TARTARET Eugène

Né vers 1820 à Paris, mort le 15 mars 1881 à Paris (XIe arr.) ; élève de l’École des Arts et Métiers de Châlons-sur-Marne ; ouvrier ébéniste, coopérateur ; secrétaire de la Commission ouvrière de 1867 ; délégué à plusieurs congrès de l’Internationale.

Eugène Tartaret habitait, 232, rue du Faubourg-Saint-Antoine, XIIe arr., près de la place de la Nation.

Avec Lazare Lévy, il fut élu secrétaire de la délégation ouvrière à l’exposition universelle de 1867, délégation qui constitua la Commission ouvrière. Il était alors adhérent de la société coopérative « La Sincérité » du faubourg Saint-Antoine et collaborait à l’Almanach de la Coopération de 1867 (article « Les Femmes et la coopération » dans lequel il plaidait en faveur de la présence des femmes dans le mouvement). Après l’Exposition, il refusa une décoration de l’Empire. Ses collègues des délégations lui offrirent une médaille de vermeil.
Il appartint à la commission de quinze membres qui, le 18 juin 1865, fonda la Société générale coopérative de l’ébénisterie, à responsabilité limitée, qui groupait 200 membres délégués des différents ateliers.

En 1868 et 1869, Tartaret participa aux troisième et quatrième congrès de l’Internationale.
À Bruxelles, en septembre 1868, Tartaret parla au nom de « la réunion d’ouvriers formée à l’Exposition universelle de 1867 » qui ont voulu être représentés « afin de prouver qu’entre les ouvriers, il n’y a pas deux camps, il n’y en a qu’un, celui de la solidarité et de la paix universelle ».
Il intervint à propos de l’enseignement et se montra partisan de l’enseignement obligatoire, « mais libre, c’est-à-dire en dehors de l’État, car il faut que chacun comprenne la portée des devoirs qui lui incombent » ; et il insista longuement sur l’enseignement professionnel : « L’enfant, pour apprendre son métier, doit en apprendre les principes primordiaux dans l’atelier et y joindre les études plus élevées qu’il puiserait dans des cours publics faits par des hommes compétents ». Il participa également à la discussion de la 5e question de l’ordre du jour : « Des grèves... » et déclara à ce sujet : « Sans doute, la grève est déplorable au point de vue économique, mais elle est nécessaire, parce qu’elle permet au travailleur de défendre non seulement son salaire, mais encore et surtout sa dignité... »
L’année suivante, Tartaret collabora à La Voix du Peuple, organe des chambres syndicales de tendance proudhonienne, 6 février-28 août 1869. Puis il participa au 4e congrès de l’Internationale qui se tint à Bâle en septembre 1869. Qualifié d’ébéniste pour marbriers, il fut délégué des marbriers de Paris. Un des votes les plus importants concerna la propriété collective du sol : 54 voix se prononcèrent pour, 4 contre et il y eut 13 abstentions.
Voici quelques extraits des déclarations de Tartaret sur cette importante question :
« Je crois que la société a le droit d’abolir la propriété individuelle ; mais si le principe de la propriété collective est admis, il est nécessaire de trouver les moyens d’effectuer cette transformation [...]
« Je propose [...] d’opérer le rachat de la propriété par les communes ou par l’État, n’importe, par qui doit s’occuper de l’exploitation de la propriété collective, au moyen d’un paiement de loyers, portant en eux l’amortissement et le rachat de la propriété ;
« Le rachat par annuités au profit de la collectivité ;
« Je propose donc d’ajouter aux conclusions du Congrès la résolution suivante :
« Le Congrès de l’Internationale, en adoptant le principe de la propriété collective, déclare mettre à l’étude constante des congrès suivants les moyens pratiques d’opérer la liquidation sociale qui doit assurer à tous les citoyens du monde la jouissance de la partie de la propriété terrienne nécessaire pour que chacun puisse user en liberté de l’instrument naturel du travail : la terre ».
Tartaret, qui s’était prononcé pour la propriété collective du sol, refusa le communisme absolu et demanda le maintien de l’héritage.

Tartaret fut-il membre de l’Internationale — J. Gaumont répond par l’affirmative — ou simple participant à deux congrès de l’AIT ? Durand, qui figura au troisième procès de l’Internationale en juin-juillet 1870, déclara au cours du procès qu’à Bâle et Bruxelles, certains délégués n’appartenaient pas à l’association. « Ce qui le prouve, ajouta-t-il, c’est que les citoyens Tartaret et Henry, qui étaient comme nous délégués au Congrès, n’ont jamais été, que je sache, inculpés d’être membres de l’Internationale » (cf. p. 202 du c. rendu).

Pendant la guerre, malgré son âge et sa mauvaise santé, Tartaret fit partie des compagnies de marche et participa à la bataille de Champigny, 30 novembre. J. Ferry, qui le rencontra alors, le nomma, le 1er décembre, commis principal à la Ville de Paris. Son nom figure comme disant un texte intitulé "La Commune révolutionnaire", lors du concert patriotique de la 11e légion du 30 avril 1871 (A Paris, VD3/14). Il reprit son poste le 1er juin 1871. Le gouvernement de Versailles le révoqua le 1er juillet. Il végéta alors en proie à la maladie et à la misère.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article71478, notice TARTARET Eugène, version mise en ligne le 26 juillet 2009, dernière modification le 18 août 2020.

ŒUVRE : (cotes de la Bibl. Nat.) : Commission ouvrière de 1867. Recueil des procès-verbaux des assemblées générales des délégués et des membres des bureaux électoraux... recueillis et mis en ordre par E. Tartaret, Paris, 2 vol. in-8°, 1868 et 1869. 1er recueil, R 35548, 2e recueil, R 52176. — Conférences publiques de la mairie du XIe arr. Enseignement professionnel, Paris. 1869, in-18, 35 p., Rp. 4189. — Monographie des métiers de Paris, 1877. — Les Délégations ouvrières du département de la Seine au gouvernement de la défense nationale. Signé : E. Tartaret, Minet, L. Lévy, Boulanger, etc... le 6 septembre 1870, Paris, Impr. Lefebvre, s.d. 8° 1 page recto, Lb 57/3756. Lettre à M. le Préfet de la Seine, 19 juillet 1871, s.l., 1871, in-8°, 2 p., 8° Ln 27/26151.

SOURCES : La Première Internationale (J. Freymond) op. cit., tt. I et II. — J. Gaumont, Histoire générale de la coopération en France, op. cit. et notes inédites. — Troisième procès de l’AIT à Paris, op. cit.La Lanterne, 17 mars 1881, p. 3. — État civil de Paris. — Note de J. Chuzeville.

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