LAGOUTTE André

Par Michel Thébault

Né le 15 juin 1843 à Saint-Sébastien (Creuse), mort le 24 décembre 1879 à Paris XVe arr. (Seine) ; maçon de la Creuse ; garde national de Paris ; communard, déporté en Nouvelle-Calédonie.

André Lagoutte était le fils de Marguerite Lagoutte journalière âgée de 26 ans domiciliée au lieu-dit Marainan, commune de Saint-Sébastien. Comme beaucoup de jeunes limousins, il devint maçon, migrant saisonnier partant travailler sur les chantiers parisiens. Au recensement de 1866 de la commune de Saint-Sébastien, il résidait toujours à Marainan avec sa mère et son frère Louis âgé de 18 ans. Les deux frères étaient maçons. Il semble avoir migré de façon permanente à Paris vers 1867. Il se maria le 31 décembre 1870, dans les derniers mois difficiles de l’hiver du siège, à la mairie du XVe arrondissement avec Laure Mazuel journalière (née à Paris Xe arr. le 6 novembre 1851). Ils reconnurent et légitimèrent deux enfants, Louis, Joseph né le 1er septembre 1868 et Françoise, Charlotte née le 16 janvier 1870. Au printemps 1871, exerçant toujours le métier de maçon, il résidait 26 rue Croix-Nivert, passage Barras dans le quartier de Grenelle (XVe arr.). La plupart des chantiers étant arrêtés en 1871 à Paris, beaucoup de maçons de la Creuse s’engagèrent, comme les ouvriers parisiens, dans la Garde nationale par conviction politique et faute de travail (les gardes percevaient une solde de un franc cinquante par jour). Il s’engagea dans le 165e bataillon de la Garde nationale appartenant à la XVe Légion, du XVe arrondissement de Paris. Il fut arrêté par l’armée prussienne à l’issue de la de la « Semaine sanglante » le lundi 29 mai 1871 et livré aux troupes versaillaises.
 
Il fut envoyé en détention dans le secteur de Rochefort (Charente-Maritime) dans l’attente d’être jugé par un conseil de guerre. Il fut interné dans le fort Enet entre Fouras et l’île d’Aix. L’enquête de police préalable à la décision judiciaire le concernant, révéla des antécédents judiciaires : en février 1867 1 mois de prison pour coups, outrages et rébellion ; en mars 1868 à Paris encore 1 mois de prison pour vols et outrage aux agents. L’appréciation générale portée dans le dossier policier : “paresseux, ivrogne, rôdeur de barrière, soutenant des filles de mauvaise vie” est révélatrice des préjugés sociaux qui accablent les classes dites dangereuses et les travailleurs migrants en particulier. Traduit devant le 3e Conseil de guerre siégeant à Versailles le 8 mai 1872, André Lagoutte fut reconnu “coupable d’avoir dans un mouvement insurrectionnel porté des armes apparentes étant revêtu d’un uniforme militaire et d’avoir fait usage de ses armes”. Il fut condamné à la déportation dans une enceinte fortifiée. Incarcéré au fort de Quélern, en rade de Brest, il vit son recours en grâce rejeté et embarqua pour la Nouvelle-Calédonie le 29 août 1874 avec 167 autres déportés sur le transport à voiles La Virginie. Il arriva en Nouvelle-Calédonie le 4 janvier 1875 après 120 jours de voyage et fut débarqué le même jour à la presqu’île Ducos, dans une enceinte fortifiée au nord de Nouméa. Il fut gracié le 15 janvier 1879 et rentra en France par Le Navarin le 3 juin 1879. Il mourut peu après son retour le 24 décembre 1879 à Paris. Domicilié 31 rue Cambronne (XVe arr.), âgé de 36 ans, il avait repris son métier de maçon.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article63007, notice LAGOUTTE André par Michel Thébault, version mise en ligne le 26 juillet 2009, dernière modification le 16 novembre 2022.

Par Michel Thébault

SOURCES : Arch. Nat., BB 24/805. — Arch. PPo., listes d’amnistiés. — Arch. Nat. Outre-Mer (ANOM) COL H 86. — Arch. Dép. Creuse et Seine (état civil et recensements). — Jean-Claude Farcy, La répression judiciaire de la Commune de Paris : des pontons à l’amnistie (1871-1880), base des communards, site internet. — Louis Bretonnière, Roger Pérennès, L’Internement des prévenus de la Commune à Rochefort, Nantes, 1995. — Stéphane Trayaud Oubliés de l’Histoire, les Limousins de la Commune de Paris, Mon Petit Éditeur, 2012. — Site internet Annuaire des migrants Maçons de la Creuse. — Notes de M. Cordillot et de L. Bretonnière.

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