Par Jean Maitron, Pierre-Henri Zaidman
Né le 18 mars 1819 à Pinczow (Pologne), mort à Paris le 25 janvier 1901 ; relieur ; communard.
Fils d’Auguste Kazdanski et de Marie Dobrowwolska, Jules Kazdanski aurait été condamné par contumace en Pologne en 1862 à 12 ans de travaux forcés (il prétendait avoir été acquitté) mais devant le conseil de guerre est invoqué une condamnation à mort. Echappant à la justice russe, il s’était réfugié en France. Il était marié mais vivait en concubinage et avait deux enfants ; relieur-papetier il était domicilié à Marseille, 12, chemin de la Belle-de-Mai en 1870. À la déclaration de guerre contre la Prusse, il s’enrôla dans les francs-tireurs de la guérilla d’Orient dans la 2e brigade de l’armée des Vosges et prétend avoir reçu la Légion d’honneur des mains de Józef Hauke-Bosak pendant la campagne de l’Est ; on l’accusa de l’avoir usurpée. Son corps ayant été licencié à Macon (Saône-et-Loire), il reçut une feuille de route le 12 mars et vint à Paris où il arriva le 17 ou le 18 mars du matin « pour voir ces Parisiens mangeurs de chats » ; il fut arrêté ce même jour et conduit à Jaclard, qui, le sachant Polonais, le fit libérer.
Portant un uniforme de francs-tireurs, il aurait été nommé le 18 mars au matin adjudant de place dans la XVIIIe légion de la garde nationale fédérée. Il avoua finalement avoir été rue des Rosiers (XVIIIe arr.) et avoir essayé de s’interposer en faveur de Clément Thomas. Il resta ensuite capitaine de place et officier d’ordonnance de Wroblewski ; il habitait à Montmartre, place de la Mairie. Il fut arrêté le 1er juin et déclara : « Si je suis fusillé je mourrai en homme et en soldat. Je jure sur les cendres de mon père et de ma mère que je suis innocent ».
Le 6e conseil de guerre le condamna, le 18 novembre 1871, à la déportation simple « pour avoir sans droit ou motif légitime pris le commandement d’un poste ou d’une troupe avec circonstances atténuantes ». Sa peine fut confirmée par le Conseil de révision le 7 décembre 1871 et commuée en dix ans de bannissement par décision du 28 avril 1872. Il fut conduit à la frontière suisse et gagna Cracovie en Pologne où il essaya de fonder une librairie. Il fut expulsé par la police autrichienne. Il se rendit ensuite en Italie puis à Londres et tenta en vain d’avoir des secours de l’ambassade d’Autriche. Il arriva le 16 mai 1875 en Belgique. Il avait également été condamné par contumace le 26 août 1872, sous le nom de Jules Hadranski à la déportation dans une enceinte fortifiée « pour avoir porté des armes étant revêtu d’un uniforme militaire, exercé illégalement un commandement dans les bandes armées et port illégal de décoration ». En 1875, il se présenta à la police de Maubeuge et justifia son retour par la misère. Il s’en expliqua ainsi : « J’ai demandé vainement des secours à mes coreligionnaires de Genève. Gaillard m’a envoyé à la « Marmite sociale ». Quand j’ai entendu parler de marmite, vous pensez, mon président, j’ai été bien content ; mais il n’y avait rien dedans. Quand j’ai vu que la « Marmite » ne contenait rien à manger, j’ai été trouvé le citoyen Jaclard, ancien colonel de la Commune. Jaclard m’a envoyé promener. Je lui ai alors expédié deux témoins, deux Polonais, pour lui proposer de me battre en duel avec lui. Le colonel a refusé ». Il fut considéré comme étant en rupture de ban, et le 3e conseil de guerre le condamna, le 30 août 1875, à six ans et six mois de détention avec rectification de l’arrêt de 1872 ; il subit sa peine à Thouars (Deux-Sèvres) ; remise lui fut faite de deux ans et six mois le 16 mai 1878, puis du reste le 12 décembre 1878. Il habitait Bruxelles en 1879 et se fit refuser toute aide par le Comité d’aide aux amnistié en raison de ses déclarations contre les accusés des exécutions de la rue des Rosiers. Il fut alors soutenu par Le Figaro. Il mourut à Paris le 25 janvier 1901.
Voir W. Wroblewski.
Par Jean Maitron, Pierre-Henri Zaidman
SOURCES : Arch. Nat., BB 24/736 et BB 27. — Arch. Min. Guerre, 3e conseil. — Arch. PPo., listes d’amnistiés. — Gazette des Tribunaux, 5 novembre 1871. — Arch. gén. Roy. Belgique, dossier Sûreté n° 292.090 (ou 1880). — La Presse, 12 septembre 1875. — Le Gaulois, 11 septembre 1875 ; Le Figaro, 23 et 24 septembre 1880.