BEAULATON Raymond, Jean

Par Louis Botella, Sylvain Boulouque, Marie-Louise Goergen et Georges Ribeill

Né le 12 octobre 1922 à Argences (Calvados), mort le 24 octobre 1994 à Saint-Avertin (Indre-et-Loire) ; facteur puis agent du Matériel en région parisienne ; militant syndicaliste successivement de la CGT, de la Confédération nationale du travail (CNT), de FO puis à nouveau de la CNT ; secrétaire général de la Fédération des travailleurs du rail de la CNT (1947-1949) ; militant de la Fédération anarchiste. En 1954, fondateur de l’Alliance ouvrière anarchiste, puis tout en conservant certains aspects de la pensée libertaire, il devint négationniste et proche de l’extrême droite.

Fils et petit-fils de cheminot, militants socialistes, et frère de Maurice Beaulaton, également cheminot, Raymond Beaulaton fut agent au service Exploitation en région parisienne, notamment au Vésinet (Seine-et-Oise, Yvelines), à Rueil-Malmaison (Seine-et-Oise, Hauts-de-Seine) et à Cormeilles-en-Parisis (Seine-et-Oise, Val-d’Oise). Adhérent à la CGT et à la SFIO, avant la Seconde Guerre Mondiale, il était lié à Christian Pineau et, selon Georges Fontenis, aurait participé au mouvement de Résistance « Libération Nord ». Après la Seconde guerre mondiale, il fut à nouveau militant de la CGT. Raymond Beaulaton quitta cette organisation pour prendre part à la création de la Fédération des travailleurs du rail (FTR), affiliée à la Confédération nationale du travail (CNT) dont il fut le secrétaire général d’octobre 1947 à 1949.

Le 26 novembre 1947, Raymond Beaulaton signa avec Robert Speyser (Syndicat du personnel d’inspection et de direction-CGC), Fernand Laurent (Comité d’action syndicaliste-CAS) et André Paillieux (CFTC) une déclaration dénonçant la grève politique. Il témoigna sur les grèves de 1947 : « C’est le 2 juin que la grève générale des cheminots est partie de Villeneuve-Saint-Georges [Seine-et-Oise, Val-de-Marne] sous l’impulsion du petit syndicat de la CNT qu’animait notre camarade Roger Prince, ouvrier aux ateliers. Le 1er novembre, une nouvelle grève démarra encore à Villeneuve-Saint-Georges, animée toujours par la FTR et par Roger Prince. Cette grève dura jusqu’au 12 décembre. Le 27 novembre, je me suis rendu à Villeneuve-Saint-Georges en compagnie de Fernand Robert pour soutenir les copains de la FTR, et nous prîmes la parole aux ateliers. Il y eut de violents incidents avec les communistes ». Selon, Georges Fontenis, il aurait demandé au cabinet de Christian Pineau de ne pas être considéré comme gréviste.

Raymond Beaulaton quitta la CNT en 1949 pour rejoindre Force ouvrière. Il participa, en octobre 1950, au congrès confédéral de cette organisation, au titre du syndicat des cheminots de Cormeilles-en-Parisis. Il intervint à la tribune en se présentant comme un ancien membre de la CNT et souhaita que Force ouvrière recherche l’unité avec les syndicats autonomes tout en exprimant son opposition à un quelconque rapprochement avec la CFTC, la CGC et la Confédération du travail indépendant (CTI). Il ne resta que peu de temps au sein de Force ouvrière et retourna à la CNT. Il milita très activement à la Fédération anarchiste (FA) au sortir de la Seconde guerre mondiale. Ses activités à la FA furent de deux ordres jusqu’en 1952. Éditorialiste et membre du comité de rédaction du libertaire, il écrivait sous le nom de plume de « Souriant », des chroniques sur la vie sociale et syndicale. Parallèlement, il était chargé de coordonner l’action des cheminots militants anarchistes. En 1951, son attitude de 1947, fut dénoncée par la CNT. Il a été suspendu un temps du comité de rédaction du Libertaire, puis fut réintégré après enquête, au bénéfice du doute.

Lors de la scission de la FA en 1952-1953, qui sépara le mouvement libertaire en deux organisations, la Fédération communiste libertaire animée par Georges Fontenis et la Fédération anarchiste reconstituée, à laquelle participaient notamment Maurice Joyeux, Maurice Laisant et Maurice Fayolle. Raymond Beaulaton rejoignit, un temps, ces derniers et anima, parallèlement, avec quelques militants un bulletin intitulé L’Entente anarchiste, qui voulait fédérer les militants libertaires en France. L’entente anarchiste s’est dissoute en 1954. Beaulaton quitta la FA en 1956. Cette organisation, selon lui, n’était pas une organisation anarchiste, car elle était « dirigée par les Francs-maçons ». Il participa à la fondation le 25 novembre 1956 de l’Alliance ouvrière anarchiste. Elle regroupa quelques groupes en France à Saint-Étienne autour de Fernand Robert et Marcel Renoulet, à Perpignan et au Mans, avec Beaulaton. Cette organisation réduite créa la même année un éphémère mouvement anarchiste mondial et se dota d’un mensuel, L’Anarchie, le journal de l’ordre. C’est à cette date que commença l’évolution de l’AOA et de ses deux principaux animateurs, Robert et Beaulaton. Proches de Paul Rassinier, ils suivirent ses prises de positions et cautionnèrent ses thèses. Dans le même temps, Beaulaton se montra particulièrement hostile au mouvement nationaliste algérien développant dans L’Anarchie une hostilité affichée à l’immigration algérienne : « Paris est devenu une immense médina ». En 1967, il créa un bulletin L’Alliance syndicaliste des cheminots anarchistes qui n’eut qu’une existence brève. Jusqu’à sa mort, il anima L’Anarchie et participa à d’autres journaux de la même mouvance : L’Homme libre, animé à Saint-Étienne par Marcel Renoulet et au Libre examen à Perpignan. Dans ces journaux alternaient une défense de l’individualisme anarchiste et du négationnisme. Hospitalisé au Centre hospitalier universitaire et régional de Tours (Indre-et-Loire), situé sur la commune de Saint-Avertin, il y décéda. Raymond Beaulaton s’était marié en 1950 à Paris (XIIIe arr.) avec Madeleine Georgelin, qui décéda le 23 mars 2002, à l’âge de soixante-dix-neuf ans.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article647, notice BEAULATON Raymond, Jean par Louis Botella, Sylvain Boulouque, Marie-Louise Goergen et Georges Ribeill, version mise en ligne le 30 juin 2008, dernière modification le 23 février 2012.

Par Louis Botella, Sylvain Boulouque, Marie-Louise Goergen et Georges Ribeill

SOURCES : Arch. Fédération CGT des cheminots. — Arch. Fédération CGT-FO des cheminots. — Compte rendu du congrès confédéral de la CGT-FO. — Georges Ribeill, « Autour des grèves de 1947, les scissions de l’après-guerre au sein de la Fédération CGT (CAS, FO, FAC, FgMC) », Revue d’histoire des chemins de fer, n° 3, Mouvement social et syndicalisme cheminot, automne 1990, p. 95-113. — Louis Botella, Force Ouvrière chez les cheminots. De la Libération à 1954, Éditions Le Petit Pavé, 2002. — Informations transmises par Maurice Beaulaton. — Acte de naissance. — Jean Maitron, Le mouvement anarchiste, vol. II, Éditions Maspero, 1975. — Valérie Igounet, Histoire du négationniste en France, Le Seuil, 2001. — Maurice Joyeux, Sous les plis du drapeau noir, Le Monde libertaire, 1988. — Georges Fontenis, L’autre communisme. Histoire subversive du mouvement libertaire, Mauléon, Acratie 1990.

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