Par Jean-Luc Pinol
Né le 18 juin 1877 à Brest (Finistère), mort le 22 août 1956 à Clichy (Seine, Hauts-de-Seine) ; cheminot, chaudronnier ; secrétaire de la Fédération nationale des travailleurs des chemins de fer.
Fils d’un chaudronnier au port de Brest, Paul Le Guen se maria en 1899 à Brest puis en 1914 à Paris (XVIIe arr.). Domicilié à Paris XVIIe arr., il succéda à Marcel Bidegaray, comme secrétaire de la Fédération nationale des travailleurs des chemins de fer. Il se retira en avril 1914 pour raisons de santé et fut remplacé par ce dernier. Le Guen siégea au comité consultatif et au comité de l’exploitation technique des chemins de fer pendant la Première Guerre mondiale.
Secrétaire de l’Union des syndicats de cheminots du Réseau État de 1917 à avril 1920, il appartenait à la tendance majoritaire. Lors du congrès fédéral d’avril 1920, il fit le procès de Lucien Midol. Bien que majoritaire et présenté souvent comme second de Marcel Bidegaray, il divergeait avec celui-ci sur un point : la participation aux comités d’exploitation des réseaux, créés sur ordre du gouvernement en octobre 1919. Les minoritaires profitèrent du désaccord entre les deux représentants syndicaux du réseau pour faire condamner la participation. Paul Le Guen était un majoritaire modéré. Il s’était efforcé après la grève de février 1920 d’obtenir l’amnistie des sanctions frappant les minoritaires tels Henri Sirolle, Jacques Sigrand et Jules Dejonkère. En avril 1920, Joseph Lardeux, minoritaire, le remplaça comme secrétaire du réseau. Néanmoins, une fois les dirigeants minoritaires arrêtés ou en fuite, et en particulier Henri Sirolle, on fit appel à Paul Le Guen pendant la grève de mai 1920. Paul Le Guen, qui venait de perdre son fils, début mai, accepta. Il fut révoqué en même temps que Marcel Bidegaray le 12 mai. Il fut réélu au secrétariat fédéral par décision du conseil d’administration le 13 juin. Au congrès confédéral d’Orléans, en septembre-octobre 1920, Le Guen fit le procès des minoritaires : « Vous êtes partis dans cette bataille sans tenir compte exactement de la pensée de la masse. Oui, il y avait un mécontentement général parmi la masse, mais ce n’était pas un sentiment révolutionnaire, ce n’était pas le désir de chambardement général. Il était plus bas que cela, le sentiment de mécontentement de la masse des cheminots, il venait de la non-application de l’échelle des traitements, du statut du personnel, des revendications. »
En 1923, après la scission syndicale, Marcel Bidegaray considérant les attaques unitaires à son égard comme trop vives, ce fut Paul Le Guen qui succéda à Adolphe Montagne comme secrétaire, Marcel Bidegaray étant délégué général. Paul Le Guen resta secrétaire fédéral jusqu’en janvier 1926, date à laquelle il fut remplacé par Jean Jarrigion, officiellement pour raisons de santé. Le rapport de police du 21 janvier commente ce changement en ces termes : « Le Guen est un militant très estimé, beaucoup de ses camarades s’accordent à lui reconnaître des qualités de jugement mais lui reprochent un peu de mollesse... Depuis longtemps, il manifestait l’intention de ne pas continuer ses fonctions qu’il n’avait acceptées que pour permettre à la Fédération de sortir d’une situation difficile. » Quant à la Révolution prolétarienne, elle voyait en lui un « réformiste qui a le souci de l’organisation », très différent du « politicien syndical » Bidegaray.
En 1927, Le Guen resta secrétaire du syndicat confédéré des cheminots de Paris-État, rive droite. Le bureau syndical comprenait Le Pêcheur, Launay et Picard. Lors du congrès fédéral de 1930, il s’associa aux vives critiques que Marinace fit au rapport moral. Le Guen vota contre le rapport mais entra à nouveau au bureau fédéral, comme trésorier adjoint. Sa fédération l’avait délégué à tous les congrès nationaux jusqu’en 1931. Il fut membre du Conseil national économique de 1925 à 1935 au titre du travail salarié (transports).En 1938, il fit partie, comme membre suppléant, du conseil fédéral. Il représentait les retraités. Il vécut dans le XVIIe arr. jusqu’à son décès survenu en 1956.
Par Jean-Luc Pinol
SOURCES : Arch. Nat. F7/13053, F7/13602, 13675 et 13677. — Comptes rendus des congrès fédéraux 1920, 1930, 1932, 1934 et 1938. — Le cheminot de l’État. — La Révolution prolétarienne, n° 14, février 1926. — A. Kriegel, Aux origines..., op. cit.— Notes de G. Ribeill. — État civil de Brest. — La CGT, op. cit. — Renseignements oraux.