MORERA Laurent, Louis [écrit aussi MORÉRA]

Par André Balent

Né le 17 juin 1906 à Estagel (Pyrénées-Orientales), mort le 20 mai 1987 à Aressy (Pyrénées-Atlantiques) ; mineur puis cheminot ; maire communiste de Villefranche-de-Conflent (Pyrénées-Orientales) ; résistant à Marvejols (Lozère).

Laurent Morera était le fils d’un cultivateur d’Estagel —devenu cheminot— Joseph, Laurent , âgé de vingt-quatre ans en 1906 et de Louise, Armande Deloncle, native aussi d’Estagel et âgée de vingt-et-un ans en 1906. Il travailla d’abord comme mineur à la Compagnie des mines de la Têt (mines de fer de la commune d’Escaro, Pyrénées-Orientales). Il était alors domicilié à Joncet (commune de Serdinya, Pyrénées-Orientales). À Joncet où se trouvait alors une importante gare minière de la Compagnie du Midi, il fut embauché comme homme d’équipe, à l’âge de quinze ans.

Il se maria à Serdinya le 22 mai 1926 avec Marie-Thérèse Brunet née à Serdinya-Joncet le 29 mars 1909, domiciliée à Joncet, fille de d’Étienne Brunet décédé et de Marie Broch. Comme Laurent Morera était mineur et que ses parents étaient décédés, le consentement au mariage fut donné par ses deux grands-pères, Isidore Morera et Honoré Deloncle. Le premier fils du couple, Raymond, Jean, Laurent naquit à Serdinya-Joncet le 14 octobre 1926. Cette naissance lui permit d’effectuer son service miltaire dans son département d’origine.

Laurent Morera fut incorporé le le 15 novembre 1926 au 24e régiment de tirailleurs sénégalais, en garnison à Perpignan. Caporal le 10 mai 1927, il fut renvoyé dans ses foyers à Joncet le 16 avril 1928. Après son service militaire, il travailla de nouveau à Joncet puis comme manœuvre à la Compagnie des chemins de fer du Midi à la grande gare internationale de Cerbère (Pyrénées-Orientales) où il adhéra au syndicat CGTU. Il fut affecté en gare de Villefranche-de-Conflent le 5 février1931. En août 1934, à Villefranche-de-Conflent, il assurait le secrétariat du syndicat GGTU de cet établissement (important centre ferroviaire, dépôt de matériel moteur électrique et transbordement de la voie normale de Perpignan à Villefranche-de-Conflent à la voie étroite vers Latour-de-Carol) et participa, le 23 août 1934, à la réunion d’unification des syndicats CGT et CGTU locaux. Affecté à l’entretien des lignes électriques, Laurent Morera pouvait entrer facilement en contact avec tous les employés de la ligne. Devenu secrétaire en titre du syndicat CGT des cheminots de Villefranche-de-Conflent en janvier 1938, il le demeura jusqu’à la dissolution de septembre 1939. Par la suite, il poursuivit sa carrière professionnelle commencée à Villefranche-de-Conflent à l’équipement électrique de la SNCF, le long de ses lignes électrifiées. Entre temps, il fut affecté (10 octobre 1935) en tant que technicien électrique, à la centrale hydro-électrique d’Eget (commune d’Aragnouet, Hautes-Pyrénées), puis (4 décembre 1935) aux Forges d’Abel (commune d’Urdos, Basses-Pyrénées). Il revint à Villefranche-de-Conflent le 12 février 1937.

Laurent Morera avait adhéré au Parti communiste en octobre 1934. Secrétaire de la cellule des cheminots de Villefranche, il appartint au comité de la région catalane du PC en 1937. Lors de la réunion du comité régional à Millas (9 janvier 1938), il fut élu membre de la commission régionale de contrôle. Il fut délégué de la Région catalane du PC au congrès national d’Arles (25-29 décembre 1937) et,en fit un compte-rendu à la cellule de Villefranche-de-Conflent. Le 19 août 1937, le conseil municipal de Villefranche-de-Conflent où il siégeait depuis 1935 l’élut maire de la commune. Candidat aux élections cantonales en 1937, il se désista en faveur de Joseph Rous* candidat de la SFIO. Le préfet des Pyrénées-Orientales le suspendit de son mandat en octobre 1939.

Père d’un quatrième enfant en 1938, sa situation militaire changea le 16 septembre de cette année-là. : en application de l’article 58 de la loi Painlevé du 31 mars 1931, il fut affecté à la classe PA2R de mobilsation, c’est à dire, que, malgré son âge, il passait d’office à la 2e réserve et devenait affecté spécial aux chemins de fer. Pour ce motif, il ne fut pas mobilisé dans une unité militaire en 1939.

Pendant les premiers mois de la guerre, Laurent Morera maintint des contacts avec des militants communistes de la région, comme Paul Galindo*, le leader des mineurs d’Escaro. Le 20 juin 1940, il fut déplacé à Marvejols (Lozère) sur la ligne électrifiée de Béziers (Hérault) à Neussargues (Cantal). iI organisa à partir de l’été 1941 le Front national à Marvejols. Il fut en contact avrc Henri Cordesse*, instituteur et dirigeant de la résitance non communiste lozérienne. Ce fut en tant que représentant du Front national qu’il assista à plusieurs réunions unitaires de la Résistance lozérienne. Au cours de l’une d’entre elles avec l’AS du département à Saint-Lambert le 30 août 1943, chez Olivier de Framond, cousin de Gilbert de Chambrun*, il put s’enfuir afin d’échapper aux Allemands alors que plusieurs participants furent arrêtés et déportés (parmi eux Olivier de Framond et Albert Picolo*). Passé ensuite à la « Résistance-fer », Morera participa avec des cheminots de la région de Marvejols à de nombreuses actions de sabotage. Arrêté puis relâché, menacé d’une nouvelle arrestation, il rejoignit le 8 juin 1944 le maquis de Campagne. Il participa à de nombreuses actions : missions de liaison, sabotages, attaques de trains et cambriolages pour alimenter les fonds du maquis.

À la Libération, Laurent Morera devint adjoint du comité local de Libération de Marvejols et fut élu secrétaire de la cellule communiste de cette localité. Puis demeurant à Cazères-sur-Garonne (Haute-Garonne) jusqu’en 1947, il y fut secrétaire à l’organisation. De 1947 à 1948, il travailla aux chemins de fer algériens (SNCFA) et milita au PC algérien. Après son retour en France, ayant réintégré la SNCF, il travailla dans les Pyrénées-Atlantiques à Urdos puis à Lacq — il était le chef de la sous-station électrique de cette localité sur la ligne SNCF de Pau à Bayonne— où il termina sa carrière en 1961 et fut secrétaire de la section communiste de Bedous, puis secrétaire de celle de Lacq, enfin secrétaire de celle des cheminots de Pau (Pyrénées-Atlantiques). Il entra au comité fédéral PCF des Pyrénées-Atlantiques en 1954.

Demeurant à Pau dès sa mise en retraite, Laurent Morera devint membre du comité de section et, depuis 1968, trésorier de la section. Membre du bureau du syndicat CGT des cheminots de Pau, il fut élu délégué du personnel à la sécurité. Il mourut dans son département d’adoption après une longue maladie. Mais il revenait souvent en Conflent où il avait conservé des amis et des parents et où il était très apprécié. Suivant sa volonté, ses cendres furent déposées le 30 mai 1987 au cimetière de Villefranche-de-Conflent.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article6896, notice MORERA Laurent, Louis [écrit aussi MORÉRA] par André Balent, version mise en ligne le 30 juin 2008, dernière modification le 31 octobre 2018.

Par André Balent

SOURCES : Arch. Dép. Pyrénées-Orientales, versement du cabinet du préfet (13 septembre 1951) ; 2 E 4449, état civil d’Estagel, acte de naissance de Laurent Morera ; 2 E 5277, état civil de Serdinya-Joncet, acte de mariage entre Laurent Morera et Marie-Thérèse Brunet et acte de naissance de leur premier fils ; 1 R 606, f° 1253. — Réponse écrite de Laurent Morera (1974) à un questionnaire. — Interview de Paul Galindo, 10 août 1974. — L’Avant-Garde, septembre 1934. — Le Travailleur catalan, 1937-1939. — L’Indépendant, 8 juin 1987, nécrologie dans la rubrique "Villefranche-de-Conflent".

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