BEN MOHAMMED Mustapha dit Mustapha Negro

Par René Gallissot et Jean-Louis Planche

Né le 31 décembre 1926 dans la Casbah d’Alger, cheminot à Alger, militant de la CGT et du PPA ; responsable technique à l’OS (1949) ; conseiller municipal MTLD à Alger (1953-1955) ; partisan de Messali (MNA), responsable des groupes armés messalistes de l’Algérois ; arrêté et torturé ; rentre en Algérie après l’indépendance, organisateur du Parti de Travailleurs.

Né dans une famille originaire du sud marocain, Mustapha Ben Mohammed sortit à dix-huit ans du centre de formation de la SNCFA titulaire d’un brevet professionnel ; il travailla comme ouvrier qualifié aux ateliers de réparation d’Hussein Dey où il était le seul algérien avec ce statut jusqu’en 1955.
Militant de la CGT dès son entrée aux chemins de fer, déjà sensibilisé au nationalisme par son passage chez les Scouts musulmans algériens, il avait été révolté par la sauvagerie de la répression du soulèvement de mai 1945 et avait adhéré au PPA clandestin dans une cellule de la Casbah qui fonctionnait au titre des Amis du Manifeste et de la Liberté. Il devint en 1947 chef de section du MTLD à la Casbah ; on lui attribua des sympathies ou des liens trotskystes, peut-être avec quelque anticipation.

Début 1949, il entra à l’Organisation spéciale du PPA-MTLD ; il y devint cadre technique : maniement d’armes et méthodes de la guérilla. Il abandonna sur ordre, toute responsabilité au MTLD qui était légal ; la clandestinité devint sa culture. Ce fut après le démantèlement de l’OS qu’il reprit une activité publique en 1951. En 1953, il fut élu conseiller municipal d’Alger sur la liste MTLD ; à vingt-sept ans, il était le plus jeune membre du conseil municipal. Il apprécia peu le comportement politique, petit bourgeois et bureaucratique selon lui, des centralistes (courant du Comité central du MTLD), mais respecta l’accord municipal passé entre le maire Jacques Chevallier et le MTLD que Messali* ne dénonça qu’en mars 1954. Il démissionna en janvier 1955.

Mustapha Ben Mohammed et cinq autres conseillers municipaux messalistes étaient en effet en rupture avec A. Kiouane qui dirigeait la représentation au Conseil municipal. Depuis sa base de la Casbah d’Alger, il mena la lutte contre les partisans du Comité central pour la récupération des locaux ; il bloqua les finances. Il participa au Congrès d’Hornu en Belgique en juillet 1954 et fut élu au Conseil national de la Révolution, la direction mise en place par Messali*. Les principaux dirigeants du MTLD ayant été arrêtés le 5 novembre 1954, aussitôt après le déclenchement de l’insurrection parce qu’ils étaient fichés, il devint membre de la direction du MNA, le parti créé par Messali. Il retrouva la clandestinité pour organiser les groupes armés des partisans de Messali dans l’Algérois en attente des instructions du grand leader pour passer à l’action.
Arrêté le 5 novembre 1955 à El Biar par les Services de la police judiciaire d’Alger, il fut torturé à l’électricité dans les locaux du Commissariat central puis transporté dans les locaux de la police judiciaire de Blida où il fut à nouveau torturé. La nouvelle de son arrestation ne fut rendue publique que le 12 novembre et il ne fut présenté à un juge d’instruction que le 15. Emprisonné à Barberousse en août 1957, le Tribunal permanent des forces armées d’Alger le condamna à vingt ans de travaux forcés. Il passa de Barberousse à la prison centrale de Maison Carrée (El Harrach) puis à la prison d’El Oued au Sahara avant d’être transféré en France en 1961. Il fut interné à la prison des Baumettes à Marseille puis à celle de Lyon et au camp de Mauzac près de Périgueux. Il fut libéré le 11 avril 1962 après les Accords d’Evian.

À l’indépendance, il rentra en Algérie et devint enseignant. Surtout il coordonna dans le secret propre au courant lambertiste adhérent de la IVe Internationale (voir Lambert* pour ses liens avec le messalisme), une organisation qui devint le Parti des Travailleurs. S’il laissa la première place à la tribune à une femme, Louisa Hanoun, il se fit cependant élire député en 2002. Il présida l’Assemblée comme doyen d’âge.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article718, notice BEN MOHAMMED Mustapha dit Mustapha Negro par René Gallissot et Jean-Louis Planche, version mise en ligne le 30 juin 2008, dernière modification le 24 novembre 2013.

Par René Gallissot et Jean-Louis Planche

SOURCES : « Appel à l’opinion publique, le peuple de France sauvera Mustapha Ben Mohammed », Comité pour la libération de Messali Hadj et des victimes de la répression, brochure, Paris, novembre 1954. — Interview de Mustapha Ben Mohammed par J.L. Planche, Paris 1984. — Benjamin Stora, Dictionnaire biographique des nationalistes algériens, op.cit. — Notice par J.L. Planche, Parcours, op.cit. n° 3, Paris, 1985.

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