PAPY Théophile, Alexandre, Paul

Né à Varilhes (Ariège) le 25 septembre 1844, mort à Varilhes le 10 mars 1910 ; pharmacien ; sympathisant de la Commune de Paris.

Fils d’un pharmacien, Théophile Papy était lui-même élève en pharmacie en 1871. Quoique domicilié à Bagnères-de-Luchon, il se trouvait, au début de l’année, dans sa commune natale lorsque, une « Association fédérale républicaine » ayant été créée, probablement en vue des élections municipales du 30 avril, il fut nommé secrétaire de son comité pour le canton de Varilhes. La liste républicaine, patronnée par le docteur Frézoul, maire de la commune et futur sénateur de l’Ariège, fut effectivement élue. Or, la « Déclaration de la Commune au peuple français » fut favorablement accueillie par quelques municipalités ariégeoises nouvellement élues, notamment par celles de Pamiers, de Foix, de Lavelanet et de Varilhes qui votèrent des motions en faveur des franchises communales de la capitale et demandèrent leur extension à toutes les communes de France. Il convient de signaler d’ailleurs qu’à Varilhes, bourg rural sur la route de Foix à Toulouse, le plébiscite de 1870 avait donné une majorité appréciable de « non » — 263 contre 151 « oui » — alors que le département de l’Ariège avait donné une majorité écrasante aux « oui » (52 975 contre 5 764 « non »).

L’arrivée à Foix, le 28 avril 1871, d’un nouveau préfet, Saubot-Damborgez, ancien secrétaire de Thiers, irrita les républicains. L’émotion fut vive à Foix lorsqu’on apprit, le 3 mai, que deux batteries de canons, achetées par le département et destinées aux mobilisés de l’Ariège, étaient conduites à la gare de Foix pour être dirigées sur Toulouse. On craignait de voir ces canons, considérés comme propriété du département et non de l’État (ils n’avaient d’ailleurs pas encore été payés à leur fournisseur), utilisés contre les Parisiens. Quelques jeunes gens vinrent manifester devant la Préfecture, mais furent dispersés par les soldats du poste. Dans l’après-midi, un groupe de Fuxéens alla en toute hâte prévenir les habitants de Varilhes où devait passer le convoi. Des Varilhois, au nombre d’environ 200, drapeau rouge en tête et sous la direction de Papy, se rendirent à la gare. Il était environ 3 heures. Papy invita le chef de gare à envoyer une dépêche à Foix pour empêcher le départ du train de 5 h 20 dans lequel on pensait que devaient se trouver les canons. Il ne put obtenir satisfaction.
Au sortir de la gare, Papy entraîna les plus ardents parmi les manifestants à la rencontre du train. Au premier passage à niveau, la bande pénétra sur la voie, la suivit, s’augmenta en cours de route de quelques habitants de Saint-Jean-de-Verges et, lorsque, un peu plus loin, on aperçut le train, Papy invita le porteur du drapeau rouge à l’agiter pour faire arrêter la locomotive. Une inspection minutieuse eut lieu, mais on ne trouva pas trace des canons : ceux-ci en effet ne devaient partir de Foix, sous bonne escorte, que vers sept heures par un train spécial.
Peu satisfaits, les manifestants continuèrent à cheminer jusqu’à Foix où régnait encore une certaine effervescence. Papy et quelques autres organisèrent aussitôt une réunion dans une des salles de la mairie mise à leur disposition par l’adjoint au maire, Maugard, qui la fit éclairer et leur donna encre et papier. À la hâte fut rédigée une protestation contre l’enlèvement des canons et on décida de la porter au préfet qui logeait encore dans un hôtel de la ville. Le préfet accepta de se rendre à la Préfecture avec cinq délégués, probablement les membres du bureau de la réunion. Alors se forma un étrange cortège de quelque cinq cents personnes, où l’on remarquait surtout des jeunes gens et quelques femmes. Les délégués voulaient obtenir la promesse que les canons ne seraient pas utilisés contre Paris. Mais le préfet avait pu faire prévenir secrètement le commandant de gendarmerie et le colonel du 17e régiment de ligne. Gendarmes et soldats entreprirent de faire évacuer la cour de la Préfecture, ce qui ne se fit pas sans heurts. Le colonel brandissant son sabre, la foule riposta en lançant des pavés. Il y eut quelques blessés de part et d’autre, mais sans gravité et, vers une heure du matin, la ville avait retrouvé son calme.

Papy fut traduit ainsi que d’autres manifestants, tous très jeunes (un seul était à peine plus âgé que Papy et plusieurs étaient mineurs), devant le tribunal de première instance de Foix. Lors d’un premier jugement, le 27 mai 1871, il fut reconnu innocent de « menaces verbales de déraillement d’un train de chemin de fer, sous condition et avec ordre », mais coupable « d’avoir [...] pénétré dans l’enceinte du chemin de fer sur le territoire de la commune de Vernajoul et d’y avoir circulé sans autorisation » et condamné pour ce fait à 500 F d’amende et aux frais. Dans une seconde séance, le 8 juillet 1871, il fut convaincu d’avoir « fait partie en qualité de membre du bureau d’une réunion publique illégalement tenue », mais avec circonstances très atténuantes car, depuis le 4 septembre 1870, l’autorité administrative « avait toléré toutes les réunions publiques sans exiger de déclaration préalable », il fut condamné à deux francs d’amende et aux frais, « le tout solidairement » avec trois autres accusés.
Lors du premier procès, Papy avait été défendu par Me Ferran, révoqué de ses fonctions de substitut au procureur de la République par le préfet Saubot-Damborgez dès les premiers jours du mois de mai, à la suite d’une lettre publiée dans le journal républicain L’Avenir de l’Ariège où il prenait nettement position en faveur des manifestants. Quelques autres accusés avaient été assistés de Me Louis Laborde, maire de Foix, qui devait être au cours des années suivantes une personnalité marquante de la politique radicale dans le département.
L’action de Papy reste épisodique : établi par la suite pharmacien à Varilhes, il ne semble pas qu’il se soit signalé par une quelconque activité politique.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article67495, notice PAPY Théophile, Alexandre, Paul, version mise en ligne le 26 juillet 2009, dernière modification le 1er avril 2020.

SOURCES : Arch. Dép. Ariège : 2 U, jugements correctionnels et Zf 22. — L’Avenir de l’Ariège.

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