DUPONT Aminthe [DUPONT Jean, Martial, Aminthe]

Né le 1er juin 1841 à Saint-Thomas-de-Conac, arrondissement de Jonzac (Charente-Inférieure), mort en 1890 ; employé de banque, homme de lettres ; élu membre de la Commune de Paris ; après la défaite, « il s’est fait admettre [à Londres] dans la section française dissidente de l’Internationale » ; déporté en Nouvelle-Calédonie.

De 1865 à 1870, Aminthe Dupont fut employé au Crédit foncier et habitait rue Brochant, XVIIe arr. Il habita également, 14 rue des Fermiers, dans le même arrondissement, où il vécut avec la sœur du futur membre de la Commune, Charles Gérardin. Bien qu’apparemment non mariés, ils eurent un fils vers 1867 ; c’est chez lui que, sur une provocation policière, furent arrêtés les inculpés du procès de Blois ; lui-même fut condamné en juillet à quinze ans de prison.
Mais le 4 septembre 1870 le libéra et on l’élut conseiller municipal du XVIIe arr. ; il résigna ses fonctions pour devenir commissaire de police. Il écrivait dans le Combat et dans le Vengeur. Avec ses amis du Comité central des vingt arrondissements, auquel il appartenait, il présenta, le 15 septembre, les mesures d’urgence que le gouvernement de la Défense nationale aurait dû, selon les signataires, se hâter « de transformer en décrets pour le salut de la patrie et de la République ». Ces mesures intéressaient la sécurité publique, les subsistances et les logements, la défense de Paris et des départements — Voir Charles-Louis Chassin.

Le 18 mars 1871, il prit parti pour la Commune, et fut nommé commissaire de police de l’Hôtel de Ville, puis, le 23, chef de la police municipale. Les employés de la Préfecture qui, par ordre, restèrent à Paris pendant la Commune, « n’ont pu articuler aucun fait précis à la charge de Dupont ». On cite même, écrit l’auteur du rapport (Arch. Nat., BB 24) « un trait de probité à sa louange » relatif à un vol de 10.000 F : la somme retrouvée fut restituée par Dupont au propriétaire.
Aminthe Dupont, élu membre de la Commune aux élections du 16 avril (3 450 voix du XVIIe arr.), fut délégué à la mairie du XVIIe arr. et au Comité de Sûreté générale (21 avril) ; en relations avec Félix Pyat et Théophile Ferré, il vota pour le Comité de Salut public et contre la mesure frappant les otages ; il parla quelquefois au club de l’église Sainte-Marie des Batignolles. Le 21 mai, on le rencontra ceint de son écharpe rouge, inspectant les barricades de Montmartre ; puis il se réfugia chez la mère de son secrétaire Müller, 3, rue Crozatier, XIIe arr., s’y cacha deux mois, puis réussit à passer en Angleterre.

Fixé à Londres, il fut marchand de denrées pour l’exportation. Il collabora au Qui Vive ! d’Eugène Vermersch, 3 octobre-11 décembre 1871 ; membre « de l’Internationale purement française et seulement depuis que j’étais à Londres », écrit-il ; il fut accusé par certains compagnons d’exil de relations avec Napoléon III et protesta dans le Vermersch-Journal. Il appartenait à la section fédéraliste française de 1871 (cf. Dictionnaire, t. IV, p. 78).
Le 18 mars 1872, il présida un meeting commémoratif de la Commune, puis, peu de jours après, vint à Paris et fut arrêté.

Sa femme, qui se fit institutrice à Londres, dans une requête du 9 mars 1879 au président de la République, requête appuyée par Georges Clemenceau, expliquait ainsi le retour en France de son mari : « Monsieur le Commissaire du gouvernement me traita dans son réquisitoire de fille vivant en concubinage avec celui que tout le monde savait mon mari. Ce fut après cet outrage que mon mari perdit toute contenance. Le malheureux se dressa pour défendre l’honneur de sa femme, celui de toute sa famille. » Une autre explication est donnée qui paraît, partiellement du moins, plus vraisemblable : « Les papiers saisis sur lui ne laissent aucun doute sur le but qu’il venait y poursuivre [à Paris]. Il n’était entré dans l’Internationale que pour la connaître et neutraliser son action dans l’intérêt de sa propre ambition. Sous prétexte de réunir à Paris des commanditaires pour une société commerciale, il se proposait (voir son interrogatoire du 6 juillet) de créer une section particulière à l’aide de laquelle il amènerait le pouvoir à composer avec lui, obtiendrait une amnistie partielle dont il bénéficierait personnellement tout en provoquant une hostilité suffisante pour faire réussir sa candidature à l’Assemblée nationale. » Sans nourrir des projets aussi précis, Dupont, plein d’illusions sur les possibilités réelles d’action, était sans doute venu à Paris pour impulser le mouvement et peut-être agir en vue de la préparation du congrès de La Haye.
Le 5e conseil de guerre — devant lequel il eut « une attitude hautaine et dédaigneuse » et manifesta « avec ostentation, à plusieurs reprises, la résolution inébranlable d’entretenir toujours et quand même une lutte à outrance contre la société actuelle » — le condamna à la peine de mort, le 26 juillet 1872, pour « envahissement » d’une maison avec violences et menaces, séquestration et complicité d’assassinat d’otage. Sa peine fut commuée le 18 novembre suivant, en travaux forcés à perpétuité.
Après une détention du 10 février au 18 avril 1873 au bagne de Toulon, il fut embarqué sur le navire Loire et arriva au bagne de l’Ile Nou sous le n° matricule 5192 le 23 juillet 1873. Il quitta le bagne de Nou le 6 avril 1880 après que sa peine ait été commuée en bannissement de 10 ans le 9 juin 1879.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article58334, notice DUPONT Aminthe [DUPONT Jean, Martial, Aminthe], version mise en ligne le 26 juillet 2009, dernière modification le 4 avril 2022.

SOURCES : Arch. Nat., BB 24/766, n° 7847. — Arch. Nat., H colonies 153. — Arch. Min. Guerre, 5e conseil, dossier 590. — Procès-Verbaux de la Commune de 1871, op. cit. — Roger Pérennès, Déportés et forçats de la Commune, Nantes, Ouest éditions, 1991. — Base de données des dossiers individuels de condamnés au bagne (Archives nationales d’outre-mer). — Note de R. Scherer.

ICONOGRAPHIE : Arch. PPo., album 286-43.

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