne. Pseudonyme GARRIGUE-GARRONE par Jean Maitron et Claude Pennetier révisé par François Ferrette, version mise en ligne le 2 septembre 2015, dernière modification le 5 avril 2023.

Par Jean Maitron et Claude Pennetier révisé par François Ferrette

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Un poème d’Étienne Lacoste. WWW.delcampe.net

ŒUVRE : « La Chaine aux Anneaux brisés », Les Humbles, Cahier n° 7, novembre 1919 — En 1921, guerre capitaliste ou guerre révolutionnaire, 1921. 76 p. (inédit). — Du Front unique en France, 1922, 25 p. (inédit) — Suggestions concrètes corollaires de l’étude analytique des forces actuelles futures de la politique impérialiste française et de la politique communiste révolutionnaire, 1922. 24 p. (inédit). — Thèse sur l’organisation d’un front unique économique prolétarien, 1922, 43 p. (inédit).

SOURCES : Arch. Nat. F7 : 1994 0459/15/1372 (dossier Lacoste). — Bibliothèque marxiste de Paris, microfilms 6, 7, 22, 37, 128, 141 (contiennent en particulier les textes de ses manuscrits inédits). — Communisme, 1920. — Boris Souvarine, Autour du congrès de Tours, Paris, Champ libre, 1981, p. 27. — Annie Kriegel, Aux origines du communisme français, op. cit. — Pierre Pascal, Journal, op. cit. — Christiane Jospin-Magry, Les anarchistes, la révolution russe et l’expérience soviétique en France (1914-1921), Mémoire de Maîtrise, Paris I, 1975. — État civil. — Notes de Evgenij Gubenko, Russie, février 2021.

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