Par Michel Gorand
Né le 26 février 1923 à Verdun (Meuse), mort le 28 juillet 2003 à Verdun ; sous-chef de gare ; secrétaire général (1965-1973), puis président (1973-1978) de la Fédération des cheminots CFDT ; trésorier (1980-1985), puis président (1985-1994) de l’Union confédérale des retraités CFDT ; membre du bureau confédéral CFDT (1970-1975) ; membre du Conseil économique et social (1974-1980).
Le père de Raymond Martin était cheminot et journaliste et sa mère au foyer. Deuxième d’une famille de cinq enfants, orphelin de père à onze ans, Raymond Martin fut pris en charge par ses grands-parents, alors que deux de ses frères devenaient pupilles SNCF ; l’un des deux, arrêté par la Gestapo en 1943, mourut deux ans plus tard, à l’âge de vingt ans, à Buchenwald (Allemagne). Raymond Martin réalisa sa scolarité chez les Frères à Verdun jusqu’à 1939 et obtint un diplôme d’études comptables supérieures. Il travailla dès août 1939 dans une banque à Verdun et milita à la Jeunesse étudiante chrétienne (JEC) à partir de 1937, puis à la Jeunesse ouvrière chrétienne (JOC) en 1940, puis à l’Action catholique ouvrière (ACO) ultérieurement.
Raymond Martin démissionna de la banque en avril 1942 pour entrer à la SNCF au triage de Vaires (Seine-et-Marne), prit sa première carte syndicale en 1943 au syndicat légal, puis adhéra au syndicat CFTC en octobre 1944. De service de nuit au poste de commandement du triage de Vaires le 29 mars 1944, il fut blessé lors du bombardement du triage qui, suite à l’explosion d’un train de munitions en stationnement, vit périr 910 soldats allemands et onze cheminots. S’étant mis à l’abri sous le tunnel de la Chanteraine, un ruisseau passant sous la butte de débranchement, avec une dizaine de cheminots, il fut le seul rescapé de cet abri naturel ; il eut droit à une citation à l’ordre de la SNCF.
Raymond Martin fit son service militaire d’avril 1945 à avril 1946, dont une grande partie au 155e Génie en occupation en Allemagne où il termina comme sergent.
De retour à la SNCF en mai 1946 comme facteur mixte à Vaires-sur-Marne, Raymond Martin fut nommé fin 1947 à Livry-Gargan comme facteur enregistrant, promu facteur chef au triage de Vaires en 1957, puis sous-chef de gare de 3e classe. Après l’examen de barrage en 1964, il fut nommé sous-chef de gare de 2e classe à Vaires. Pendant cette période, il eut des responsabilités syndicales locales puis régionales : trésorier du syndicat de Vaires de mai 1946 à fin 1947, trésorier du syndicat de Bondy de 1947 à 1957, puis animateur du syndicat de Vaires et rédacteur du bulletin syndical Échos du triage de 1957 à 1964. Il fut par ailleurs membre du bureau régional de l’Union Est et responsable de la commission technique régionale EX de 1950 à 1964. D’autre part, dans la période 1953-1964, il fut délégué du personnel auprès du chef d’arrondissement, auprès du chef de service EX, auprès du directeur de la Région Est. Raymond Martin siégea au comité mixte d’arrondissement, au comité régional EX (chef de service), au comité régional du travail et fut suppléant au comité mixte central EX.
Lors du congrès des cheminots de septembre 1960, Raymond Martin intervint pour rappeler « qu’il y a quatre ans, des congressistes voulaient la paix en Algérie mais qu’ils ne sont compris que maintenant », qu’en 1958 « à cette tribune il avait protesté contre une constitution faite par un homme » et il ajouta « il y a dans ce congrès les traditionalistes et ceux qui sont venus avec une idée bien en tête pour que ça change ». C’est lors du congrès de novembre 1962 qu’il fut élu au bureau fédéral. Il était, dans la fédération, l’un des animateurs du groupe « Démocratie dans le mouvement » qui se fixait quatre objectifs : évolution de la CFTC, socialisme démocratique, planification économique et réformes internes profondes. C’est au titre de ce groupe qu’il fut pressenti pour postuler au poste de secrétaire général de la Fédération. Raymond devint permanent à la Fédération des cheminots à partir du 1er novembre 1964 pour préparer les orientations du congrès fédéral. Il participa au congrès d’évolution en novembre 1964 où la CFTC devint CFDT. Il milita également dans le groupe « Reconstruction ». Une présence plus nombreuse de membres du groupe « Démocratie dans le mouvement » au bureau national de 1962 se traduisit par une plus grande volonté de faire appliquer les décisions du congrès, notamment l’allégement des Unions de régions et le renforcement des secteurs (niveau arrondissement), mais aussi de préparer l’évolution de la CFTC. Un bulletin de liaison fut créé en novembre 1962 et neuf numéros paraîtront jusqu’à octobre 1964.
Lors du congrès fédéral de janvier 1965, un vote eut lieu sur la modification du titre de la Fédération pour l’évolution de CFTC en CFDT et sur 821 mandats, 87 % furent « pour ». Raymond Martin fut élu secrétaire général de la Fédération CFDT et dut se confronter à la scission de l’Union Alsace, mais aussi à quelques contestations sur les réformes internes par deux régions. Il fut réélu secrétaire général lors du congrès d’avril 1967 à Dourdan. Dans son rapport d’activité au congrès, Raymond Martin souligna : « nous maintenons notre potentiel, les résultats des élections professionnelles en sont la preuve matérielle... » et de fait, après l’évolution, la CFDT obtint 19,55 % des voix aux élections de délégués du personnel, tous collèges confondus, soit un léger recul de 0,5 % en 1967 par rapport à 1963. Au congrès de 1970, Raymond Martin présenta le rapport d’activité fédérale pour la période comprenant les événements de mai-juin 1968, la signature par la CFDT de l’accord-cadre modernisation et de l’accord salarial de 1970, lequel prévoyait aussi la réduction de 1 h 30 du temps de travail hebdomadaire (ramené à 43 heures) : le rapport fut adopté par 89 % des mandats et Raymond Martin fut reconduit au poste de secrétaire général. Au congrès de 1973, le rapport d’activité fut adopté à 72 %, mais le conflit de juin 1971 ayant laissé quelque amertume dans l’organisation, Raymond Martin passa le relais à Antoine Barbero et devint président de la Fédération.
Au niveau confédéral, il fut membre du conseil confédéral en 1967, puis élu au bureau national de 1970 à 1975. Il fit partie de la commission politique et, à ce titre, participa aux rencontres avec les partis politiques : Parti socialiste, Parti socialiste unifié, Parti communiste et Ligue communiste révolutionnaire. Raymond Martin fit également partie de la commission confédérale d’organisation (CCO), assura la présidence de la Caisse nationale de résistance et présenta un rapport la concernant au congrès confédéral de Nantes en 1973. Il fit partie de nombreuses délégations confédérales, notamment celle de janvier 1966 qui signa l’accord d’unité d’action avec la CGT, et celle qui signa l’entrée de la CFDT à la Confédération européenne des syndicats.
À partir de 1973, Raymond Martin fut chargé par la Confédération du regroupement des Fédérations Cheminots, Transports, Équipement, Marine et Aviation en une Fédération générale des transports et de l’équipement (FGTE) qui verra le jour en mai 1977. Il fut membre de la commission exécutive comme responsable du secteur organisation et membre du bureau fédéral FGTE de 1977 à 1980.
Désigné par le bureau national de la CFDT, en 1974, pour siéger au Conseil économique et social, il en devint membre du bureau de 1975 à 1980.
Il prit sa retraite de cheminot le 1er mai 1978 avec le grade de sous-chef de gare principal hors classe et entra au bureau de l’Union confédérale des retraités (UCR) au titre de trésorier, lors du congrès de 1980 ; il fut réélu en 1982. Raymond Martin devint président de l’UCR à Dourdan lors du congrès de 1985, siégeant au conseil national confédéral, et fut réélu en 1988 et 1991. Sous sa présidence, Billon étant secrétaire général, l’UCR fit une évolution dans la recherche d’actions communes, en priorité avec d’autres unions confédérées et un choix décisif eut lieu le 27 septembre 1993 par quatre UCR (CGT, CFDT, CFTC, CGC) qui affirmèrent leurs responsabilités d’organisations syndicales confédérées. Il participa au congrès constitutif, à Madrid en 1994, de la Fédération européenne des retraités et personnes âgées (FERPA). Il siégea à deux reprises au Parlement des seniors à Luxembourg (mars 1992 et novembre 1993) où il fut rapporteur de la commission « Solidarité Intergénérations ».
Raymond Martin quitta ses fonctions nationales en 1994 et se retira dans la Meuse où il devint président de l’Union départementale des retraités de 1994 à 1998, siégeant au bureau de l’Union départementale et au Comité départemental des retraités et personnes âgées (CODERPA) de la Meuse. Il milita également dans différentes associations locales, dont l’association de défense des usagers de la SNCF.
Marié en octobre 1943 à Thierville (Meuse) avec Jeannine Fortelle, qui travailla dans une banque puis aux PTT en région parisienne, Raymond Martin était père de trois enfants.
Il mourut à l’hôpital de Verdun le 28 juillet 2003 et fut enterré à Thierville.
Par Michel Gorand
SOURCES : Arch. CFDT. — Le Cheminot de France. — Comptes rendus des congrès fédéraux. — Correspondances avec le militant, 1999 et 2002. — Notes de Georges Ribeill. — État civil.