KINCELER Jules [Kinceler Pierre, Jules, Philéas]

Par Michel Cordillot, Jean-Paul Damaggio

Né le 19 août 1845 à Lauzerte (Tarn-et-Garonne), mort le 9 février 1906 à Paris (XVe arr.) ; rédacteur au Réveil de Delescluze ; secrétaire de Cournet et directeur des vivres à la Marine pendant la Commune de Paris.

Biographie nouvelle 14 avril 2016

Jules Kinceler, homme debout au fond
Jules Kinceler, homme debout au fond
Communiqué par Jean-Paul Damaggio

Fils de Louis Kinceler, marchand, âgé de 33 ans, domicilié à Lauzerte, et Victorine Mourgues, sans profession, âgée de 22 ans, Jules Kinceler fut élevé dans la loi républicaine par son père, d’esprit très libéral. Il mit rapidement toute la fougue de sa jeunesse au service des luttes électorales contre l’Empire : en 1863 et en 1864, il fut condamné à des amendes en correctionnelles pour outrages à un culte reconnu par l’État, et rébellion à l’autorité.
Confié en 1866 à l’ex-proscrit du 2 décembre de Moissac Victorin Chabrié, Jules Kinceler monta à Paris, fréquenta les cafés la Jeune France et Le Madrid, où se retrouvaient sur les boulevards les rédacteurs des journaux avancés et la jeunesse républicaine. Grâce à son ami d’enfance Léon Gambetta, il se lia rapidement avec Jules Vallès, Arthur Ranc, Charles Quentin, Victor Noir, Ernest Picchio, Étienne Carjat, etc.
En 1867, Jules Kinceler était rédacteur au journal républicain Le Réveil. Arrêté pour complot contre la sureté de l’Etat, il subit trois mois de prévention à Mazas et bénéficia de l’amnistie du 15 août. Le 2 novembre, il fut l’un des organisateurs de manifestations publiques contre le régime sur la tombe de Manin et celle de Godefroy Cavaignac, et fut arrêté avec Frédéric Cournet, Jules Lermina, Victor Noir et autres. Il fut défendu par Gambetta, qui devait prononcer peu après sa fameuse plaidoirie en faveur de Charles Delescluze dans l’affaire Baudin.
Fin 1869, Jules Kinceler habitait 4, rue Biscornet (XIIe arr.) et fréquentait les réunions publiques. Le 11 novembre 1869, il déclara par exemple lors d’une assemblée : « Vous savez que dans la troisième circonscription, on va porter le citoyen Ledru-Rollin. » À peine ces mots avaient-ils été prononcés, que le commissaire de police se leva et déclara la réunion dissoute.
En 1870, il figura parmi les inculpés du procès de Blois. Mais il parvint à gagner la Belgique avec l’aide de Léon Cladel, avant de revenir crânement reprendre son poste au Réveil à Paris.

Proche collaborateur de Delescluze pendant le Siège, il servit la Commune comme secrétaire de Frédéric Cournet et fut brièvement employé aux vivres de la marine sous les ordres du délégué de la marine, Émile Latapie.
Pendant la semaine sanglante, Jules Kinceler resta aux côtés de Delescluze jusqu’à ce que dernier se fasse tuer le 25 mai place du Château d’Eau (de la République). Kinceler suivit alors la retraite des troupes fédérées en direction du Père-Lachaise. De là, il parvint à gagner le bois de Vincennes, puis la Suisse. Arrivé à Genève il fréquenta comme beaucoup de proscrits le Café du Nord, jusqu’à l’arrestation de Eugène Razoua dans ce même café. Le 24 juillet 1872, il reçut à déjeuner à son domicile genevois, Vuillaume, Puissant et Arthur Arnould.

Il partit ensuite à Lugano, puis à Milan (Italie). En 1874, il gagna l’Angleterre et embarqua pour Buenos Ayres (Argentine), où il créa plusieurs journaux : El Plata industrial y Agricola, La Boca d’Hierro (La bouche de fer) et La Familia.
De retour à Paris en 1881, il gagna sa vie comme représentant de commerce, puis comme négociant. Installé rue de Bellefond (IXe arr.), il se maria le 4 juin 1883 avec Mlle Villemot, sage-femme.
Il ne semble plus avoir eu d’activités militantes marquantes, mais preuve qu’il n’avait pas tourné le dos à ses valeurs, il figura parmi les signataires de la pétition Dreyfus (L’Aurore, 29 novembre 1898), et versa son écot à la souscription pour le monument à Zola (L’Aurore, 3 octobre 1902 ). L’Humanité du 27 janvier 1905 annonça encore qu’il avait donné 1 F pour les victimes des massacres en Russie.
Lorsque Jules Kinceler devint infirme en mai de 1892, Ranc, Clemenceau et une douzaine de parlementaires réclamèrent en vain pour le vieux lutteur un modeste emploi qui lui permettrait de ne pas végéter dans le besoin. Il mourut à l’hôpital Boucicaut à Paris et eut des obsèques civiles au Père-Lachaise. Ses amis purent l’enterrer non loin du Mur des Fédérés.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article62674, notice KINCELER Jules [Kinceler Pierre, Jules, Philéas] par Michel Cordillot, Jean-Paul Damaggio, version mise en ligne le 26 juillet 2009, dernière modification le 2 février 2020.

Par Michel Cordillot, Jean-Paul Damaggio

Jules Kinceler, homme debout au fond
Jules Kinceler, homme debout au fond
Communiqué par Jean-Paul Damaggio

SOURCES : État civil de Paris. – L’Aurore, 10 février 1906. – Le XIXe siècle et Le Radical, 1er mars 1906. – L. Descaves, Philémon..., op. cit., p. 75. – Note de Louis Bretonnière et Michel Cordillot. – Documentation de Jean-Paul Damaggio.

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